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dialogues, proposals, stories for global citizenship

La communication par la danse et la musique

Aperçu de la culture khassonke

Anne FONTENEAU

11 / 1994

A Kayes, capitale de la première région du Mali, le quartier le plus ancien de la ville s’appelle le Khasso et ses habitants, les Khassonke. Adama Issa Sacko, artiste peintre sur tissu est Soninke d’origine mais Khassonke d’adoption. Descendant de la famille des chefs traditionnels, il s’intéresse de très près à la culture khassonke et met en avant le rôle de la musique. Pour lui, "la musique est très importante dans la société khassonke car tout est chanté, tout est dansé." Les instruments tout d’abord sont en eux-mêmes vecteurs d’un message. Ainsi, deux d’entre eux ne sont utilisés que dans des circonstances très particulières. Le premier ou taboule est une sorte de tambour qui sert à annoncer un évènement grave : décès du chef, arrivée de crickets migrateurs, incendie, inondation. Le second est fabriqué à partir d’une corne d’animal dans laquelle on souffle pour faire connaître un évènement très important comme la venue du président de la république dernièrement à Kayes. Les instruments de musique au Khasso créent des rythmes qui sont signifiants pour ceux qui ont appris à les décrypter. Ainsi, certains jeunes se rassemblent au son d’un tambour qu’ils identifient comme celui de leur groupe et accomplissent ensemble un travail nocturne de surveillance du quartier. Mais ce son n’est parlant que pour ceux qui ont subi les épreuves d’initiation, exercices de bravoure accomplis en brousse et de nuit. Le groupe existe toujours aujourd’hui mais ne sort que rarement et le principe de l’initiation est en train de disparaître. Ceci est également vrai pour les cérémonies de circoncision et d’excision aujourd’hui pratiquées sur les bébés ou les très jeunes enfants. Elles étaient autrefois l’aboutissement de plusieurs mois de préparation et le symbole de l’entrée dans le monde des adultes. Ce changement des pratiques contribue également à amoindrir la force du langage des chiffres en vigueur chez les Khassonke : à 7 ans, le baptême ; à 7x2=14 ans, la circoncision ; 7 parce que la somme du 3 masculin et du 4 féminin donc signe d’union, d’entraide. Les danses rituelles accompagnant ces évènements qui concernaient toute la communauté sont en train de disparaître. Grâce au récit de sa mère, Sacko a pu reconstituer une danse d’excision des femmes et un vieux du quartier lui a avoué, en pleurant qu’il n’avait pas entendu ce rythme depuis 70 ans. Cependant, il reste aujourd’hui la danse propre à chaque caste et chacun sait, en entendant tel ou tel son, que le danseur est forgeron, noble ou captif. Ainsi quand le griot entre dans la danse, le batteur casse le rythme pour adopter celui du nouvel arrivant.

Key words

aculturation, cultural change, popular culture, ethnology, cultural evolution and social change, cultural identity, living conditions, tradition, traditional knowledge enhancement


, Mali

Comments

Le langage de la musique, du rythme et des pas de danse perd de sa force au Khasso même si certains ont le souci d’essayer de préserver ce patrimoine culturel. Sacko a créé une troupe où chaque danseur est le dépositaire du rythme d’une caste précise et peut donc l’enseigner. Sacko souhaiterait monter un festival de deux ou trois jours, en 1995, afin de faire revivre la culture khassonke. Pour lui, il y a urgence : "Il faut faire savoir aux gens que dans le Khasso, il y a quelque chose qu’il faut sauvegarder : la danse et la musique."

Source

Interview

FONTENEAU, Anne; SACKO, Adama Issa

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