Ocaña est une ville de taille moyenne (100 000 habitants)située dans la province de Santander, au nord de la Colombie. Selon Carlos Carillo, communicateur colombien de la GTZ (Cucuta), elle possède une vie culturelle importante : on y trouve beaucoup d’artistes-peintres, d’écrivains et de musiciens. Son orchestre a reçu le Prix national des Orchestres.
Le général Simon Bolivar, qui a vécu un certain temps dans cette ville pour soigner une tuberculose, en a fait un lieu stratégique. C’est dans son église qu’il créa la grande Colombie composée de l’Equateur, du Panama, du Venezuela et de la Colombie. La "Convention d’Ocaña" fut scellée en 1819 avec l’adhésion du Pérou et la nomination des représentants de tous les pays de la communauté. Selon Carlos Carillo, "Convencion" est le nom actuel de la commune dans laquelle se sont réunis Bolivar et ses alliés. Actuellement, elle est très touchée par la violence, sa population est de 4 000 habitants et elle possède trois orchestres.
Ocaña a déjà servi de décors à de grands événements et elle fut un centre économique important à l’époque du Cable aérien. Installé dans les années 1920, ce Cable était en fait un téléphérique très très long qui liait Bucaramanga à la Côte atlantique. C’est grâce aux indemnités que la Colombie avait reçues des Etats-Unis au moment de l’indépendance du Panama qu’il avait pu être construit. Suite à un accident, il n’est plus en service aujourd’hui. La liaison se fait maintenant par la carretera (autoroute)Troncal del Norte.
L’Institut des Beaux Arts de cette ville abrite en son sein le groupe intitulé "Raizes magicas" (Racines magiques)constitué de quinze enfants de 10 à 14 ans qui écrivent des poèmes et des contes et font de la peinture et de la vidéo sur le thème de l’histoire de la région. Ils bénéficient de l’appui d’Ana Sanchez et Benjamin Casadiego. Parmi les réalisations du groupe, on peut citer le livre "La historia que nos contaron los abuelos" (L’histoire qui nous a été racontée par nos grands parents). Selon les enfants, il s’agit d’"un récit oral sur la province d’Ocaña depuis le début du siècle", une publication qui a reçu le soutien de la Fondation pour le progrès de l’homme (FPH). Le principal intérêt de ce travail réside dans le fait qu’il est le résultat des entretiens que les enfants ont eus avec les anciens de la ville. Il valorise un savoir qui tend à se dissiper avec le temps, surtout lorsqu’il s’agit de l’expression des opinions et souvenirs des gens simples du peuple de la rue. Parmi les autres réalisations du groupe, on peut également citer les vidéos "Cuentos del taller infantil El pez que fuma" (Conte de l’atelier d’enfants Le poisson qui fume), "Telenoticiero de Ocaña" (Journal télévisé d’Ocaña)et les plus récents "El niño trabajador" (L’enfant travailleur)et "Leonelda" qui est sur le point d’être terminé.
Selon les enfants, la réalisation technique, le travail de l’équipe et le processus d’élaboration des vidéos ont connu aussi bien des obstacles que des succès. Par exemple, dans "El Niño Trabajor", les difficultés rencontrées allèrent de la qualité même du son jusqu’à la définition des rôles et des responsabilités assumées par chacun dans l’équipe (avec les conflits qui accompagnent ce genre d’aventure)en passant par les limitations physiques et psychologiques du protagoniste de la vidéo (un véritable enfant travailleur)qui, à la fin du tournage, ne supportait plus le travail de répétition des scènes.
Quant à la vidéo "Leonelda", elle fut le résultat d’un travail de sauvetage de la mémoire historique entrepris par le groupe Raices magicas. Selon la légende d’Ocaña, Leonelda était une très belle Indienne de la tribu Brujura qui avait d’immenses pouvoirs, comme celui de guérir les malades. Cette femme jouissait d’un prestige et d’une popularité très grands parmi les membres de sa tribu. Elle fut poursuivie et emprisonnée par les Espagnols qui l’accusèrent d’être une sorcière qui voulait changer l’évêque et le maire en crocodiles. Se servant de ce prétexte, ils voulurent faire juger Leonelda. Mais la communauté s’organisa pour l’enlever et leur entreprise fut couronnée de succès. Outre la restitution d’une légende traditionnelle de la région, cette vidéo est une fiction dramatisée qui utilise diverses ressources plastiques telles que la fabrication de très beaux masques expressifs de papier mâché. De plus, les enfants se sont servis du cadre de la ville, de ses églises et de ses monuments historiques pour recréer l’ambiance de la légende. Le groupe s’est organisé lui-même pour réaliser le travail littéraire et la vidéo.
Harmoniser tous ces éléments, se mettre d’accord, privilégier la proposition collective face à l’individu, cohabiter avec les différences, tels furent les défis importants rencontrés pour former ces petits citoyens. On a montré à ces enfants quelques-uns des travaux réalisés au Brésil avec la participation de Dialogo et le concours du Mouvement noir, du Mouvement des sans-terre, etc. : enregistrements réalisés avec des enfants des quartiers pauvres qui racontent leur participation culturelle à des manifestations telles que "boi-de-mamao", le carnaval, les groupes de musiciens, les danses africaines, l’organisation des écoles de samba, etc. On a également parlé avec eux de la situation sociale des enfants au Brésil.
communication, vidéo, valorisation de l’expérience, enfant, milieu urbain, méthodologie, tradition, formation
, Colombie, Ocaña
Les enfants ont fait preuve de beaucoup de curiosité pour ce qui concernait le Brésil. Mais ils tenaient aussi à nous informer de leur travail. Ils ont montré un sens critique aigu allié à une douceur et à des principes moraux que l’on trouve rarement chez les adolescents d’aujourd’hui. D’un esprit vif et clair et avec une volonté teintée de douceur mais néanmoins très ferme, ils ont dévoilé des horizons très intéressants quant à l’avenir de la Colombie. Les préoccupations de ce groupe étaient tout autant d’ordre technique et méthodologique (difficultés et spécifités du rôle de chacun dans une équipe, etc.)que d’ordre philosophique plus général. Il serait bon de pouvoir compter sur des citoyens qui seraient formés dès l’enfance dans une telle structure personnelle et sociale. Ces enfants ont fait preuve d’une naïveté créatrice et utopique qui, alliée à une solide formation, donne beaucoup d’espoir.
Fiche originale en portugais (MFN 02474).
Dialogo Cultura e Comunicacao - Rua Dep. Antonio Edu Vieira, nr.65, apt. 204/D, Bairro Pantanal, Florianópolis-SC, BRASIL - Brésil - mvsouza (@) univali.br