Coordenado por Sidiki Abdoul DAFF e Françoise FEUGAS
2000
La décentralisation, avec l’émergence des collectivités locales, se déroule en Afrique dans un contexte d’indigence économique et de désengagement de l’Etat dont l’un des aspects marquants est la « responsabilisation des populations » par le transfert des charges des services sociaux sur elles (privatisation des bornes-fontaines, de la santé, de l’évacuation des ordures, etc.). Il s’agit ici de délester l’Etat des secteurs supposés non rentables pour les confier à un pouvoir local de proximité mis en place pour rapprocher les élus des habitants.
Ainsi, en l’absence d’un pouvoir local prenant en compte leurs préoccupations, les habitants, qui considèrent la ville ou le village comme leur territoire, s’auto-organisent pour trouver des solutions à leurs problèmes quotidiens. Ce sont souvent des réponses collectives à l’échelle d’un quartier, d’un village ou d’un pâté de maisons, facilitées par une proximité cultivée, une communauté culturelle et une claire conscience d’un destin commun. Le foisonnement des organisations communautaires est le signe de cette volonté d’auto-prise en charge pour améliorer le cadre de vie sans se référer à un quelconque sauveur venu de l’extérieur.
Cette « autre » Afrique bricole, se débrouille, reconstruit du lien social et répond avec ses propres moyens et modes de représentation aux défis qui l’assaillent : la pauvreté, l’insécurité, la dégradation de l’environnement, le manque d’infrastructures… Toutes ces initiatives possèdent leur dynamique propre qui, dans certains cas, peut relayer et compléter l’action du pouvoir public et dans d’autres, entrer en conflit avec lui en l’absence de dialogue pour une gestion concertée.
Les malentendus et les conflits résultant de l’absence de dialogue pour une gestion concertée concernent aussi, quelquefois, les rapports que les populations entretiennent avec les ONG. Ces dernières, tout en étant d’une grande utilité, ont tendance à faire à la place des habitants en partant de leurs propres vues ou des priorités des bailleurs de fonds étrangers.
La décentralisation et la démocratisation ignorent trop souvent le pouvoir traditionnel qui tire sa légitimité des tréfonds de l’histoire et de la culture africaines, légitimité que lui reconnaissent les populations mais qui sont négligées par les autres acteurs. Ainsi il apparaît qu’à l’intérieur du système décentralisé moderne les différents acteurs cheminent dans un espace commun (ville, village, quartier, etc.) sans concertation et se neutralisent par moments.
Ce qui est sûr, c’est que c’est bien de la confluence de ces différentes dynamiques que pourra émerger une véritable décentralisation, qui n’a de sens que si elle met au centre de ses préoccupations la participation de l’habitant. A ce niveau l’enjeu est de construire une parole de l’habitant qui consiste « à casser le monopole de la production de sens légitime aux instances dominantes [Pouvoir central ou local] et à reconnaître d’autres liens de production du sens, en particulier par les intéressés eux-mêmes [Habitants] ». (1)
Sidiki Abdoul DAFF, juillet 2000
Lire le texte « Gouvernance urbaine et quartiers populaires : un défi mondial » (.rtf), contribution de Pierre Calame à la session spéciale « Elus, habitants, professionnels de la ville : vers une charte du partenariat », lors du sommet Africités 2000, 17 mai, Windhoek, Namibie.
Lire la Charte Africaine de partenariat entre habitants et collectivités locales
Résolutions / Recommandations des habitants, 18 mai 2000
Texte lu par Irene Ereemye Balikuddembe, Ouganda, lors de la séance de clôture du sommet Africités 2000
Nous, habitants africains réunis en un forum des habitants qui s’est constitué à l’occasion du sommet Africités 2000, dans la ville de Windhoek, en Namibie,
Soumettons les recommandations / résolutions suivantes à cette assemblée et au Conseil des Ministres. Nous insistons sur la nécessité de promouvoir et de renforcer la démocratie locale par la reconnaissance du rôle et de la contribution des habitants dans le processus de développement de nos villes.
Nous réaffirmons que la décentralisation a pour conséquence un déplacement des pouvoirs vers les collectivités locales. Considérant que la bonne gouvernance est un droit pour les communautés, elle signifie la transparence et un droit de contrôle de la part de ces mêmes communautés. Nous recommandons donc que :
Des interactions périodiques existent entre les habitants et les autorités locales en sorte de jalonner les étapes du processus de développement de nos villes ;
Nous invitons les autorités locales à créer des espaces pour que les habitants puissent participer à la gestion et au contrôle des ressources publiques ;
Il est nécessaire d’utiliser divers systèmes de communication pour intensifier et donner du sens au dialogue entre autorités locales et habitants ;
Considérant que les habitants ont le droit de participer à la gestion des affaires publiques locales, il faut promouvoir une participation efficace et effective des populations et l’implication du secteur privé dans la mobilisation des ressources.
Nous soumettons à cette honorable assemblée une proposition de débat et une Charte Africaine de partenariat entre les autorités locales et les communautés qui devraient servir de base pour construire un partenariat solide.
Nous recommandons la création d’une Alliance des Villes qui voudraient adopter cette Charte Africaine de Partenariat.
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