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dialogues, propositions, histoires pour une citoyenneté mondiale

La plume partagée

Des ateliers d’écriture pour adultes : expériences vécues

Jean Christophe LALLEMENT

03 / 1999

Dans les années trente apparaissent aux États-Unis les " creative writing workshop ", ancêtres des ateliers d’écriture contemporains, dont l’objet était de rompre avec l’écriture en tant qu’activité solitaire et promouvoir échange et partage au travers de l’activité littéraire. Ateliers donc, qui s’adressaient à une audience déjà rompue aux techniques de l’écrit et dont le souci était de les perfectionner. En 1984 le rapport Espérandieu sur l’illettrisme révèle que dix à vingt pour cent de la population adulte française est incapable, bien que sachant lire et écrire, de dégager le sens d’un écrit et, sans maîtrise des codes de l’écriture, se retrouve ainsi en marge de la société. Évidemment, dans bien des cas l’illettrisme s’accompagne de conditions de vie précaires. L’urgence de palier à cette rupture du lien social va transformer les ateliers d’écriture apparus en France dans les années soixante sous l’impulsion d’écrivains comme Raymond Queneau en vue de créer une écriture expérimentale. Car, concomitante au rapport Espérandieu, se dessine une politique de la ville qui tend à développer la citoyenneté et la démocratie participative. Ainsi le ministère du Travail officialise les ateliers d’écriture dans le cadre de la formation professionnelle continue.

Espace de réflexion et d’expression, l’atelier devient ainsi un outil d’éducation populaire qui, s’insérant dans un environnement social délimité, inscrit ses enjeux en terme de citoyenneté et de prise de parole. S’attachant davantage au fond qu’à la forme, il tend à rendre la dignité de la personne qui par sa volonté d’appréhender l’écrit veut exprimer une culture, une identité, un rapport au monde. L’atelier d’écriture naît souvent sous l’impulsion de travailleurs sociaux et s’organise autour d’animateurs parmi lesquels peuvent compter des écrivains, et avec qui les écrivants (ainsi nomme-t-on les participants)forment un groupe " lettrés-illettrés ". Les orientations pédagogiques des animateurs sont très variées car ce sont les écrivants qui s’emparent des savoir dont ils ont besoin alors que les formateurs se contentent d’orienter, d’accompagner et, dans une moindre mesure, de recadrer et reformuler le discours des écrivants. Fictions, écrits-témoignages, écrits individuels ou collectifs, la forme importe peu et seul compte d’encourager les écrivants d’acquérir la maîtrise voire le plaisir de l’écriture. Sont généralement mis en avant les travaux de lecture, de lecture croisée et de réécriture, de sorte qu’ils deviennent capables de communiquer un texte en se mettant à la place du lecteur, d’écrire en groupe pour apprendre un langage objectif. Il est par ailleurs important que ce travail aboutisse à la publication pour qu’au travers de la reconnaissance qu’elle implique, les écrivants puissent tirer de cette expérience une confiance retrouvée, une valorisation, une autonomie et une ouverture. Ainsi, l’atelier d’écriture permet de favoriser le lien social, de stimuler l’activité citoyenne et d’enrichir la vie communautaire aux niveaux local et régional.

Mots-clés

formation, littérature, alphabétisation


, France

Source

Livre

FAIRON, François, La plume partagée, Charles Léopold Mayer, 1998 (France)

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