Difficultés et perspectives
01 / 1997
L’engagement des pouvoirs publics français dans cette expérience de formation de techniciens agricoles au Chili s’étalait sur trois ans, de 1992 à 1995, ce qui pose aujourd’hui le problème du relais financier. Cette question cruciale remet en cause la pérennisation de tels projets.
L’expérimentation portait en grande partie sur les capacités financières locales de reprise en main, or un seul site a répondu aux critères définis par les MFR et AGRARIA. Pourtant les municipalités, grâce aux circuits des fonds régionaux de développement, ont une certaine capacité financière, qu’elles gèrent de façon autonome. Mais elles ne choisissent pas forcément d’appuyer de tels projets.
L’apprentissage de la décentralisation n’est pas toujours simple. Les changements des équipes municipales tous les deux ans imposent des interlocuteurs très souvent renouvelés. Ceci entraîne des intérêts variables selon les uns et les autres. Par ailleurs, les relations entre municipalités chiliennes ne sont pas toujours au beau fixe, et les querelles internes ne favorisent pas les négociations avec AGRARIA et les MFR.
Lors de leur dernière mission, les responsables des MFR ont reçu des encouragements du Ministère de l’Education rurale. Or ce dernier n’a maintenant plus de pouvoir décisionnel. La décentralisation a induit la séparation des pouvoirs, les ministères n’ont plus la possibilité d’infléchir les choix municipaux, ils peuvent seulement les inciter. Le choix crucial du type d’éducation prônée revient donc aux municipalités. L’alternative proposée quant à l’organisation de l’enseignement professionnel est soit le développement des lycées professionnels, soit les méthodes alternatives. Or les orientations municipales vont à l’encontre du développement des centres de formation.
Ces difficultés ne doivent pas pour autant faire de l’ombre aux aspects positifs du projet, mis en avant par un étudiant en DEA. Les formations ont eu un impact notamment sur l’environnement familial et communautaire. Les jeunes ont diffusé leurs connaissances à leur famille. Ces dernières ont évolué et perçoivent différemment certaines techniques adaptables à la petite agriculture. Par ailleurs bien des gens, formés dans le centre, ont fait preuve d’initiatives personnelles. Des projets post-formation ont vu le jour. Par exemple, un projet au nord du Chili concernant le tourisme rural a été réalisé par un ancien élève.
Les jeunes adultes ont une démarche active dans la formulation du contenu des programmes. Certains, regroupés par affinités, ont exprimé leur intérêt pour des formations spécifiques. Par exemple, le groupe de Puerto Montt a demandé des formations sur la vaccination d’élevage. Cette implication des petits agriculteurs dans le choix de formation révèle la richesse des échanges entre formés et formateurs. Cela reflète l’approche des MFR qui refusent celle des consultants mais au contraire privilégie le partage des responsabilités.
Les relations entre formateurs chiliens et français, ici ou là-bas, ont permis un échange réciproque de savoir-faire, d’approche pédagogique. Ces relations ont des effets positifs sur les mentalités françaises et engendre une dynamique vers la tolérance. Les formateurs français ayant suivi ces expériences peuvent s’en faire l’écho dans les MFR en France, qui forment plus de 4700 jeunes en France, ce qui constitue un public potentiel.
La base de réciprocité est également présente dans les échanges entre les jeunes étudiants en agronomie et AGRARIA. De nombreux stages ont été organisés au Chili, dont les sujets correspondent à une attente d’AGRARIA et des étudiants. Ces derniers sont confrontés à des techniques autres que celles dont ils ont l’habitude. Cette ouverture d’esprit a des répercussions à long terme sur les méthodes et approches en France, où des paysans chiliens sont également venus confronter leurs techniques agricoles et paragricoles.
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Actuellement ces partenaires sont dans une situation d’expectative, car ils doivent affronter deux problèmes majeurs exogènes. D’une part, la continuité du projet de développement de centre de formation type MFR dépend des orientations municipales. Existe-t-il une volonté politique chilienne pour développer de tels centres ? D’autre part, l’association Douar Nevez, à la suite du décès de son fondateur, est en phase de repositionnement.
Toutefois, les responsables d’AGRARIA ont proposé un projet de bourses " Marcel L’Aot ", qui seraient attribuées à des jeunes ruraux de la dixième région (Locades, Chiloe), où Douar Nevez a beaucoup d’attaches. Un fonds rotatif sera ainsi créé et utilisé pour la réalisation d’un projet personnel agricole ou artisanal en milieu rural, incluant une phase de formation et de développement. Ces bourses ne sont pas une fin en soi mais une partie d’un programme incitatif aux initiatives personnelles, elles sont un élément pour favoriser les démarches participatives préconisées par les MFR et AGRARIA.
Entretien avec G.Durand, membre de l’association Douar Nevez (novembre 1996)et avec le responsable de la fédération de Bretagne des maisons familiales rurales, Claude Richard (2 octobre 1996). Contact : Douar Nevez, 1 rue V.Hugo - 35000 Rennes / Tel : 02.99.79.57.19
Entretien avec DURAND, Guy; RICHARD, Claude
Entrevista
CEDAL FRANCE (Centre d’Etude du Développement en Amérique Latine) - Francia - cedal (@) globenet.org