Le cas de la Côte d’Ivoire
11 / 1993
La croissance des importations des produits de base en Côte d’Ivoire concerne deux grands volets: les produits animaux (viande, poisson, lait)et les céréales telles que le blé et le riz. Le riz dont les importations font l’objet d’un intérêt particulier, a bénéficié d’un environnement très favorable à partir de 1980. Plusieurs paramètres sont en cause:
1- l’explosion démographique et l’urbanisation poussée du pays
2- la chute ou la fluctuation des cours mondiaux des produits d’exportation (café, cacao)et la concurrence des pays dits nouvellement industrialisés. Le marché international, de plus en plus défavorable aux producteurs, conduit à un renversement de situation: les exportations de matières premières qui avaient servi au financement des importations de 1960 à 1980 sont désormais utilisées pour le remboursement de la dette extérieure. La conséquence immédiate, c’est la non compétitivité des matières premières liées à un système de production archaïque
3- La difficulté pour l’Etat de réguler une offre et une demande grandissantes dans un contexte économique fragilisé et surtout marqué par des politiques d’ajustement structurel qui entrainent:
- la récession et la baisse des revenus estimée en 1979 à 24,5%
- la perte du pouvoir d’achat estimée à 39%, 19% et 50% respectivement pour l’indice de la fonction publique, le secteur moderne et le secteur informel. D’une manière générale, la baisse des revenus est de 18% par habitant et celle des pauvres de 29%. Pour survivre, les catégories les plus pauvres optent pour une gestion quotidienne du budget: les choix alimentaires s’orientent vers la consommation de riz importé moins cher que les productions locales comme l’igname, la banane plantain et le manioc. Le prix de ces féculents a augmenté entre 1970 et 1986 de 137,57%. Sur la même période, le prix du riz connaîtra une baisse de 76,70%: c’est le premier paradoxe. La deuxième distorsion réside dans l’alignement du prix du riz importé et du riz local usiné dans les huits rizeries bénéficiant d’importantes subventions de l’Etat. Ce qui implique une protection nulle des marchés intérieurs. En conséquence, les coûts des vivriers locaux induisent des changements dans les habitudes de consommation sur le plan spatial: il s’opère une adaptation plutôt conjoncturelle. Dans les villes comme dans les campagnes, la consommation de riz importé permet d’équilibrer les coûts de l’alimentation (taux de consommation du riz: 76,8% dans les régions urbaines et 44% dans les campagnes). Cependant, la substitution de la variable économique au facteur culturel n’est pas totale: les produits locaux figurent en bonne place dans les menus offerts par l’informel alimentaire. Par ailleurs, la consommation de ces féculents est plus importante en milieu rural qu’en ville: en milieu rural, 142,7% pour l’igname, 45,2% pour la banane plantain et 77% pour le manioc contre 31,5%, 52,5% et 31,2% pour les même produits en ville.
La conséquence de toutes ces contraintes à la fois internes et externes est la fuite en avant: beaucoup plus soucieux d’assainir ses finances publiques, l’Etat ivoirien se satisfait d’une politique passive en diversifiant ses sources d’approvisionnement: marché mondial, Golfe de Guinée et le Bonus Intensive Commodity Export Programm (BICEP).
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, Costa do Marfim
Le niveau des prix actuels des vivriers locaux et leur tendance à la hausse ne permettent en aucun cas une alimentation correcte de la majeure partie de la population ivoirienne. En effet, la difficulté de baisser les prix des denrées alimentaires entraîne l’élaboration de programmes sociaux pour les catégories les plus défavorisées. Mais ceux-çi étant difficiles à gérer, l’Etat choisit délibérément l’approvisionnement extérieur. Ses intérêts financiers et surtout politiques se trouvent préservés par une politique pro-urbaine. Les solutions du replâtrage portent un préjudice sans précédent à l’économie ivoirienne. Pourtant les trois plan d’ajustement structurel en Côte d’Ivoire mentionnent la politique du prix du riz parmi leurs priorités. Or, le secteur rizicole qualifié de "second miracle" fut plutôt un "second suicide" après celui des matières premières. La politique rizicole reflète les orientations politiques prises par la Côte d’Ivoire depuis 1953: un capitalisme basé sur la dépendance.
Relatório
HARRE, Dominique, IRAM, 1989 (France)
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