Principes méthodologiques pour un développement alimentaire et nutritionnel à long terme, et une généralisation des expériences locales réussies
08 / 1996
Miser sur le développement, quand on travaille avec des personnes vivant dans des conditions précaires, est bel et bien un défi. Mais ce n’est pas une utopie ainsi qu’en témoigne le Dr Rodrigo Yépez, directeur du programme ANDES (1)et Président de l’Institut Juan César Garcia en Equateur (2). En effet au sein de ANDES, projet de développement alimentaire et nutritionnel en faveur des familles de 9 hameaux des Andes équatoriennes, techniciens, citadins et paysans y sont parvenus en alliant rigueur et passion, ténacité et amitié. Pour cela, ce projet s’est appuyé, dès son initiation en1986, sur les principes suivants :
- travailler main dans la main avec les habitants
- respecter leur histoire, culture, façon de penser
- privilégier leurs besoins les plus évidents
- accepter leurs types d’organisation et leur validité à long terme
- estimer à sa juste valeur le travail lié à leurs actions
- soutenir leurs luttes contre l’exclusion.
Soucieux de respecter les aspirations populaires, le projet a également la préoccupation de contribuer à "transformer les systèmes de formation et faire évoluer certaines politiques", autrement dit, de dépasser le cadre local des actions engagées pour les diffuser au plan régional, national, voire international. La stratégie mise en oeuvre pour assurer le passage du micro au macro comprend deux grandes lignes de conduite : agir localement, penser globalement.
Agir localement
A l’échelle locale, les modalités d’intervention du projet ANDES vont dans le sens des observations de P. Calame (3):
-il convient d’envisager la santé sur le plan familial, plutôt qu’ individuel.
- la santé relève le plus souvent de la qualité de l’alimentation et de la nutrition, et ces problèmes ne peuvent être abordés en dehors de la sphère agronomique. Ainsi,il est préférable de pallier les carences nutritionnelles en agissant sur les systèmes de production et d’après-récolte, plutôt que par l’administration de compléments, et en octroyant des crédits aux petits producteurs pour leur permettre de différer la vente de leurs produits.
- c’est au contact des populations locales que les étudiants peuvent comprendre les problèmes de santé et de nutrition.
-une collaboration entre professionnels de la santé et de l’agronomie est donc nécessaire et doit s’exercer à tous les niveaux, de l’université au travail de terrain.
-il est important d’intégrer aux programmes scolaires l’apprentissage des pratiques alimentaires et nutritionnelles adéquates.
Penser globalement
ANDES a construit et expérimenté des approches pour :
-introduire une démarche novatrice dans les systèmes de formation, aussi bien au niveau des études supérieures que des écoles de village (création d’un cursus universitaire original, la Maestria en Alimentation et Nutrition (4), à caractère multiprofessionel ; intégration des activités scolaires aux réalisations communautaires mises en oeuvre par le projet).
-mettre sur pied des instances chargées de la recherche et de la diffusion d’innovations technologiques et de la promotion de changements pertinents des politiques. Ce sont par exemple le Centre d’Etudes de Technologie Appropriée en Post-récolte et le Centre d’Etudes en Alimentation et Nutrition (5).
-élaborer des passerelles entre les différents champs disciplinaires concernés, articuler les connaissances et savoir-faire, élaborer un langage commun aux paysans et techniciens des différentes spécialités, créer et maintenir les liens avec tous les acteurs et susciter l’adhésion de la population aux changements.
L’auteur souligne que le système de travail pluridisciplinaire et sa base démocratique ont permis une continuité du projet. C’est la recherche conjointe d’un développement par les institutions oeuvrant en agronomie, santé, éducation et par les populations, qui a maintenu vivant l’esprit du projet et préservé sa dynamique. Dix-huit diplômés de la Maestria, d’origine disciplinaire diverse (professionnels de la santé et de la nutrition, ingénieurs agronomes, ingénieurs en alimentation)ont déjà été formés dans le cadre de ce projet. Ils ont désormais pour mission de participer au processus de changement politique et technologique en matière d’alimentation et de nutrition dans divers organismes étatiques, universitaires et privés d’Equateur et d’autres pays d’Amérique Latine.
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, Ecuador
Ce programme se distingue par une idéologie et une éthique affirmées, intervenant dans la conception et la mise en oeuvre des actions. La réalité est analysée à tous ses niveaux d’observation (du micro au macro), chacun implicant des partenaires bien identifiés et un environnement socio-économique, législatif, institutionnel distinct, en fonction desquels sont définis les axes d’intervention.
(1)ANDES= Alimentación, Nutrición y Desarrollo (Alimentation, Nutrition et Développement)
(2)Instituto Juan César GarciaAppui technique, expertises, formation, publications en sciences sociales et de la santé. Casilla postal 17-11-6292. Quito. EQUATEUR. Tel 593 (2)455 797; Fax 593 (2)464 412; E-mail : admin@ijuga.ecx.ec
(3)CALAME, Pierre. Auteur du prologue de : MASSE RAIMBAULT, Anne Marie, GUIHENEUF, Pierre Yves. 1996, Former pour transformer, FPH. [Dossier pour un débat n°49]
(4)Université Centrale de Quito (UNC).
(5)dépendent respectivement de la Faculté des Sciences agronomiques et de la Faculté des Sciences médicales, UNC.
Articles and files
YEPEZ, Rodrigo, Alimentation, nutrition, développement en Equateur : Agir localement... penser globalement !, CIE in. L'enfant en milieu tropical, 1995 (France), 200-221; Etude de cas "Le projet ANDES",p. 184-185 tiré du livre <TREILLON, Roland>, 1992, <L'innovation dans les pays du Sud : le cas de l'agro-alimentaire>, Paris : Karthala, 267 p. [Economie et développement].
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