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Les problèmes nés des crédits de campagne agricole accordés à des paysans non préparés à les recevoir (FONGS, Thiès, Sénégal)

Ndeye SARR, Séverine BENOIT

10 / 1998

Madame Ndeye Sarr, présidente de la FONGS (Fédération des ONG Sénégalaises):

"A un certain moment, le pays était confronté à un désengagement de l’Etat (1984). C’était avec la nouvelle politique agricole, l’Etat a responsabilisé les paysans. Ce désengagement a été un peu brusque, ce n’était pas bien préparé. Le monde rural n’a pas bien reçu ce désengagement. Comme les paysans devaient se prendre en charge, l’Etat a créé la CNCA (Caisse Nationale de Crédit Agricole), en disant que c’était la banque des paysans.

Mais ce n’était pas les fonds des paysans. Les paysans devaient venir obtenir des crédits pour les semences, les engrais, etc. Mais le système n’était pas bien préparé et il y avait beaucoup de difficultés pour ce changement. C’était difficile pour les paysans de se retrouver là-dedans parce qu’il fallait avoir des garanties pour avoir accès au crédit, il fallait trouver un apport propre, il y avait des frais de dossier à fournir. Après l’obtention du crédit, la fin de l’échéance n’était pas plus longue que 7 mois, donc c’était un délai très court pour le remboursement. Il y avait un taux d’intérêt élevé à payer qui était de 17,5 pour cent ou bien 18 pour cent.

Au début, certains paysans croyaient que c’était une bonne chose: "tu viens, tu présentes tes besoins, la CNCA accepte le dossier et te donne tes bons, tu peux aller voir le fournisseur de semences, il te donne une partie des semences en nature et une partie il te la restitue en argent (pour que tu puisses trouver de quoi payer les 15 pour cent d’apport propre que t’a demandé la CNCA)". Mais une personne qui, dans sa vie, n’a jamais géré une certaine somme, un jour se voit avec de l’argent entre ses mains, s’il n’est pas conscient qu’au bout de quelques mois il doit rembourser avec un taux d’intérêt, il gère mal. Certains paysans se sont achetés des voitures, d’autres ont épousé des femmes; ce qui veut dire que les paysans n’étaient pas bien préparés pour cette phase transitoire. Dans certaines zones, surtout dans la vallée du fleuve, ce système a connu beaucoup de succès puis beaucoup de non-paiement des dettes.

A un certain moment, la FONGS s’était organisée, avait acheté des actions pour être au conseil d’administration de la CNCA et avait trouvé un financement pour avoir un fond de garantie (1987). Mais si on garantit à des personnes qui, ensuite, ne remboursent pas, on se retrouve coincés. Les problèmes actuels liés au non-remboursement des crédits concernent les groupements, puisque ce sont les crédits des groupements, mais aussi la FONGS. En effet, dans certaines zones les organisations endettées sont membres de la FONGS et surtout parce qu’il y a une ligne de garantie gérée par la FONGS qui a été utilisée par les membres de la FONGS. Et même certains groupements doivent encore aujourd’hui (1998) des remboursements de prêts accordés par la FONGS elle-même en 1987".

Palabras claves

organización campesina, crédito, Estado, administración de empresas


, Senegal, Thies

Comentarios

Notre interlocutrice résume la façon brutale dont l’Etat sénégalais a "responsabilisé" les Organisations Paysannes à partir de 1984 ; elle souligne l’échec d’une aide accordée un peu rapidement aux paysans par l’Etat entre les années 1986 et 1995 sans un apprentissage de la gestion à court terme des crédits agricoles et des garanties d’emprunt.

Notas

En tant qu’épouse du président de l’ASESCAW (Amicale Socio-Economique, Sportive et Culturelle des Agriculteurs du Walo) Mme Sarr a vécu la période (1986-1990) où les groupements du Walo cultivaient jusqu’à 30.000 ha de rizière en une année. Une culture sur emprunts à la Caisse Nationale de Crédit Agricole et à la Fédération des ONG du Sénégal (FONGS). Elle a vécu ensuite la déconfiture totale due au non-remboursement des emprunts. Elle a retrouvé ces problèmes... quand elle a été élue présidente de la FONGS.

Entretien avec SARR, Ndeye, réalisé à Bonneville, septembre 1998.

Fuente

Entrevista

GRAD (Groupe de Réalisations et d’Animations pour le Développement) - 228 rue du Manet, 74130 Bonneville, FRANCE - Tel 33(0)4 50 97 08 85 - Fax 33(0) 450 25 69 81 - Francia - www.grad-france.org - grad.fr (@) grad-france.org

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