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L’évolution des structures locales face au système d’aide et conseils aux bailleurs (Thiès, Sénégal)

Joséphine NDIONE, Benoît LECOMTE

04 / 1998

Joséphine Ndione, Secrétaire Générale du GRAIF (Groupe de Recherche et d’Appui aux Initiatives Féminines) :

1/ La nécessité d’une "organisation papier".

"Je pense que l’aide a changé beaucoup de choses dans la manière de s’organiser au village, surtout dans l’organisation traditionnelle. Avant, les gens travaillaient beaucoup ensemble, en s’entraidant de manière informelle. Or actuellement, on est obligé de s’organiser d’une manière formelle, en GIE (Groupement d’Intérêt Economique) ou en associations ou en groupements reconnus avec des règlements intérieurs fixés et rédigés. Avant, les villageois travaillaient sur la base de la confiance mutuelle. Or, maintenant tout est rémunéré, tout demande "de l’achat". Les femmes ont suivi ce mouvement généré par les aides financières. La structuration est devenue beaucoup plus formelle et on les voit organiser des GIE avec des papiers et monter des associations reconnues d’une manière à peu près organisée.

Dans certains cas, des associations sont organisées d’une manière assez solide et ne sont pas conditionnées seulement par l’aide. On en voit d’autres qui sont organisées uniquement parce qu’on a besoin d’accéder à l’aide et qu’il faut s’organiser de telle manière pour cela".

2/Accès direct des organisations paysannes à l’aide extérieure.

"Actuellement, on peut dire qu’il est encore tôt pour que les groupements de femmes puissent avoir directement accès aux bailleurs sans intermédiaire, mais cela dépend des groupes avec qui on a affaire. Certaines des associations féminines qu’on a accompagnées pendant 5, 6, 7 ans sont assez forts, je pense, pour pouvoir accéder directement aux bailleurs. Par contre, les nouvelles associations qu’on vient tout juste de commencer à appuyer, je pense que c’est encore trop tôt pour elles de commencer à négocier avec les bailleurs, que ce n’est pas une question facile. Même nous, en tant qu’ONG, pour négocier les programmes nous avons des difficultés ! Il n’est pas exclu qu’un jour, les femmes des groupements puissent arriver à le faire elles-mêmes. Pour cela, il faut qu’elles soient alphabétisées, qu’elles sachent bien lire, bien écrire, qu’elles sachent identifier leurs besoins, qu’elles sachent capitaliser leurs ressources et faire des programmes pour les négocier avec des bailleurs. A long terme, cela pourra être joué par certains groupes de femmes plus dynamiques que d’autres.

Certaines ONG considèrent que c’est un risque pour leur survie. Car si les femmes ou les paysans sont capables de négocier leurs propres programmes, on peut se demander quelle sera alors leur utilité, leur raison d’être. Pour d’autres, cela ne doit pas être considéré comme un risque. Car, si on a l’objectif d’appuyer le paysan(ne)s et d’aboutir à ce qu’un jour ces personnes puissent arriver à négocier et à mener leur vie comme elles l’entendent, le succès de l’ONG est qu’elles ne soient pas dirigées par d’autres qu’elles-mêmes. La réussite de l’ONG, cela voudra aussi dire qu’elle va disparaître".

3/ Conseils aux bailleurs.

a) "Les partenaires, c’est comme des marchands : ils ont une marchandise à vendre et nous sommes des personnes qui ont besoin de cette marchandise. Dans ces relations d’offre et de demande, si on pouvait permettre aux deux partenaires de vraiment se connaître, ce serait une bonne chose. Car tant qu’on ne connaît pas les actions, qu’on lit un papier simplement, cela ne dit rien. Mais si on rencontre les gens et qu’on vient sur le terrain, on se rend compte de la réalité et on devient beaucoup plus sensible à la réalité. C’est important pour eux comme pour nous.

b) Le bailleur, lui, a ses préoccupations, il a sa philosophie, son cadre de travail ; la population, elle, a ses besoins, ses problèmes qu’elle vit quotidiennement et son souhait est d’arriver à ce qu’on puisse trouver des solutions à ses problèmes. Je constate que les préoccupations des populations ne sont pas forcément les mêmes que celles des bailleurs. Alors comment arriver à ce que les bailleurs fassent beaucoup plus attention aux besoins et aux problèmes des populations ? Le bailleur qui reçoit un document ou bien qui descend dans un village, devrait combiner ses préoccupations et les préoccupations des villages.

c) Des bailleurs qui ont fait quelque chose, qu’ils fassent donc un suivi pour se rendre compte réellement des résultats et pour, au besoin, voir la continuité de l’action sur le terrain. Chaque fois qu’il y a un suivi, on se rend compte des erreurs, de la progression, de la capacité d’organisation. S’il y a des choses qui traînent, qui patinent, on peut dire: "Ah, depuis l’année dernière on a constaté ça, il n’y a pas eu d’amélioration. Qu’est-ce qui ne va pas ? Est-ce qu’on peut améliorer cela ensemble, vous et nous ?"

Palavras-chave

cultura tradicional, desenvolvimento local, agência de fundos, alfabetização, avaliação


, Senegal, Thies

Comentários

Le système d’aide diffuse, sinon impose, ses formes d’organisation moins centrées sur l’entraide sociale et plus sur l’argent, moins informelles aussi. Dans certains groupements villageois, les femmes sont désormais suffisamment alphabétisées pour négocier directement avec les organismes locaux d’aide. Ces derniers gagneraient à mieux connaître leurs interlocuteurs, à ne pas s’en tenir à leurs seules préoccupations et à venir sur le terrain suivre et analyser avec les acteurs locaux ce qui se vit. On pourrait ainsi faire avancer les partenariats, conclut cette responsable pleine d’humour.

Notas

Voir aussi les interviews de J. NDIONE, fiches DPH n° : 5.228; 5.229; 5.230; 5.236.

Entretien avec NDIONE, Joséphine, réalisé à Thiès en décembre 1998.

Fonte

Entrevista

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