Kuntala LAHIRI DUTT, David J WILLIAMS
10 / 2001
Lorsque l’on aborde la question de l’éducation à l’environnement, il nous faut aussi considérer les lois qui traitent de l’environnement. Dans la plupart des pays, un ensemble de lois ou un cadre juridique existe déjà pour protéger le citoyen ordinaire et lui assurer un environnement propre. Ces lois vont de la santé publique à la sécurité et sont établies pour faire en sorte que les activités économiques des individus ou des usines/entreprises n’aient pas un effet néfaste sur le bien-être d’autres personnes. Dans certains pays, le ’droit de respirer’ de l’air pur est accepté constitutionnellement comme l’un des droits fondamentaux. Dans la Déclaration des Droits de l’Homme des Nations Unies, les droits d’un individu à la nourriture et au logement sous-entendent indirectement l’accès à un environnement propre et sain comme un droit de l’Humain pour les citoyens.
Cependant, dans certains pays, de telles lois sur l’environnement n’existent pas encore. Dans d’autres cas, les lois qui touchent à l’environnement existent par leur nom, mais dans la réalité elles ne sont presque jamais appliquées.
L’impact des lois de l’environnement sur l’Education à l’Environnement a une double facette.
Tout d’abord, il s’agit de mettre en application les lois là où elles existent et de les promulguer là où elles n’existent pas encore. Les éducateurs en environnement ont la responsabilité de soulever les questions qui se posent à partir de situations où développement économique et protection de l’environnement se font face. Dans beaucoup de pays démocratiques, la mise en vigueur ou en application de telles lois a été initiée avec plus ou moins de succès par des éducateurs en environnement et des ONG. Les éducateurs peuvent agir à travers les médias, et les médias peuvent eux-mêmes devenir des acteurs majeurs dans de tels contextes.
En fait, les éducateurs en environnement, en formant et en responsabilisant les citoyens, doivent en chercher les points faibles et les vides dans la structure juridique en vigueur et en même temps essayer de forger une opinion populaire qui permette de réviser les lois en question pour mieux les adapter aux situations les plus courantes.
Ensuite, il s’agit de faire en sorte que les citoyens soient informés et que ces lois soient appliquées afin que l’on puisse atteindre démocratiquement les objectifs environnementaux. Les Litiges d’Intérêt Public sont un des moyens qui permettent aux recours juridiques d’avoir un impact sur l’environnement. C’est le rôle des groupes de citoyens informés de mettre en place des lobbies forts et des groupes de pression pour influencer l’opinion publique et parfois susciter des actions politiques.
Le cas de la rivière Fly en Papouasie-Nouvelle-Guinée (PNG), est un bon exemple d’action juridique dans le domaine de l’environnement. Il montre à la fois comment ces situations peuvent être des occasions pour informer les citoyens et comment les citoyens qui sont informés peuvent avoir recours aux lois pour défendre leurs intérêts.
Des gisements importants de minerais ont été découverts dans les années 70 en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Ce pays, qui, pour la plupart de ses régions, sort à peine de l’âge de pierre, a souhaité ’se développer’ à travers l’exploitation de ses ressources. En 1980, le gouvernement de la Papouasie-Nouvelle-Guinée a autorisé un consortium, dirigé par une société minière australienne, BHP, à exploiter un gisement important de cuivre et d’or sur un terrain accidenté, à Ok Tedi. Le projet a été alors décrit par le Premier ministre de la Papouasie-Nouvelle-Guinée comme ’un pont d’or au bout de l’arc-en-ciel’. La production d’or a commencé en 1984 et celle de cuivre en 1987. Le concentré de cuivre était transporté dans des conditions très aléatoires par une canalisation de 180 km de long puis il était traité sur les rives de la rivière Fly, avant d’être transporté en péniche sur 850 km jusqu’à la côte.
Ils avaient largement sous-estimé la difficulté d’ouvrir une exploitation minière dans une région si éloignée, sur un terrain montagneux avec des activités sismiques et dans l’une des zones les plus humides du monde, et n’avaient pas pris en compte le coût majeur des pannes éventuelles. Le projet de construire un barrage pour retenir les déchets engendrés par le processus de concentration du minerai, stipulé lors de l’accord, a été abandonné après un glissement de terrain important qui a détruit le site de construction initial. Grâce à quelques combines et négociations politiques, il a finalement été autorisé de jeter de grandes quantités de déchets dans la rivière Ok Tedi puis dans la rivière Fly. On estime à plus de 50 000 tonnes par jour la quantité de déchets évacuée de cette manière pendant plusieurs années. Les déchets contenaient du cuivre (très toxique) et étaient aussi parfois chargés en grosses quantités de cyanure (utilisé pour le traitement des minerais), notamment une fois à la suite de la fuite d’un conteneur de cyanure pur.
Le niveau de la Rivière Fly s’est élevé de 5 à 10 mètres à cause des déchets et l’eau polluée s’est répandue sur des terres productives, qui se sont recouvertes d’une vase grise.
La société minière a nié l’importance des dégâts et a répondu que les quantités de cyanure étaient dans les limites autorisées, ce qui était vrai, à ceci près que ces limites avaient été portées à un niveau 10 fois supérieur à celui des normes tolérables pour l’environnement et que les contrôles avaient été effectués à 100 km du lieu d’évacuation des déchets!
En 1992 les villageois concernés ont déposé des plaintes lors du sommet de Rio et ont aussi pris contact avec un cabinet juridique australien, Slater and Gordon, pour entamer eux-mêmes une ’action unique en son genre’. BHP a nié toute responsabilité et a mis en avant les avantages économiques qu’ils avaient apportés aux personnes qui les mettaient en accusation. En 1994, l’affaire, pour laquelle on réclamait 2 milliards de dollars australiens de dommages et intérêts et la même somme de compensations, a été portée devant la Cour de cassation dans l’Etat de Victoria, en Australie. L’entreprise BHP, très ennuyée, s’en est finalement tirée en payant 150 millions de dollars australiens de compensations, en réhabilitant les terres affectées et en payant les frais juridiques (environ 8 millions de dollars australiens). Aussi le gouvernement de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, qui contrôlait 10 pour cent du consortium, s’est débarrassé de ses parts en les revendant à un trust.
Cet exemple montre bien à quel point le recours à des procédures juridiques (qui peut passer, si besoin, par des réformes des procédures elles-mêmes pour donner une chance aux plus démunis de se faire entendre dans un tribunal) peut sanctionner fortement des comportements qui portent atteinte à l’environnement. Dans le cas présent, une importante société minière fonctionnait grâce à un gouvernement complice et malgré une législation ferme sur les questions d’environnement dans son propre pays, et elle a été obligée par un groupe de citoyens informés de payer des compensations pour les dégâts causés sur l’environnement. De tels exemples montrent que le recours juridique peut être un instrument essentiel d’action pour l’environnement dans un contexte démocratique.
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, , Papouasie Nouvelle-Guinée
Texte original
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