Les peuples indigènes sont trop souvent considérés comme les reliques primitives d’un passé aboli, destinés à disparaître au nom du progrès. En réalité, à l’heure où s’éveille la conscience que la planète est en danger, ils apparaissent clairement porteurs d’avenir, tant par leurs modèles de développement durable que par les valeurs qui soudent encore leurs sociétés.
Les peuples indigènes représentent aujourd’hui une infime partie de la population mondiale, soit près de 370 millions d’êtres humains répartis sur tous les continents. Englobés dans des Etats dont ils ne sont dans la plupart des cas pas partie prenante, ces peuples qui ont préservé leurs propres traditions, langues et organisations sociales – distinctes de celles de la population majoritaire – sont marginalisés politiquement, économiquement et culturellement. Si certains d’entre eux (en Amazonie, en Inde ou en Papouasie, par exemple), ont pu pendant des siècles vivre dans un isolement protecteur relatif, l’expansion économique mondiale des pays industriels, la volonté d’exploitation intensive des ressources de la planète attaquent aujourd’hui en tous lieux leurs territoires, leur environnement, leurs moyens d’existence, leurs modes de vie. Des régions jadis éloignées et isolées des centres de décision ont été transformées en pôles de croissance, réserves de quantités énormes de ressources naturelles, sites de barrages et d’entreprises minières, cibles de projets de colonisation, parfois d’intérêt stratégique.
Au mépris des peuples
La ruée sur les terres et les richesses fait généralement oublier le fait qu’un grand nombre de ces régions (forêts, savanes, déserts, taïgas…) sont les territoires ancestraux de peuples indigènes. La terre ne représente pas seulement pour eux une ressource productive ou un facteur économique, la terre c’est l’habitat, le territoire, la base de l’organisation socio-politique et de l’identification culturelle. La terre est l’élément vital de la reproduction culturelle du groupe, condition essentielle de sa survie. L’industrialisation, le développement économique nécessaires aux pays du Sud sont trop souvent menés au mépris des intérêts et des modes de vie de ces peuples mais avec l’assentiment des classes dirigeantes et des puissances économiques locales et internationales.
Les exemples ne manquent pas, sur tous les continents, de peuples indigènes dont le mode de vie est profondément perturbé par l’exploitation intensive de leurs territoires. La situation des « petits peuples » du Grand Nord sibérien est catastrophique : une répression culturelle féroce s’est accompagnée de graves atteintes à leur environnement en raison de l’exploitation extrêmement polluante du gaz et du pétrole. Dans les pays amazoniens, des communautés indiennes souvent très isolées sont menacées par l’invasion de leurs territoires, la déforestation, l’exploitation minière, l’élevage et l’agriculture à grande échelle. Au Botswana, les Bushmen de la Réserve du Kalahari central ont brutalement été expulsés de leur territoire ancestral parce qu’on y a découvert d’importants gisements de diamants. En Guyane française, s’appuyant sur le principe constitutionnel d’égalité devant la loi de tous les citoyens français, sans distinction d’origine ou de race, la France reste réticente à reconnaître les droits particuliers des quelques milliers d’Amérindiens qui y vivent.
Vers la reconnaissance
La création au sein des Nations Unies, en 1982, d’un Groupe de travail sur les peuples indigènes a donné à ces peuples l’accès à un système dans lequel ils n’avaient guère de place. Cette instance a favorisé la formation d’un mouvement international fédérant une multitude d’organisations indigènes qui tendent à développer des stratégies communes face à des problèmes similaires. Cette remarquable prise de conscience politique des peuples indigènes, leur présence accrue dans les forums internationaux et la pression des organisations internationales de soutien ont conduit certains gouvernements et institutions internationales à adopter des dispositions sans précédent. Ainsi, la Déclaration des droits des peuples autochtones, récemment adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies, marque-t-elle une étape importante en reconnaissant leur droit à l’autodétermination et à la possession collective de leurs terres.
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L’impossible dialogue des cultures ?
Altermondes n°16 - décembre 2008 > février 2009, www.altermondes.org
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