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Mobilisation citoyenne au service du droit au logement

Regards d’ailleurs

Clémentine METIER

12 / 2010

Solidarités Nouvelles est une association belge, créée en 1973 pour répondre à des questions sur les logements sociaux. Son champ d’action s’est peu à peu élargi et elle a aujourd’hui comme principal objectif d’appuyer les personnes pour qu’elles fassent valoir leurs droits en matière de logement.

Les mouvements du Droit au Logement

L’association promeut aujourd’hui le droit au logement grâce à différents moyens d’action. Parmi ceux-ci, les mouvements du Droit au Logement (DAL) se sont développés progressivement depuis 15 ans à Charleroi, Liège et Mons. Initiés et animés par l’association Solidarités Nouvelles, les groupes du DAL réunissent des personnes autour des problèmes liés au logement : expulsions pour insalubrité, manque de logements sociaux, sans-abris, etc.

Ces collectifs étaient initialement désignés « Groupes d’action droit au logement » (GADL), mais cette appellation a été changée en 2009 afin de souligner l’unicité des mouvements de lutte pour le droit au logement. En particulier, Solidarités Nouvelles s’efforce de structurer le mouvement de manière régionale en développant le DAL à Charleroi, siège de l’association, mais aussi à Mons et Liège.

Interpellation et sensibilisation autour du droit au logement

L’objectif premier du DAL est de créer les conditions favorables à la mobilisation autour du droit au logement. Deux perspectives concomitantes se distinguent : susciter la mobilisation ou répondre à un besoin exprimé. Bien que relativement débattue en interne, une autre démarche consiste à élaborer une stratégie pour obtenir des résultats concrets qui inciteraient une mobilisation accrue : en percevant l’efficacité immédiate de leur action, les militants sont plus enclins à se mobiliser à long terme. Le DAL cherche à obtenir notamment une législation claire sur les loyers. Parmi les étapes nécessaires pour remplir un tel objectif, le DAL réclame la réglementation des garanties locatives, lesquelles forment actuellement un frein à l’accès au logement. En effet, leur montant diffère selon que le locataire peut ou non payer immédiatement. Confronté à cette injustice, le DAL milite notamment pour la création d’un fonds de solidarité permettant aux locataires les plus précaires de s’acquitter de leur caution. De la même façon, le combat contre les expulsions illégales participe de l’effort pour l’obtention de règles équitables et le respect du droit vis-à-vis des locataires les plus précarisés.

Développement d’une dynamique collective

L’action collective est utilisée comme moteur de l’action en réponse aux injustices qui naissent à l’échelle individuelle. Face à des situations particulières dans lesquelles la revendication est affaiblie, le DAL ouvre la possibilité d’une réplique de groupe qui accroît l’efficacité de l’action et autorise l’amélioration des conditions de vie.

La définition du collectif est toutefois source de questionnements, notamment par rapport aux liens entre Solidarités Nouvelles et le DAL. Dans l’esprit des militants, le DAL est un mouvement indépendant et local. La taille relativement réduite des groupes du DAL offre aux militants un pouvoir réel et leur offre le sentiment d’être écoutés et d’être porteur de responsabilités. Cependant, le DAL participe de Solidarités Nouvelles et du Service d’Insertion Sociale (SIS). Les causes défendues sont communes et le rassemblement permet d’augmenter l’efficacité des revendications. Deux types de solidarités peuvent être identifiés : la solidarité large rapproche différents partenaires autour d’une même cause, tandis que la solidarité étroite existe au sein du DAL et avec Solidarités Nouvelles.

En conséquence, cette dynamique collective s’exerce à la fois en interne et en externe. D’une part, le DAL lui-même n’existe qu’à travers le collectif. Il solidarise des bénévoles autour de situations concrètes d’injustice et d’illégalité à partir desquelles sont envisagées l’expression collective et la mobilisation. Toutefois, le DAL ne constitue pas un mouvement de masse, ce qui exige une créativité en termes de modalités d’action. Depuis sa fondation, Solidarités Nouvelles s’inspire de la mouvance syndicale historique, posture souvent débattue en interne. Ce choix se retrouve au sein du DAL dans la mesure où ce dernier s’appuie en partie sur des personnes qui ont un passé militant actif. Ce bagage permet de souder le groupe et de l’enrichir par une diversité de propositions d’actions.

D’autre part, la dynamique collective s’exprime dans l’effort effectué en direction d’autres organisations. Le DAL de Charleroi agit notamment en collaboration avec les équipes populaires, tandis qu’un juriste de la Ligue des Droits de l’homme prend régulièrement part aux réunions du DAL de Liège. Une telle démarche permet d’élargir l’impact et la légitimité des actions menées. Inspiré du mouvement du DAL français, le Ministère de la crise du logement a ainsi associé plusieurs structures de la société civile afin d’interpeller les pouvoirs publics sur le logement. De la même façon, les militants du DAL ont manifesté à plusieurs reprises leur soutien aux habitants des campings et parcs résidentiels menacés d’expropriation et d’expulsion.

Valorisation et développement des pratiques citoyennes

A travers l’action collective, le DAL contribue à rendre les militants citoyens actifs et critiques. Ce positionnement est d’ailleurs lié aux objectifs énoncés par la Communauté Française de Belgique dans son Décret Education Permanente dans le cadre de son soutien financier à Solidarités Nouvelles. D’une position subie, les personnes se saisissent de l’injustice vécue pour devenir actrices du droit. La prise de conscience collective des enjeux permet aux individus de participer à leur évolution. La mobilisation d’un réseau de militants s’effectue notamment parmi les personnes aidées par Solidarités Nouvelles, comme les locataires ou les personnes soutenues lors d’une expulsion. Cet investissement citoyen a des répercutions sur l’auto-estime et la dignité des militants qui confient se sentir plus forts, plus confiants et moins isolés. L’action militant est en effet source de lien social. En outre, les participants développent des compétences et des ressources qu’ils ne soupçonnaient pas : connaître leurs droits, s’exprimer en public, devenir des acteurs écoutés et entendus. En ce sens, la participation active de chacun, même ponctuelle, est largement incitée et valorisée. On peut alors parler d’« empowerment » ou de « capacitation citoyenne ».

En définitive, le DAL permet une appropriation collective du droit par les militants qui, ainsi, (re)trouvent un statut de citoyen actif et critique qui vise le changement social.

Juristes Solidarités - Espace Comme vous Emoi, 5 rue de la Révolution, 93100 Montreuil, FRANCE - Tél. : 33 (0)1 48 51 39 91 - Franca - www.agirledroit.org/fr - jur-sol (@) globenet.org

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