La proposition de loi des peuples et nations indigènes recherche l’intégration de ces populations dans le cadre juridique normatif de l’État
09 / 2002
Gilberto Talagua, actuellement député au parlement équatorien pour le mouvement Pachakutik, a joué un rôle moteur pour que soit approuvée par cette instance la Loi des peuples et nationalités de l’Équateur.
Ce projet de loi fait partie du programme de revendications des peuples et nationalités d’Équateur, programme qui aborde divers aspects de la vie et de la réalité des communautés dans toutes les provinces du pays. G. Talagua raconte que bien que leurs lois coutumières existent depuis des milliers d’années, la proposition que les indigènes se gouvernent selon leur propre corpus législatif n’a été mise en avant pour la première fois qu’à l’occasion du soulèvement de 1990. « C’est à partir de là que nous avons commencé à faire connaître ce droit coutumier dans les différentes écoles, universités, organisations indigènes, afin que tous les citoyens, et en particulier nos peuples, sachent clairement de quoi il s’agit. »
« Tout ce savoir ancestral existe depuis longtemps et continuera à exister. La première étape a été de le systématiser et de le traduire en termes juridiques. Un document final est maintenant disponible, qui a été élaboré durant une rencontre internationale avec la présence de juristes et avocats indigènes et de représentants de Colombie, du Guatemala, de Bolivie et d’Espagne. Ce document final, la proposition de Loi des peuples et nationalités, a été communiqué au Congrès national. », explique G. Talagua. La proposition a fait l’objet de vifs débats, certains représentants, notamment dans les partis de droite, étant opposés à la démarche.
Les peuples et nationalités d’Équateur ont travaillé ensemble, défendant en commun leur mode de pensée et leurs idéaux, pour avancer vers la reconnaissance et l’application de leurs propres lois dans les juridictions correspondant à leurs communautés et leurs territoires.
La Confédération des nationalités indigènes de l’Équateur (CONAIE), la Confédération des nationalités indigènes de l’Amazonie équatorienne (COFENIAE), Ecuador Runacunapac Riccharimuy (ECUARUNARI), et la Fédération équatorienne des organisations paysannes, indigènes et noires (FENOCIN), organisations indigènes nationales et régionales, sont les pièces maîtresses de cette proposition de loi.
Ces organisations ont fait connaître dans les communautés la teneur de cette Loi à travers les radios communautaires. Au niveau national, la diffusion de cette information a toutefois été beaucoup plus difficile, étant donné que les principaux moyens de communication d’envergure nationale appartiennent aux représentants du pouvoir économique de la Côte et de la Sierra.
« Avec cette Loi des nationalités et des peuples, nous recherchons une intégration dans les normes juridiques étatiques. Pour ce faire, cette Loi devait prendre en compte les aspects suivants : médecine ancestrale ; justice indigène ; réorganisation des circonscriptions territoriales ; langues ancestrales ; radios communautaires ; eaux ; exploitations minières. »
L’obstacle le plus important a été la discrimination et l’exploitation dont continuent à faire l’objet les peuples et nationalités indigènes de l’Équateur. Mais, paradoxalement, cela a constitué une motivation supplémentaire pour les indigènes de continuer à construire leurs propres chemins.
La Loi inclut les dispositions suivantes :
Dès lors que les 30 nationalités et 18 peuples de l’Équateur sont reconnus, ils figurent en tant que tels dans la Constitution politique de l’État. Ces peuples et nationalités sont, entre autres les Shuar, Achuwar, Sionas, Secoyas, Huaoranis, Otavalos, Natabuelas, Carankis, Chibuelos, Kichwas, Awa, Chachi, Zápara, Tsáchila. Ces peuples vivent dans un espace physique appelé territoire, où existent des ressources naturelles minérales, végétales et animales. Les grandes villes prennent ces ressources et boivent l’eau, souvent sans aucune forme de consentement de la part des peuples indigènes ; dans le cas de l’Amazonie, on y exploite de grandes quantités de pétrole et on y réalise des activités qui, d’un côté, détruisent la flore et la faune, et de l’autre, causent de graves préjudices aux populations locales. Pour faire face à ces problèmes, la Loi stipule une réorganisation territoriale incluant la gestion des ressources naturelles renouvelables et non renouvelables.
L’autogouvernement au sein des territoires.
La reconnaissance de l’autorité et de l’administration de la justice indigène.
À ce jour, des progrès ont été réalisés dans le processus de discussion de cette Loi au Congrès national. La Commission sur les questions indigènes a donné un avis favorable à la tenue d’une session plénière du Congrès pour mettre aux voix la proposition. On espère passer bientôt à une seconde discussion et poursuivre le dialogue, et finalement transmettre la proposition à l’exécutif pour validation finale.
Le mandat parlementaire de Gilberto Talagua est sur le point de s’achever. Il estime avoir travaillé autant que possible pour obtenir des améliorations dans les conditions de vie de son peuple, et il sait que cela ne marquera pas la fin de ses efforts. Il continuera à diriger la lutte au sein des organisations indigènes et se déclare persuadé que celui qui le remplacera arrivera avec des idées innovantes pour poursuivre le chemin tracé jusqu’à présent.
povos indígenas, direito consuetudinário, direito das minorias
, Equador
L’approbation de la Loi des nationalités et peuples de l’Équateur constituera un événement historique dans l’évolution des normes juridiques de l’Équateur et de toute l’Amérique latine. Il est fondamental que les sociétés intègrent la diversité de manière respectueuse, particulièrement en ce qui concerne l’application des normes juridiques. Le respect du droit coutumier des peuples et nationalités d’Amérique constitue l’un des propositions fondamentales qui ont émergé dans le cadre du premier soulèvement indigène, et elle a été traduite en projet de loi grâce à la participation de dirigeants indigènes dans les administrations locales et au Congrès national.
Fiche réalisée sur la base d’un entretien avec TALAGUA, Gilberto, actuel député du bloc Pachakutik, participant à la seconde Rencontre mondiale des peuples de montagne organisée à Quito du 17 au 22 septembre 2002. Pour plus d’information, contacter TALAGUA, Gilberto, Tel : (593)022900559, 099927801, ltalahua@yahoo.com.
Fiche originale en espagnol : Hacia el reconocimiento del derecho consuetudinario en Ecuador. Traduction : Olivier Petitjean.
Entrevista
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