12 / 1994
AWAM (All Women’s Action Society, Société pour l’action des femmes)est une organisation pour la défense des droits de la femme, qui a été officiellement mise en place en Malaisie en 1988, mais dont l’activité est en fait plus ancienne : en 1985-86, elle participait déjà aux campagnes contre la violence envers les femmes.
AWAM s’est fixé un double objectif :
* dans un premier temps, elle cherche à lutter contre les violences domestiques, le viol, le harcèlement sexuel qui touchent un grand nombre de femmes en Malaisie quelle que soit leur condition sociale
* dans un deuxième temps, et à plus long terme, elle oeuvre en faveur d’une transformation non seulement de la loi mais aussi de la société. Seul un changement des mentalités peut permettre de concevoir le droit différemment de façon significative. En effet, le droit n’étant que le reflet d’une logique et des valeurs d’une société, son évolution, pour être effective, ne peut être que déduite d’une modification des valeurs de la société, modification qui passe par l’abandon de certaines représentations, telle celle qui considère que "la place de la femme est à la maison".
Pour atteindre son premier objectif, AWAM a agi essentiellement par un travail de sensibilisation auprès des femmes. Ainsi, elle a organisé diverses campagnes, notamment celles contre le viol entre 1986 et 1989. Elle entend donner aux femmes la connaissance de leurs droits : leur permettre de prendre seules leurs décisions. Pour ce faire, elle dispense des formations aux éléments de base du droit national et local à son personnel qui est ainsi à même de répondre aux besoins des femmes en matière juridique. Elle diffuse également par des publications l’information issue de la capitalisation d’expériences et fait des interventions publiques.
Les groupes cibles d’AWAM sont issus des classes moyennes. En ce qui concerne la population de plus faible condition sociale, AWAM s’appuie sur des réseaux locaux tels que "Friends of Women" (Thaïlande)ainsi que sur des organisations de travailleurs.
AWAM agit aussi en amont de la sensibilisation en faisant pression sur les parlementaires. Sa dernière réussite est d’avoir contribué à l’adoption d’une loi contre le viol. Au cours d’une campagne prolongée, AWAM a fait prendre conscience aux autorités publiques du caractère inacceptable de la situation : elle a indiqué que la relation inégalitaire entre hommes et femmes qui pousse, de fait, à dénier tout droit aux femmes -droit à l’intégrité corporelle, droit de protester, droit d’agir en justice pour faire condamner et montrer du doigt le coupable et non la victime- ne pouvait être rééquilibrée que par une loi en faveur des femmes.
Actuellement (décembre 1994), sa préoccupation est d’obtenir une loi accordant une pension alimentaire à toutes les femmes divorcées quels que soient leur religion et le tribunal devant lequel elles doivent se présenter. En effet, dans la société malaise, à l’heure actuelle, seuls les tribunaux pour les musulmans ("Syariah Courts")autorisent l’octroi d’un tel soutien financier.
AWAM incite les couches les plus vulnérables de la population à se réapproprier leurs droits grâce à des fascicules didactiques, parfois sous forme de bandes dessinées, à la fois pertinents, clairs et simples qu’elle met à leur disposition et qui ont pour objet de faciliter l’accès au droit.
Malheureusement, AWAM se trouve confrontée à de multiples obstacles dans le développement de son projet :
- les documents juridiques dont elle dispose sont en anglais (et non dans les langues locales), le contrôle de l’Etat empêche toute liberté de parole et rend quasiment impossible toute diffusion massive de publications, l’Etat malaisien n’accepte pas l’implantation de AWAM au niveau national. Aussi tente-t-elle de contourner ce problème en recherchant le soutien de nombreuses ONG internationales.
- bien que la loi sur le viol ait été votée, grâce notamment à l’action de lobbying menée par AWAM auprès des parlementaires, elle n’a toutefois pas encore été mise en application (décembre 1994).
AWAM poursuit donc son effort en tant que moteur de la prise de conscience par les femmes de leur condition, pour leur donner l’opportunité de s’organiser et de lutter pour l’application de la loi contre le viol et contre les textes ou pratiques discriminatoires en général, et de contribuer à changer les mentalités et les comportements de la société malaise, et en particulier réduire la domination de l’homme sur la femme.
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, Malaisie
Quand les femmes se mobilisent pour la paix, la citoyenneté, l’égalité des droits
Dans ce contexte très difficile où, d’une part, l’Etat laisse peu d’espace de mobilisation sociale et où, d’autre part, le succès économique rapide démobilise également ces actions sociales, l’action que mène AWAM en vue d’une réflexion critique et en profondeur sur les droits de la femme est primordiale. Il reste à souhaiter que ce travail ne s’essouffle pas dans ce contexte de faible mobilisation sociale.
Rapport ; Présentation d’organisme
GAUDARD, Catherine, Rapport de mission en Asie, 1994
Juristes Solidarités - Espace Comme vous Emoi, 5 rue de la Révolution, 93100 Montreuil, FRANCE - Tél. : 33 (0)1 48 51 39 91 - France - www.agirledroit.org/fr - jur-sol (@) globenet.org