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Mettre la coopération européenne au service des acteurs et des processus de développement

Coordenado por Pierre Calame, FPH

01 / 1999

Ce texte est une étape dans un processus de débat public appelé à nourrir la prochaine Convention de Lomé.

Il prolonge l’esprit de dialogue et le débat qui a précédé la rédaction du Livre Vert.

Le processus a été désiré par Michel Rocard, président de la Commission Coopération et Développement du Parlement Européen, approuvé et soutenu par la Commission Européenne, en particulier par le Commissaire Joao de Deus Pinheiro et les Directeurs généraux Philip Lowe (DGVIII) et Philippe Soubestre (SCR).

Cette implication conjointe de parlementaires européens et de la Commission Européenne dans un processus de débat public est en elle-même signe d’une volonté de dialogue.

Le processus comporte trois étapes : recueil d’avis et d’expériences ; séminaire de réflexion ; forum public de discussion. Le présent texte clôt la première étape et ouvre la seconde.

Le recueil d’avis et d’expériences s’est fait dans un délai très bref (un mois et demi) par deux moyens complémentaires : la remontée de « fiches de cas », réalisée selon la méthodologie rodée depuis plus de dix ans par le réseau DPH (Dialogues pour le Progrès de l’Humanité), a permis de recueillir une grande diversité de points de vue d’acteurs de base et d’experts ; l’écoute de 25 personnes de la Commission (DGVIII, SCR, Contrôle Financier), choisies pour leur diversité, leur engagement et leur capacité de distance à l’égard de leur activité quotidienne, a permis d’établir un panorama des analyses, des critiques et des propositions des fonctionnaires en charge pour le compte de l’Union Européenne de la mise en oeuvre de la Convention de Lomé.

Dans les deux cas, la liberté de ton était de mise, en dehors du cadre nécessairement contraignant de la négociation de la future Convention. En ce sens, loin de dupliquer la négociation en cours le processus peut contribuer à l’enrichir. Dans les deux cas également, la réceptivité de nos interlocuteurs à l’égard du processus mis en place a été remarquable.

Plus de deux cent fiches de cas ont été réalisées, la plupart riches en information, en points de vue et en propositions, au point que la sélection d’une quarantaine d’entre elles, pour illustrer sans le surcharger le présent rapport, s’est avérée ardue et arbitraire.

Les fonctionnaires de la Commission m’ont, de leur côté, réservé un accueil chaleureux et ouvert. Je craignais de légitimes réticences à l’égard d’une démarche qui s’ajoutait à d’innombrables évaluations, audits, réorganisations. Au contraire, sachant que leurs propos ne feraient l’objet d’aucune exploitation nominale, ils se sont exprimés avec la plus grande franchise.

Le fait le plus marquant est la convergence des conclusions de ces deux démarches dont l’une partait « de la base », des acteurs de terrain, et l’autre « du sommet », de Bruxelles. Cette convergence est porteuse de convictions et d’espérance.

Porteuse de convictions car elle donne du crédit aux critiques, souvent dures, formulées à l’encontre du fonctionnement actuel de la coopération européenne.

Porteuse d’espérance car elle révèle une représentation commune de la crise de la Coopération Européenne ce qui rend possible d’envisager une stratégie de changement.

On objectera à juste titre que le matériau réuni en si peu de temps comporte des lacunes immenses, par exemple l’absence de dialogue avec les représentants des pays ACP, avec le CLONG ou avec des parlementaires européens. Je ne prétends donc pas décrire une réalité sous toutes ses faces mais soumettre à débat un certain nombre d’idées forces.

La Fondation Charles Léopold Mayer, que je dirige, a accepté de cofinancer et de conduire ce processus de dialogue et de débat. C’est une fondation indépendante. Elle n’a dans l’affaire, ni intérêt économique (rien des cofinancements de l’Union Européenne ne lui revient), ni intérêt politique (ses ressources propres lui permettent de ne dépendre ni d’un Etat, ni d’une entreprise, ni d’une église). Mais elle y a une passion, celle d’enrichir les relations entre les peuples du monde.

Une petite équipe s’est constituée pour animer ce processus. Elle s’est donnée corps et âme à cette tâche, d’autant plus enthousiaste qu’elle recevait de ses interlocuteurs des manifestations vives d’intérêt.

Nous avons eu à coeur de tenir compte de toute la richesse d’information qui nous est parvenue au cours du mois et demi de cette première phase. Nous avons fait de notre mieux.

J’assume personnellement les propos qui vont suivre. Je n’ai retenu ici que l’essentiel, avec tout ce que cela implique de subjectivité.

Au contraire de ceux qui liront ce texte je n’étais pas, il y a peu, familier de la Coopération Européenne. J’étais de ceux pour qui FED et Budget, STABEX et SYSMIN, PIN et cogestion étaient les mots d’une langue étrangère. J’espère que cette vraie naïveté – qui n’exclura pas sans doute des contresens – sera utile comme est utile le regard ingénu pour ceux que la familiarité à leur objet prive des étonnements initiaux.

J’ai cru de mon devoir de m’exprimer sans retenue et sans les précautions d’écriture de mise dans les dialogues internationaux. Cela m’a paru un devoir d’amitié, d’autant plus vif que les dysfonctionnements sérieux de la coopération actuelle ne signifient en aucune façon que la qualité et les engagements de sa mise en oeuvre, à tous les niveaux sont en cause. Ce qui transparaît au contraire tant des fiches de cas que des entretiens c’est la grande motivation et la haute qualité des acteurs.

Mais, bien des systèmes globalement insatisfaisants sont mis en oeuvre par des personnes compétentes et motivées ; c’est alors le système lui même, l’articulation de ses différents rouages ou plus simplement encore la difficulté de la tâche à mener qui se trouvent en cause. C’est me semble-t-il le cas ici. C’est aussi ce qui justifie l’urgence d’une profonde réforme. Elle est annoncée dans le mandat de négociation de la Commission. Puisse le présent texte et le séminaire qu’il prépare y contribuer. C’est mon voeu le plus cher.

J’ai pris le risque et la responsabilité de formuler, à partir des fiches de cas et des entretiens, une proposition d’ensemble. Cette proposition dont les différents volets se complètent, paraîtra peut-être à certains trop ambitieuse, présomptueuse ou irréaliste. Je voudrais ma conviction que l’irréalisme serait au contraire, dans un domaine comme celui là, de procéder par petites touches successives : compte tenu de l’inertie propre de tout grand système, c’est le meilleur moyen d’être toujours en retard sur les réalités. Puisqu’il s’agit de fonder sur de nouvelles bases de la coopération entre l’Europe et les pays ACP pour les prochaines décennies, il est, après tout, plus prudent de regarder en avant qu’en arrière.

La proposition et son ambition reposent sur ce qui est devenu pour moi une évidence : l’intégration régionale et la construction de relations de coopération entre régions du monde de degré inégal de développement constitueront au prochain siècle deux piliers complémentaires d’une gestion démocratique et pacifique de la planète.

La Convention de Lomé a constitué à son origine une innovation féconde. Les relations entre l’Europe et les pays ACP doivent constituer dans l’avenir une référence majeure. C’est dire l’ambition qui doit présider à sa renégociation.

Pierre Calame, FPH

35 fiches

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