(Plataforma por la casa de Pumarejo)
07 / 2005
Le mouvement « Plataforma por la casa de Pumarejo » est né de la mobilisation de tout un quartier de Séville autour de la sauvegarde du dernier « palais » (1) du centre historique de la ville.
Cette grande bâtisse représentative de l’architecture du 18ème siècle, mieux connue sous le nom de « casa palacio », a subi une détérioration progressive qui n’a fait qu’empirer au cours des années, suite au non respect de l’obligation d’entretien de la part de ses propriétaires (personnes privées).
C’est en partie pour répondre à la menace d’exclusion des locataires et pour sauvegarder ce dernier monument, centre de vie du quartier, que s’est créée, en mai 2000, la « Plataforma por la casa de Pumarejo », composée de nombreuses associations de voisins, de citoyens, des habitants de la « casa palacio », du quartier, etc.
Ce comité poursuit plusieurs objectifs : la lutte contre les expulsions, la sauvegarde du bâtiment, l’amélioration de la qualité de vie du quartier, la reconnaissance publique de la richesse historique, architecturale et sociologique du monument et le refus qu’il soit transformé en hôtel de luxe.
Des mobilisations collectives pour faire reconnaître le bâtiment comme bien d’intérêt culturel
Diverses stratégies d’action ont ainsi été envisagées et régulièrement mises en oeuvre par le collectif au cours de ses 5 années d’existence et de lutte :
organisation de manifestations, de marches ;
courriers et pétitions adressés aux administrations et aux personnes influentes (délégués à la culture, à l’urbanisme, aux travaux publics et aux transports…) ;
occupations de locaux administratifs par des membres de la « Plataforma por la casa de Pumarejo » ;
journées populaires de soutien en proposant dans le quartier des animations diverses (théâtre, musique, lectures, expositions-photo) ;
actions de protestation symboliques : remise d’un sac de charbon au bureau de l’urbanisme par des habitants déguisés en rois mages à la période de Noël ;
rencontres avec des personnalités politiques.
La plupart des actions menées ont été relayées par les médias.
La mobilisation très forte du comité s’est organisée autour de l’idée de conserver les habitations et la spécificité du monument, particulièrement son rôle de centre de dynamisme culturel et de cohésion sociale pour l’ensemble du quartier. Les habitants souhaitaient garder leur patrimoine historique et particulièrement cet édifice fonctionnant selon un mode traditionnel et abritant à la fois des logements, des associations de quartier ainsi que de petits artisans et boutiques.
Le collectif a notamment dénoncé une pratique courante qui vise à laisser un immeuble se détériorer afin de pouvoir le déclarer en ruine et expulser ensuite rapidement ses habitants pour des raisons de sécurité. Cette technique a, entre autres, été utilisée dans le centre historique de Séville et dans la zone environnant la « casa de Pumarejo » où les habitants de nombreux immeubles furent expropriés.
La première étape importante de la lutte a été d’obliger l’administration à donner un statut particulier au monument en le classant comme BIC (Bien d’Intérêt Culturel) en 2001. Les habitants espéraient, par ce moyen, continuer à vivre dans leurs logements et que soit rendu public le caractère spécifique, historique et symbolique de la « casa palacio » qui se démarque de toutes les autres constructions.
Cette inscription a permis à la « Plataforma por la casa de Pumarejo » de justifier deux de ses demandes auprès des services administratifs.
Tout d’abord, le collectif a allégué le fait que les organismes publics ne doivent pas se limiter à classer des biens de valeur dans une catégorie administrative, mais qu’ils doivent aussi mettre en place des politiques actives permettant la protection et la valorisation du patrimoine culturel et social reconnu par la qualification BIC.
Ensuite, il a pu demander à l’administration locale d’appliquer une loi de 1991 (2) qui prévoit qu’en cas de vente d’un bien classé patrimoine historique, celle-ci peut exercer un droit de préemption et acquérir le bien. Cette réclamation a été faite lors de la mise en vente par la moitié des propriétaires de la « casa palacio » ; mais ce droit n’a pas été utilisé par l’administration voyant d’un bon œil le rachat de 50% des parts par une chaîne d’hôtels de luxe en mars 2002.
De même, de nombreuses recherches ont été effectuées grâce auxquelles le collectif a découvert plusieurs points importants qui l’ont aidé à alimenter sa lutte face à l’inaction de l’administration :
La Mairie a depuis 1981 considéré que l’immeuble devait être protégé dans le cadre d’une défense du patrimoine concernant l’intérieur du centre historique.
Le bureau chargé de l’urbanisme prévoit, dans son plan local d’urbanisme (3) d’avril 2000, que la zone dans laquelle se trouve la « casa pumarejo » doit devenir une zone de réhabilitation concertée et faire l’objet d’une attention particulière.
La situation de dégradation du bâtiment est connue depuis bien longtemps des services de l’Urbanisme, précisément depuis 1988, puisque des rapports leur ont été transmis par le service des pompiers intervenu plusieurs fois à cause du mauvais état de la façade.
C’est sur la base de ces éléments que la « Plataforma por la casa de Pumarejo » a pu fonder les nombreuses réclamations adressées à l’Administration, et mettre en cause régulièrement la passivité, le silence des institutions qui n’ont pas exercé de pressions sur les propriétaires pour les obliger à faire les travaux nécessaires au maintien en l’état du monument. Le bureau de l’urbanisme n’a pas non plus répondu efficacement à cette nécessité pour la sauvegarde du monument et la sécurité de ses habitants, car, même si des travaux de rénovation ont été entrepris en mai 2000, ils furent suspendus en février 2001. Les habitants ont donc dû entreprendre eux-mêmes quelques travaux d’urgence.
Malgré cette forte mobilisation, les derniers habitants se sont vus expulser par voie d’huissier, en janvier 2003. Mais la « casa palacio de Pumarejo » héberge toujours les associations et reste encore le cœur de la vie de ce quartier. La lutte des habitants se poursuit donc aujourd’hui.
desarrollo urbano, movilización popular, vínculo social, rol del Estado
, España
Pratiques du droit, productions du droit : initiatives populaires, 2005
Entrevista
Réalisé en décembre 2004 : PLATAFORMA por la CASA de PUMAREJO, Integrada con la RED CIUDADANA « La Sevilla que queremos »
Juristes Solidarités - Espace Comme vous Emoi, 5 rue de la Révolution, 93100 Montreuil, FRANCE - Tél. : 33 (0)1 48 51 39 91 - Francia - www.agirledroit.org/fr - jur-sol (@) globenet.org