Mise en place de mécanismes de redistribution
Une partie de la richesse prélevée par l’impôt et les prélèvements sociaux est redistribuée vers le secteur du logement afin d’aider la production, de faire baisser les coûts et de solvabiliser les ménages. Aujourd’hui la part de la richesse nationale consacrée à l’aide au logement (Etat et collectivités locales) se situe entre 1,6 et 1,8 % du PIB (Produit intérieur brut). Il s’agit du niveau le plus bas en France depuis 30 ans. Ces chiffres se situent dans la moyenne européenne mais il faut noter que des pays à réputation plus libérale et moins interventionniste comme l’Angleterre consacrent 2,5 % de leur PIB pour l’aide au logement.
Organisation du système financier
(Voir fiche Les circuits de financement du logement locatif social)
L’une des expériences originales et des caractéristiques les plus marquantes du système français de construction d’un important parc de logement locatif social est le rôle joué par la Caisse des dépôts et consignations (CDC) et le livret A. La CDC est un organisme financier qui dispose de garanties de l’Etat pour prêter de l’argent aux constructeurs de logements sociaux afin de les aider à produire des logements à des prix inférieurs à ceux du marché. Les fonds de la CDC s’appuient sur un produit d’épargne populaire - le livret A - que possèdent 15 millions de français. La somme de petits montants épargnés produit ainsi un stock très important d’argent. La taille de ce stock et la garantie apportée par l’Etat à la CDC permettent à cet organisme de prêter de l’argent à long terme et à des taux réduits, inférieurs à ceux pratiqués par les banques privées.
Organisation du cadre juridique
L’affirmation d’un droit au logement
L’accès à un logement et le maintien dans le logement sont, eux aussi, régulés par l’Etat au travers de l’organisation d’un cadre juridique. Ce cadre définit les rapports locatifs d’une part et les droits et devoirs liés à la propriété privée de l’autre. L’un des éléments clef de la construction de ce cadre juridique régulant l’accès au logement est la mise en œuvre d’un Droit au logement. (Voir fiche Le droit au logement). Il ne s’est affirmé que récemment dans l’ordre juridique français en s’orientant principalement autour de la question du logement des personnes défavorisées. Ce droit a pris corps au cours des années 90 voyant sa valeur juridique et ses répercussions pratiques augmentées.
Le droit au logement a tout d’abord été reconnu aux niveaux international (1) et européen (2) dans une série de textes dont la portée est restée limitée. En France, c’est la loi Besson en 1990 qui, pour la première fois, a affirmé le droit à un logement décent (3). Le Conseil constitutionnel, quant à lui, a affirmé en 1995 que la possibilité pour chacun de disposer d’un logement décent était un objectif de valeur constitutionnelle.
Enfin, en 2007, la loi sur le Droit au logement opposable (DALO) a instauré un mécanisme permettant à des personnes en difficultés, reconnues prioritaires pour l’attribution d’un logement social et qui ne se voient pas proposer de logement dans des délais raisonnables, de faire valoir leur droit au logement devant un juge. Le juge peut alors condamner l’Etat à payer une astreinte tant que ces personnes ne sont pas logées. Cette loi, dans son principe est une avancée indiscutable, mais son application reste encore incertaine. Le statut “prioritaire” est attribué selon des critères flous et son refus ne pourra que difficilement être contesté.
Malgré les faiblesses de la loi DALO, le cadre juridique du droit au logement semble s’affirmer. Cependant, bien que prenant sa source dans des textes au sommet de la hiérarchie des normes (traités internationaux), il reste considéré trop souvent comme un droit à valeur plus déclarative qu’opératoire qui obligerait l’autorité publique à une mise en œuvre de moyens plus qu’à des résultats concrets. Sa valeur reste de manière générale considérée comme inférieure à celle du droit de propriété.
Dans les faits, l’ensemble des politiques d’aide au logement participent à la mise en œuvre du droit au logement. Cependant, on considère souvent que l’effectivité réelle du Droit au logement se mesure par les possibilités d’accès au logement pour les personnes les plus démunies. Il en va ainsi des politiques destinées au logement des personnes défavorisées (logements d’insertion, foyers, travail spécifique de mise en cohérence des administrations) ainsi que de l’aménagement de la file d’attente de l’accès à un logement social (loi Dalo, réservation d’un certain nombre de places dans le logement social attribuées directement par les représentants de l’Etat). Mais l’objectif d’un logement pour tous reste loin d’être atteint du fait de la crise actuelle du logement (demande supérieure à l’offre à prix accessible) et des politiques de peuplement du logement social qui ne visent pas en priorité les personnes les plus démunies.
La création d’un secteur d’opérateurs privilégiés
L’aménagement d’un cadre juridique favorisant l’accès au logement passe également par la création d’un secteur d’opérateurs privilégiés de construction et de gestion de logements sociaux. (Voir fiche Les opérateurs du logement social)
Ces opérateurs du logement social – aussi appelés organismes HLM (habitation à loyer modéré) - sont depuis près d’un siècle les piliers de la politique du logement en France. Ils sont le fruit de l’initiative du patronat social et de la volonté des collectivités locales, double origine dont on trouve encore la trace aujourd’hui. Ces opérateurs produisent et gèrent des logements locatifs accessibles à une grande majorité de la population (construction neuve ou acquisition-réhabilitation), ils accompagnent éventuellement l’accession sociale à la propriété. Ces métiers ainsi que le principe de non lucrativité sont communs aux différentes “familles” d’opérateurs :
des établissements publics locaux (offices publics HLM – OPHLM – et les offices publics d’aménagement et de construction -OPAC) ;
des sociétés commerciales, entreprises sociales pour l’habitat (ESH), soumises, en très grande partie, aux mêmes règles que les offices HLM ;
des sociétés anonymes de crédit immobilier (SACI) et des sociétés coopératives d’HLM.
Il faut inclure par ailleurs des sociétés d’économie mixte (SEM) ainsi que les associations agréées. Les associations jouent un rôle déterminant, leur parc de logement est réduit mais elles accueillent les populations les plus fragiles que le parc social classique n’a pas été en mesure de loger.
Grâce aux aides de l’Etat, la France compte aujourd’hui 4,1 millions de logements locatifs sociaux et logements-foyers gérés par les organismes HLM. Ils représentent au total 16 % des résidences principales du pays et logent 10 millions de personnes. Au total, il existe plus de 820 organismes HLM.
Marqué jusqu’à présent par une grande stabilité, le paysage des opérateurs du logement social en France connaît aujourd’hui des évolutions notables qui devraient sérieusement le modifier : impact de la décentralisation, nouveaux modes de gouvernance interne, financiarisation…
Le prélèvement sur la masse salariale des entreprises
Les partenaires sociaux (entreprises, syndicats) ont également mis en place avec l’Etat un mécanisme de prélèvement sur la masse salariale des entreprises dans un système affecté au logement. Ils ont ainsi créé le secteur dit du “1 % Logement” en 1953. Il s’agissait d’accompagner la modernisation des entreprises et des conditions de logement de leurs salariés. Les entreprises de plus de 20 salariés reversent ainsi un pourcentage de leur masse salariale (0,45 % aujourd’hui) à des établissements financiers pilotés par les partenaires sociaux. L’objectif historique de ces organismes est le financement de la construction de logements sociaux réservés aux salariés des entreprises cotisantes.
Aujourd’hui ces fonctions se sont diversifiées vers des aides pour tous (aide au déménagement, garanties de loyers…) et surtout vers le financement de la politique de rénovation urbaine mise en œuvre dans les quartiers de logement sociaux construits depuis les années 60. Pour ce faire le “1 % Logement” finance l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, ANRU, organisme qui centralise les financements accordés aux mairies pour des projets de rénovation urbaine (démolitions de logements, reconstructions, réhabilitations, amélioration des espaces publics…). Enfin, depuis peu, les partenaires du “1 % logement” jouent également un rôle d’opérateur immobilier (construction de logements au prix du marché ou en accession sociale à la propriété). Cet opérateur, la Foncière logement, a pour objectif de générer un patrimoine immobilier qui financera à termes les caisses de retraite des salariés.
On peut donc noter que si ce système de taxe servait hier à produire des logements en dessous du prix du marché pour les salariés, il est utilisé aujourd’hui pour produire des logements au prix du marché qui participent aux dynamiques de spéculation et d’enchérissement des prix.
Formes d’aides mises en œuvre
Les deux volets de l’action publique en faveur du logement sont les aides publiques, via l’intervention économique directe, et l’action réglementaire qui organise et régule le marché du logement.
L’intervention économique directe
La mise en œuvre des politiques publiques du logement en France a donné lieu, principalement depuis les années 50, à l’instauration d’un système d’aides orientées vers la construction, la réhabilitation, et l’aide au paiement du loyer et à l’accès à la propriété. Les objectifs de ces aides sont de permettre l’accès au logement au plus grand nombre, au-delà de l’offre du marché privé, et de soutenir par ailleurs le secteur du bâtiment, élément clef de l’économie nationale. (Voir fiche Les aides publiques au logement)
Les aides au logement sont remises en question de manière récurrente quant à leur efficacité réelle en terme d’accès au logement pour les plus fragiles, leurs supposés effets inflationnistes et leur manque de contrepartie sociale.
Les aides aux producteurs de logements (les constructeurs, propriétaires…) ont vocation à favoriser les flux d’achat et de vente dans le logement et de soutenir le secteur de la construction.
Les aides à la pierre, versées directement aux producteurs, sont principalement dirigées vers le logement locatif social. Elles sont liées à l’attribution des avantages de taux par la Caisse des dépôts et consignations. Une fraction de ces subventions a pour objet le logement privé. L’Agence nationale pour l’habitat (ANAH) verse des subventions aux propriétaires occupants ou bailleurs en vue d’opérations de réhabilitation.
Les avantages de taux, c’est-à-dire les prêts de la Caisse des dépôts et le prêt à taux zéro, sont de plus en plus utilisés. Ils s’établissent à 1,8 milliards d’euros (2005). Néanmoins, la proportion de ces aides en direction du logement locatif social diminue au profit des aides en direction des ménages pour l’accès à la propriété (Prêt à taux zéro).
Les aides fiscales ont également vu leurs montants et leurs circuits démultipliés, jusqu’à devenir aujourd’hui la plus importante aide aux producteurs. Les avantages fiscaux sont évalués à 7 milliards d’euros, la TVA à 5,5 % (au lieu de 19,6 %) sur les travaux et la construction représentant environ la moitié de ce montant. Les autres aides fiscales se répartissent entre des mesures en faveur des propriétaires occupants ou bailleurs réalisant des travaux et des aides à l’investissement locatif (dispositifs Robien, Borloo etc.). Ces dispositifs de défiscalisation pour l’achat d’un logement en vue de sa location sont un soutien au marché locatif et au secteur du bâtiment. Mais leur utilité urbaine et sociale est fortement contestée car malgré l’argent public investi pour leur construction, les logements produits n’ont pas de vocation sociale. En effet, la contrepartie exigée en échange de l’aide publique est un plafond de loyer en fait à peu près équivalent au prix du marché. Enfin, l’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (à la charge des collectivités locales) est un autre type d’aide fiscal qui permet d’abaisser les prix du foncier dans une opération de construction de logement locatif social.
Les aides aux consommateurs de logement (locataires) ont explosé à partir de 1977 lors de la “réforme Barre” qui a marqué le passage des aides à la pierre (aide à la construction) aux aides à la personne. Il s’agissait alors de sortir d’une vision keynésianiste d’intervention de l’Etat et d’assurer la vocation sociale du système en centrant les aides sur les individus. Cette recherche de la solvabilisation des ménages avait également vocation à soutenir la consommation. La combinaison, dans les années 80 et 90, de difficultés économiques croissantes, de l’augmentation des prix sur le marché du logement et de la généralisation des aides à la personne a entraîné l’explosion de ces dépenses publiques.
L’aide à la personne se répartit principalement entre l’Aide personnalisée au logement, APL, dans le logement locatif social et les aides au logement, AL, (aides au logement social et aides au logement familial) qui ont pris de l’ampleur, jusqu’à se stabiliser, en termes de bénéficiaires et non de montants, au début des années 1990. L’extension des aides à la personne a conduit au triplement du montant des aides versées depuis 1984. Aujourd’hui, les aides à la personne bénéficient à 6 millions de ménages, dont une grande majorité de locataires.
L’inflation de ces aides a conduit à des arbitrages défavorables aux ménages. Pour éviter un accroissement trop important de la dépense en aides à la personne, les pouvoirs publics ont multiplié les mesures qui limitent les potentiels bénéficiaires des aides : absence d’actualisation des barèmes, participation minimale forfaitaire augmentée etc. Ces mesures restrictives ne permettent pas de compenser l’augmentation du taux d’effort des ménages entraînée par la hausse des loyers et des coûts d’acquisition de logement. La solvabilisation des ménages pour le soutien à la consommation, objectif premier des aides personnelles, a donc laissé la place à des aides personnelles qui peinent à corriger les effets des hausses successives.
La régulation et l’organisation du marché du logement
En France, l’action réglementaire des pouvoirs publics s’inscrit principalement autour de deux éléments (4) : la régulation des rapports locatifs d’une part et la mise en œuvre de politiques foncières de l’autre.
La régulation des rapports locatifs consiste à établir un arbitrage et chercher un point d’équilibre entre les droits et devoirs des propriétaires et des locataires. Dans le logement social le locataire possède une protection assez importante (droit au maintien dans les lieux) qui ne le met pas à l’abri de l’expulsion en cas d’impayés. L’équilibre n’est pas le même dans le secteur locatif privé où la législation est très importante car elle a une forte influence sur : l’investissement locatif, la protection contre le risque de perdre son logement, le rapport global entre le parc locatif (fluide et plus accessible aux ménages jeunes ou en difficultés) et l’accès à la propriété.
La loi de 1989, actuellement en vigueur, fixe la durée minimum du bail à 3 ans renouvelée tacitement. Le propriétaire ne peut donner congé, en avisant le locataire au moins six mois à l’avance, que dans les cas suivants :
reprise du logement pour l’occuper lui-même ou sa famille,
vente du logement (dans ce cas, le locataire dispose d’un droit de préemption pendant deux mois)
inexécution par le locataire de l’une des obligations lui incombant.
Le montant des loyers est librement fixé, mais une fois que le bail signé il ne peut augmenter que dans la limite d’un indice national. Une question majeure de l’équilibre propriétaire / locataire, au-delà de celle de la fixation des loyers, est la conséquence de l’impayé et les risques d’expulsion pour le locataire. La procédure d’expulsion est très encadrée en France, protégeant en partie le locataire entre le prononcé de l’expulsion et sa réalisation effective. Cependant, le contentieux locatif et le nombre d’expulsions prononcées n’ont cessé d’augmenter ces dernières années.
Aujourd’hui, les associations de propriétaires plaident pour une libéralisation du marché locatif (sur les prix et les possibilités d’expulsion immédiate) qui améliorerait sa fluidité, tandis que les mouvements de locataires demandent un renforcement du contrôle des loyers et l’interdiction des expulsions sans relogement.
La régulation des marchés fonciers, principalement aux mains des collectivités locales, vise à maîtriser l’urbanisation du territoire et à produire du foncier à coût accessible.
(Voir fiche Les politiques foncières locales en France)
Les politiques foncières en France ont été marquées par une évolution très forte : la rupture issue des profondes réformes de la décentralisation menées à partir du début des années 1980. La structure institutionnelle qui en résulte, en particulier le poids déterminant des municipalités, y joue un rôle essentiel. Pour mener les politiques de maîtrise foncière les collectivités publiques disposent en France d’une très large gamme d’outils leur permettant notamment d’intervenir directement sur les marchés fonciers. Mais la fragmentation institutionnelle et la globalisation des marchés peuvent rendre délicate la conduite des politiques foncières locales.
Les communes possèdent le pouvoir le plus important en matière d’urbanisme et de politique foncière, celui de préparer et d’approuver les plans locaux d’urbanisme (PLU). C’est le principal document d’urbanisme, opposable aux tiers, qui précise ce qu’on peut faire sur chaque parcelle du territoire, quel type de bâtiment on peut construire, quels sont les espaces protégés etc. Lorsqu’une commune a approuvé son PLU, elle a la responsabilité de délivrer (ou de refuser) le permis de construire. C’est bien sûr une étape clé dans la politique locale. Mais en plus du Plan local d’urbanisme (PLU), les collectivités locales disposent d’un certain nombre d’outils pour intervenir directement sur les marchés fonciers :
Une commune peut intervenir comme n’importe quel autre acheteur ou vendeur sur le marché foncier pour acheter à l’amiable un terrain ou un bâtiment. La commune est alors simplement soumise aux règles du droit privé, et le bien acheté fera partie du domaine privé de la commune ;
La deuxième façon pour une commune d’acheter un terrain ou un bâtiment est de recourir à l’expropriation, c’est-à-dire obliger le propriétaire à lui vendre son terrain, moyennant bien sûr le versement du “juste” prix défini le cas échéant par le juge. Cette procédure est une limitation du droit de propriété, elle ne peut se mener que dans un but d’intérêt général, et elle est légalement très encadrée ;
Il existe enfin une troisième façon d’acheter un terrain pour une collectivité publique, largement utilisée en France, c’est le droit de préemption, c’est à dire le droit pour le bénéficiaire, souvent la commune, de se substituer à l’acquéreur lorsqu’un propriétaire déclare son intention de vendre son bien, terrain ou logement. Ce droit de préemption ne peut être utilisé que pour un motif d’intérêt général, par exemple la construction de logements sociaux ou d’un équipement collectif. En cas de désaccord sur le prix, le propriétaire peut retirer son offre, faire une contre-proposition ou aller éventuellement, en cas de désaccord persistant, jusqu’au juge de l’expropriation.
Il faut noter que dans la pratique, beaucoup de communes n’ont pas véritablement de politique foncière active, et que leur politique d’urbanisme se limite principalement à la réglementation de l’urbanisme et à la délivrance des autorisations (de construire, de lotir, de démolir…).
Nouvelle crise du logement
On parle à nouveau, depuis la fin des années 90, de crise du logement en France. Cette crise est le fruit d’une double insuffisance, de la production de logement et de la solvabilisation des ménages. Elle se traduit par une pénurie de logement et un décalage entre l’offre et la demande sur le marché de l’immobilier. Ses conséquences sont multiples (Voir fiches Crise des quartiers, Crise du logement et L’habitat tiers : entre mal logement et parc social de fait) :
Difficulté d’accès à un logement décent et abordable pour un nombre croissant de personne et plus seulement les plus pauvres ou les personnes subissant des discriminations (surpopulation, décohabitation impossible, hébergements forcés chez des tiers) ;
Persistance des situations de mal logement ou de non-logement ;
Menace d’expulsions et nombre croissant de ménages expulsés chaque année de leurs logements ;
Augmentation des taux d’effort liés au logement (pourcentage du revenu consacré au logement) qui pénalise tous les ménages et fragilise les classes moyennes.
Dès la fin des années 70, l’Etat a commencé à abandonner les mécanismes régulateurs qui lui permettaient de tempérer les tendances spéculatives du marché. La diminution de l’aide à la pierre a eu pour contrepartie une augmentation du coût du logement pour les ménages et une explosion des dépenses publiques au travers du système d’aide à la personne. En outre, même si les dépenses publiques ont fortement augmenté, les aides personnelles au logement ont perdu leur pouvoir solvabilisateur en raison de l’importante hausse des loyers. La production de logements accessibles a été insuffisante du fait de la baisse des aides à la pierre et de l’augmentation des prix du foncier mais aussi du manque d’anticipation de l’augmentation du nombre de ménages (ménages de plus en plus petits). Ainsi, la crise s’alimente de l’insuffisance de la production de logements sociaux mais elle est aussi la conséquence directe d’une politique qui favorise essentiellement les mécanismes spéculatifs de marché (en particulier le développement de certains mécanismes d’aide fiscale sans contrepartie sociale). Ainsi, malgré des niveaux de construction neuve très élevés, la crise demeure car cette offre nouvelle de logement est en décalage avec la demande réelle (les 2/3 des logements neufs construits ne sont accessibles qu’à 1/3 de la population selon la fondation Abbé Pierre).
Ces processus de retrait des instruments de régulation du marché se prolongent aujourd’hui avec la financiarisation du logement social. Les organismes HLM obéissent de manière croissante à des logiques financières de gestion. La politique de logement menée ces dernières années est fondée sur une relance par les mécanismes de marché et une forme de privatisation rampante des outils de financement (le Livret A notamment dont la distribution doit être libéralisée sous la pression de l’Union Européenne) et de la gestion des organismes HLM. Ainsi, la réforme des statuts des sociétés HLM donne désormais le pouvoir aux actionnaires, et les pouvoirs publics montre une volonté de plus en plus marquée de vente du patrimoine locatif. Tout cela accentue la marchandisation du logement social.
La tension permanente sur le marché de l’immobilier fait des ménages les moins solvables les premières victimes de la crise et a incité les associations et les mouvements sociaux actifs dans le domaine du logement à développer des revendications et modes d’actions divers (voir fiche Mouvements sociaux urbains et luttes du logement). Les luttes menées par les mal-logés et les sans-abri, les revendications des habitants contre la démolition de logements sociaux non vétustes ont joué dans l’affirmation progressive d’un Droit au logement qui se doit d’être effectif. C’est sous cet angle du droit et des ressources publiques à affecter au logement que doit se résoudre la crise actuelle du logement.
AITEC, septembre 2007
AITEC (Association internationale de techniciens, experts et chercheurs) - 21 ter rue Voltaire, 75011 Paris, FRANCE - Tél : 01 43 71 22 22 - France - aitec.reseau-ipam.org - aitec (@) reseau-ipam.org