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Les politiques d’emploi et le rôle de l’Etat en Amérique latine - 1992-

Bernard OZANAM

07 / 1997

Face à la grave crise économique et sociale que traverse l’Amérique latine, certains ont pensé que le secteur informel pourrait être une alternative pour une autre politique de développement.

Après avoir fait le point sur les différentes politiques de l’emploi en Amérique latine, Bruno Lautier exprime son point de vue sur le rôle du secteur informel.

Les années 1980 ont vu l’abandon de toute politique d’emploi traditionnel. C’est-à-dire, la création d’emplois publics et industriels, grâce aux capitaux d’Etat, par suite de la politique d’ajustement.

Cet abandon se constate aussi au niveau international puisque le PREALC (Programme régional de l’emploi pour l’Amérique latine et les Caraïbes)a décidé d’abandonner la formalisation du secteur informel.

Du nord-est au Chili, en passant par l’Argentine, l’heure est à la déréglementation : 30 % des salariés argentins ont un contrat de travail temporaire et sont sans garantie sociale (salaire minimum excepté). Au Pérou, le droit du social est en décomposition.

Pourtant on tend à briser le pouvoir syndical et les monopoles d’embauche (Argentine, Mexique)et on supprime le salaire minimum ou on le rend symbolique (Brésil).

C’est dans ce contexte que Hernando de Soto, économiste péruvien, a milité pour une aide au secteur informel. Son idée de départ est qu’une entreprise informelle a des coûts et n’a pas accès à la publicité ni au crédit mais que cela s’aggrave si elle veut se formaliser. Aussi, propose-t-il, il faut abaisser les taxes et alléger la réglEmentation pour aider à ce passage. Mais le problème c’est que cela toucherait aussi les industries importantes. Et la baisse de leurs taxes entraînerait une grave crise fiscale aux conséquences imprévisibles.

Pour Bruno Lautier, « cela ne fait pas une politique d’emploi ». « L’Etat n’a pas mis des moyens pour créer des emplois organisés entre eux ni fait dépendre emploi et développement du territoire », ajoute-t-il.

Le PREALC voyait l’informel comme un vivier d’emploi propre à palier les effets de la politique d’ajustement. Et l’on rappelait volontiers la réussite du plan Cruzado de 1985-86 au Brésil, qui avait généré beaucoup d’emplois de ce genre dans le commerce et l’artisanat. Mais cela coincidait avec une forte expansion et ne prouvait pas la capacité de l’informel a être une véritable alternative.

Par ailleurs, le secteur informel se gonfle de plus en plus de travailleurs en provenance du secteur formel. Ceux-ci, licenciés vers quarante ans, créent leur activité informelle. Ils sont trois fois plus nombreux en Colombie qu’il y a une génération. Le résultat est une baisse des revenus, aggravée par la baisse de la demande. Le secteur informel ne peut être qu’une substitution à l’économie défaillante.

Pire, les activités informelles sont menacées. D’une part, les micro-entreprises, si souvent subventionnées, ne sont plus rentables face à la concurrence internationale et périclitent. Le domaine des transports et plus spécialement le taxi est menacé par la cherté de location et la baisse des revenus de la classe moyenne, qui s’en détourne à cause de son prix. Enfin, certaines activités dites informelles ne sont que le prolongement d’activités formelles. Ainsi au Mexique les concurrences prolongent leurs activités sur les trottoirs des villes en appointant des vendeurs. Pour Bruno Lautier, « il est temps de tordre le cou à cetaines idées fausses sur le secteur informel ».

Tout d’abord, il est faux de dire qu’il n’y a pas de barrière d’entrée, c’est-à-dire que l’on paut exercer une activité informelle sans contrepartie financière. Aussi un taxi coûte l’équivalent de trois ans de salaire, et devenir cireur de chaussures à Rio nécessite le paiement d’une taxe à une « organisation de mafieux ».

Il n’est pas exact non plus que les activités informelles soient un remède contre le chômage. Celui-ci est très fort au Pérou, au Brésil et dans le sud du Mexique.

Bruno Lautier n’y voit pas non plus une « alternative pour une autre politique de développement ». Au contraire, elles sont liées au système actuel, ce qui explique leur déclin. Ainsi, les employés de maison diminuent par suite de la crise et ceux qui restent acceptent d’importantes baisses de salaire. La seule « poche » d’activité informelle qui se maintient est celle des bidonvilles livrés à eux-mêmes et qui doivent s’organiser.

Quant aux Maquiladores (zones franches)mexicaines, présentées comme une grande réussite, elles montrent surtout leur limites ! car leurs industries vivent sur des cadences infernales qui épuisent le personnel, surtout féminin, en trois ou quatre ans. Pour B. Lautier, ce sont avant tout des « sas » où vient s’accumuler la main-d’oeuvre en instance d’immigration.

En ce qui concerne le Chili, B. Lautier reste très prudent quant au succès du secteur informel comme alternative de développement. Il reconnaît néanmoins que les industries d’emballage ont permis de stabiliser l’exode rural, ce qui est un acquis très important.

Enfin, le secteur informel est entravé par l’attitude de l’Etat à son égard. Celle-ci est contradictoire. D’un côté, il soutient le secteur informel et par suite de son désengagement il se montre plus tolérant envers ce dernier. Mais alors sa propre légitimité repose sur le clientélisme.

D’un autre côté, l’Etat prône la déréglementation et le non respect des normes fiscales. Mais sa réforme fiscale s’accompagne d’une levée d’impôts (Brésil, Argentine)et le système de protection sociale s’effondre. Sans parler d’une dette atteignant 10 milliards de dollars et de la détérioration du système de santé.

En conclusion, Bruno Lautier insiste sur l’imbrication des secteurs formel et informel qui sont complémentaires. Il n’existe pas de secteur informel en tant que tel. Le croire, c’est mettre sur le même plan des activités industrielles ou le trafic de drogue. Le résultat en est une vue faussée de la situation économique des pays d’Amérque latine et du Tiers Monde en général. Et en arriver à dire que « l’ajustement structurel se passe bien », ce qui est « la négation de l’intelligence ».

Palabras claves

política de empleo, sector informal, rol del Estado, empleo, desempleo


, América Latina, Perú, Chile, Argentina, Brasil, México

Notas

Article écrit d’après un entretien avec B.Lautier

Entretien avec LAUTIER, Bruno

Fuente

Artículos y dossiers ; Entrevista

MARTINEZ, Jacqueline, CEDAL FRANCE=CENTRE D’ETUDE DU DEVELOPPEMENT EN AMERIQUE LATINE, Les ONG françaises et l’Amérique latine : nouveaux discours, nouvelles pratiques, CEDAL FRANCE in. COMUNICANDO, 1994/06/00 (France), 20, spécial 1492-1992, vol.1

CEDAL FRANCE (Centre d’Etude du Développement en Amérique Latine) - Francia - cedal (@) globenet.org

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