10 / 1996
L’amélioration de la situation des populations rurales en Amérique latine ne peut provenir du développement des grandes industries de type occidental. Elle doit donc être recherchée par d’autres voies et la question essentielle est de déterminer si l’agro-industrie rurale induite par les projets de développement en constitue l’une des solutions adaptées.
Tel a été l’objet de notre travail (1). La réponse est apportée à travers l’étude de cas sélectionnés en concertation avec différents partenaires (ALTERSYAL, PRODAR, CELATER (2)) et répondant à différents critères tels que le centrage du projet sur l’agro-industrie, l’appui d’institutions de développement, l’implication d’organisations paysannes, la constitution de réseaux, la pérennisation dans le fonctionnement et l’aspect innovateur.
Les projets étudiés sont une coopérative de conditionnement de légumes frais pour l’exportation située sur l’altiplano occidental du Guatemala, quatre projets liés au même centre de recherche situés au Costa Rica et orientés vers la transformation de fruits, d’épices et de colorants, un projet de production de manioc séché localisé dans toute la région de la côte atlantique de Colombie, et enfin deux projets situés en Equateur : l’un orienté vers la fabrication et la commercialisation de fromages de type suisse et l’autre conditionnant le poisson frais pour le marché national.
Le travail a été mené selon la méthode d’étude de cas, en utilisant les données disponibles dans les diverses documentations, complétées par les renseignements recueillis sur le terrain. La grille d’analyse comportait cinq volets :
- une approche historique centrée sur la compréhension de la genèse et de l’émergence des projets,
- une analyse des résultats comptables et techniques qui permet d’évaluer la réussite de l’entreprise,
- une étude des relations du projet avec les réseaux,
- une analyse économique qui rend compte de l’impact du projet sur le développement économique de la zone concernée,
- une analyse sociale qui vise à mettre en lumière les effets indirects des activitéscommunautaires et les actions induites d’amélioration des conditions de vie.
Les résultats obtenus permettent d’affirmer que l’agro-industrie rurale induite constitue bien une des réponses adaptées aux demandes de développement d’ordre socio-économique du monde rural de l’Amérique latine sous réserve de satisfaire aux conditions ci-après. A la demande spontanée ou suscitée des institutions paysannes, une réponse globale tenant compte de tous les aspects humains, culturels, économiques et sociaux, doit être apportée par les institutions d’appui. L’agro-industrie rurale doit acquérir le plus rapidement possible son autonomie économique en se comportant comme une petite entreprise rentable et adaptée au marché et en s’appuyant sur les prestations offertes par les réseaux formels ou informels. L’aspect social doit être considéré commeun facteur essentiel de pérennisation du projet en suscitant la participation pleine et entière des communautés.
Pour satisfaire ces trois conditions, il est nécessaire de mener des études préalables à l’implantation d’un projet sans qu’on puisse faire l’impasse sur l’une d’entre elles.
L’étude de la situation initiale du milieu humain, géographique et économique doit permettre de préciser la demande émanant de la base afin d’inventorier les réponses disponibles et les institutions en mesure d’apporter leur appui, soit de manière individuelle ou sectorielle, soit sous forme de réseau.
L’étude de marché et la sélection du procédé industriel à retenir doivent permettre de trouver des solutions économiquement viables dont la mise en oeuvre n’impose pasaux populations un "saut technologique" trop important.
Enfin, l’analyse des objectifs à atteindre en matière de développement social conditionne dans une large mesure l’adhésion et la participation des populations locales à la mise en oeuvre du projet. En particulier, les actions d’éducation et de formation doivent être prédéterminées de manière à ce que l’impact sur les comportements et les mentalités ait le temps de produire ses effets.
Cette démarche est la seule voie quipermette d’éviter les écueils relevés dans les études de cas et d’envisager de rencontrer quelques succès.
développement local, étude de cas, changement économique, logique d’entreprise, méthodologie, économie rurale, assistance technique, coopération, méthode de diagnostic, étude comparative, lutte contre la pauvreté, évaluation, développement rural
, Guatemala, Amérique Latine
L’auteur de la fiche travaille pour ALTERSYAL/INCAP.
(1)Cette fiche s’appuie sur les recherches réalisées par F. Tartanac dans le cadre de sa thèse sur le thème "Agroindustrie rurale en Amérique Latine : dynamique de l’innovation et développement local. Impact socio-économique de huit projets".
Contact:
TARTANAC, Florence
INCAP= Institut de Nutrition d’Amérique Centrale et Panamá, Calzada Rossevelt Zona 11. Apartado postal 1188. GUATEMALA. Tel (502)2-72 37 62 Fax (502)2-73 65 29
(2)L’Agroindustrie rurale AIRest un thème de recherche-développement majeur en Amérique Latine, conduit par :IICA=Institut Interaméricain de Coopération pour l’Agriculture. Apartado 55, 2200, San José, COSTA RICA. Fax (506)229 47 41; CIRAD-SAR=Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement-département Systèmes Agroalimentaires et Ruraux. Adresse : cf. ALTERSYAL. Ces organismes collaborent au sein du PRODAR=Programme Coopératif de Développement de l’Agroindustrie Rurale en Amérique Latine et Caraïbes.
Contacts : AQUINO, Carlos(directeur général de l’IICA), BOUCHER, François(directeur exécutif du PRODAR, IICA/CIRAD-SAR/ALTERSYAL), MUCHNIK, José(CIRAD-SAR/ALTERSYAL), CELATER= Centro Latinoamericano de Tecnología y Educación Rural. Apartado Aéreo 6555. Cali. COLOMBIE.
Texte original ; Thèse et mémoire
TARTANAC, Florence, Université Paris X-Nanterre, L'agroindustrie rurale en Amérique latine, dynamiques de changement et développement local, 1996
ALTERSYAL (Alternatives Technologiques et Recherche en Systèmes Alimentaires) - Coronado, San José, COSTA RICA c/o CIRAD-SAR, 73 rue J.F.Breton - BP 5035- 34032 Montpellier cedex 1. FRANCE - Tél. 04 67 61 57 01 - Fax 04 67 61 12 23