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Stratégies populaires pour défendre son lieu de résidence : le cas de Dakar, Sénégal

Malick GAYE

1999

Contexte

Au cours de la dernière décennie, l’évolution des politiques urbaines dans les pays en développement a été fortement influencée par les modèles de développement économique libéraux, par la restauration ou la généralisation des mécanismes du marché et par le poids des politiques d’ajustement structurel.

Dans le domaine urbain, cette évolution a touché l’ensemble des secteurs : foncier et immobilier (accès au sol et au logement), équipements, services urbains. Elle s’est faite selon des modalités et des rythmes très divers selon les pays. Les problèmes de l’inégal accès au marché des différents acteurs ont eu tendance à s’aggraver avec, pour conséquence, une accentuation des phénomènes d’exclusion et de ségrégation.

Dakar, avec une population de deux millions d’habitants, qui croît chaque jour, avec un avenir incertain, se lit aussi comme un lieu de courants qui cheminent, d’initiatives, de bouillonnement, et de changement.

Le quartier dont il est question ici continue d’être appelé Rail/Ecopole parce qu’il est originellement un segment d’une des premières lignes ferroviaires intra-urbaines de l’Afrique de l’Ouest francophone. Quand cette ligne fût supprimée, l’emprise jadis occupée par cette dernière devint un dépotoir de ferraille et de déchets de toutes sortes quoique la zone fût immatriculée par les services cadastraux et des domaines…

Le projet Rail/Ecopole initié par Enda T. M a pour objectif :

– de régulariser le statut foncier de la zone,

– de restructurer le quartier spontané Rail récemment rebaptisé « Khadim Rassoul » situé non loin du centre historique de Dakar, capitale du Sénégal.

Le quartier étant devenu un entrepôt de ferrailles et d’ordures foisonnantes, il a suscité la convoitise des migrants ruraux en quête d’un habitat proche de leur lieu de travail.

Les occupants édifièrent des constructions précaires, au sein desquelles se développent des activités d’économie populaire génératrices de revenus. Un nombre de plus en plus important de personnes vivent, ou plus exactement survivent, grâce à cette économie informelle.

On trouve dans le quartier diverses activités productives telles que les gargotières, les lavandières, les brocanteurs, les tapissiers, les menuisiers, les peintres, les vanniers, les fondeurs, les forgerons, les réparateurs de crick, les menuisiers métalliques, les vendeurs de café, les réparateurs de radio transistors, les animateurs d’un émetteur FM, etc. qui sont en évolution dans « Khadim Rassoul ». En matière de logement, une partie importante des citadins des pays en développement vit en situation irrégulière.

Des familles implantées depuis longtemps dans le quartier, une fois les angoisses foncières dépassées, souhaiteraient faire évoluer rapidement leur habitat, et certaines d’entre elles ont quelque capacité à épargner.

Enfin, pour pratiquement toute la population, les besoins d’aménagement physique se concentrent sur un accès à une eau potable peu coûteuse et un système d’assainissement adéquat et à faible coût. En effet, le projet consiste à réaménager le terrain et affecter différents espaces :

– ordonner et améliorer les habitations,

– délimiter la zone relative à la réinstallation des garages, ateliers et autres lieux de travail et de restauration,

– tracer des voies privées permettant un accès facile au quartier.

Dans la recherche de la bonne gestion des problèmes d’assainissement, d’hygiène, de propreté, les populations, tout âge confondu se sont organisées pour accéder à un bon cadre de vie. De cette organisation, accompagnée d’actions déterminantes, le quartier Ex-Rail/Khadimou Rassoul jadis insalubre et haut-lieu d’insécurité a changé en bénéficiant d’un aménagement concerté avec des espaces collectifs et disposant d’eau courante, d’édicules publics et d’un poste de santé.

Description du processus

Jusqu’en 1995, le projet était à sa phase prospective et d’identification, en premier lieu le processus social est enclenché, des concertations permanentes sont amorcées. Le schéma d’ensemble résulte de concertations avec différents groupes de la population.

En début de l’année, les propriétaires de baraques qui n’habitent pas dans le quartier et qui mettaient leurs propriétés en location ont été persuadés de la fin de leurs droits illégaux. Chacun d’entre eux a été dédommagé de son investissement et, en conséquence, a cédé sa propriété.

À la demande de la population et avec elle, Enda TM propose, en rapport avec ses partenaires, de mettre fin au risque de déguerpissement (ainsi appelle-t-on l’expulsion à Dakar), d’appuyer les activités économiques, de maintenir la population sur place et de réaliser des installations d’intérêt commun, d’impulser un développement urbain, plus cohérent, plus équilibré, en procédant à un aménagement du terrain.

Les habitants et travailleurs de « Rail » vivant sous la menace du bulldozer, ce groupe vulnérable a établi un partenariat avec Enda T.M. Au fur et à mesure, l’assistance de Enda s’est diversifiée et s’est consolidée. La préoccupation conjointe de maintenir au coeur de la ville des activités d’économie populaire a conduit à une médiation institutionnelle qui a abouti à l’approbation par l’administration publique d’une convention en cession de bail d’une durée de 25 ans renouvelable. Les populations ont commencé à recevoir des documents qui attestent leur sécurité foncière qu’ils viennent d’obtenir, et qui lève la menace du bulldozer.

Il s’agit d’un réaménagement de terrain, pour plus d’équilibre et d’intégration au reste de la ville.

La répartition des parcelles et la gestion du terrain ne peut se faire que par les membres du groupement du quartier et les habitants de la zone.

Se connaissant tous, ils sauront, dès lors, mettre chacun à la bonne place, en tenant compte, bien sûr, des différents problèmes rencontrés. La consolidation des habitants et des artisans sur leurs lieux de travail ou leurs lieux d’habitation est primordiale. On a distingué déjà trois cas dans le processus de sécurisation foncière des occupations. Il s’agit :

– des droits de superficie accordées aux garagistes et aux parcelles d’habitation ;

– de l’attribution d’aire d’activités artisanales dans l’allée artisanale ;

– de la définition d’espaces communs et de servitude de passage.

Le quartier Khadim Rassoul « Ex-Rail » compte environ 1040 habitants, pauvres certes, mais actifs, avec une superficie de moins d’un hectare.

Malgré la pauvreté absolue qui règne et la hantise du bulldozer, ces habitants développent des stratégies et des moyens pour faire face à cette situation.

Les habitants (hommes et femmes), les associations sportives et culturelles des jeunes, les micros entreprises, les travailleuses et travailleurs, des personnes déléguées de l’administration, de la municipalité, d’Enda, etc., au sein de comités et d’inter-comités, luttent contre la pauvreté, pour l’emploi, pour l’avenir des jeunes filles et garçons, en initiant un ensemble d’activités de formation et de communication générant des effets multiplicateurs divers, à partir d’un point de convergence : une usine naguère désaffectée, aujourd’hui « recyclée » pour la circonstance par Enda.

Devenue l’écopole, elle se veut au service de l’économie populaire urbaine, et des jeunes producteurs et créateurs.

Le projet devient, en même temps qu’une restructuration de bidonville, un espace de créativité, de technologies combinées et de stimulation d’initiatives populaires.

La transformation de la « zone rail » prend, sa véritable dimension, même si les producteurs de l’économie populaire et Enda n’ont pas attendu, pour agir, que le projet soit finalisé.

Ces habitants du quartier bénéficient d’ores et déjà des activités de l’Ecopole, qui les soutient directement en mettant fin aux risques de déguerpissement, en appuyant leurs activités économiques, en réalisant des installations d’intérêt commun et en réaménageant le terrain, impulsant ainsi un développement urbain plus cohérent et plus équilibré.

Les protagonistes du changement et leur rôle

La production de l’habitat populaire, pris dans un sens large, peut être considéré comme un système dans lequel interviennent des acteurs en interaction permanente. On a différentes catégories d’acteurs : les habitants du quartier, les pouvoirs publics, l’ONG Enda T. M et la Caisse Française de Développement.

Les habitants

Comme la plupart des populations les plus démunies, les habitants étaient voués, jusqu’à présent, au déguerpissement à 30 km de Dakar, et à la perte de tous leurs liens commerciaux, réseaux sociaux proches, chances si limitées soient-elles de scolarisation, etc.

Artisans, recycleurs, garagistes, et jeunes travailleurs et travailleuses -lavandières et les employées de maison en majorité — oeuvrent déjà avec Enda pour la restructuration qu’appuie la Caisse Française de développement.

Les garagistes

Etant au nombre d’une vingtaine composée de 5 à 6 équipes de patrons et d’apprentis, les garagistes comprennent des mécaniciens, électriciens, tôliers, peintres, etc.. ; qui depuis peu, sont partis d’endroits différents et dispersés du quartier pour se rencontrer aujourd’hui sur une zone qui leur est définitivement affectée.

Les pouvoirs publics

Ici représentés par le Ministère de l’Urbanisme et de l’habitat. Il assure la mise en place de dispositifs institutionnels adéquats dans ce processus de régularisation foncière.

L’ong ENDA TM

Son rôle est essentiel dans la défense des intérêts fondamentaux des populations en situation irrégulière.

Sa fonction est importante comme intermédiaire entre les organisations entre les populations, les instances du pouvoir (central et local), les organisations internationales et les dispositifs de coopération bilatérale (conseil technique, recherche de financement, etc.).

La caisse française de développement

Elle est le partenaire financier de ce projet de restructuration.

Contribution financière des populations

Les habitations dans le quartier Rail sont dénombrées à 152 unités.

La participation à l’aménagement, à la restructuration et à l’amélioration de l’environnement des populations ont été proposée de la façon suivante :

– Pour une habitation occupée par une ménagère ou une employée à faible revenu, la contribution est de 1 500 francs CFA par mois.

Au cas où dans cette habitation, il y aurait un ou plusieurs enfants en scolarisation, la participation reviendrait à 1 000 francs CFA.

Une somme de 300 francs de la participation sera prélevée pour le FORREF (Fonds de Restructuration et de Régularisation Foncière). Ce fonds est mis dans une banque, pour servir à tout projet de restructuration.

– En ce qui concerne les garagistes et les artisans, la participation sera de 3 000 francs. Au cas où il y aurait plus de deux enfants travailleurs, la participation reviendrait à 2 500 francs CFA par mois. Une somme de 1 000 francs CFA de la participation sera prélevée pour le FORREF.

– Les entrepreneurs auront une participation de 6 000 francs CFA par mois. Une somme de 1 500 francs CFA de la participation sera prélevée pour le FORREF.

Le niveau international

L’équipe RUP (relais pour la participation au développement urbain) de Enda T. M est le point focal de HIC, Habitat International Coalition, pour l’Afrique Francophone.

ENDA a toujours oeuvré à côté de ces populations afin de les organiser, pour développer des stratégies pour les maintenir dans cette zone qui est le lieu de leurs activités économiques. Enda est aussi membre du comité de suivi de Habitat II.

De nouvelles orientations sont faites, en matière de politiques d’habitat par les pouvoirs publics c’est-à-dire l’accès des populations les plus démunies au logement. En matière de régularisation et de restructuration foncière, des efforts sont en cours.

ENDA RUP (ENDA Relais pour le développement urbain participé) - Rue Felix Eboué, BP 3370 Dakar, SENEGAL - Tél. : (221) 822 09 42 - Fax : (22) 823 51 57 - Senegal - rup.enda.sn/index_fr.html - rup (@) enda.sn

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