Quatre de ses dirigeants s’expriment sur ce thème
Marc MOUGNAN, Fidèle DJETODJIDE KANAYO
07 / 2001
Marc MOUGNAN, fonctionnaire, membre du conseil d’administration de l’ASSAILD :
"Je crois qu’en ce moment, l’ASSAILD est sur le bon chemin parce que s’occuper en même temps de crédits, d’organisation et de production faisait beaucoup de confusion. L’ASSAILD a voulu écarter tout cela et ne pas être le chef de file des paysans. Avant, quand on allait dans des réunions générales, les paysans disaient : "C’est ASSAILD qui est notre père, c’est ASSAILD qui est notre mère". On voit que ce sont des enfants qui attendent toujours de l’ASSAILD. C’est comme cela que nous avons dit : "Non, il faut les laisser faire leur chemin et quand ils n’auront plus de père ni de mère; ils vont se débrouiller".
Fidèle DJETODJIDE KANAYO, responsable de l’ASSAILD :
"Au début de l’ASSAILD, nous faisions des petits crédits aux groupements; nous n’avions pas de projet pour les groupements mais on appuyait les initiatives de groupements (dans les domaines de la production, de la commercialisation, de la construction des magasins de stockage, etc.). Nous recevions des aides et nous les donnions directement aux organisations paysannes pour réaliser leurs activités. Nous nous sommes rendus compte que les actions des groupements que nous suivons ne satisfont pas les membres de ces groupements, donc nos appuis également ne les satisfont pas."
Geneviéve PILLET, membre fondateur de l’ASSAILD :
"Parfois le contrat d’aide entre l’ASSAILD et le groupement par exemple, était signé devant tout le groupement, en présence du chef de village, etc... Mais après, ce sont deux ou trois personnes qui dirigent tout. Au départ il semblait que toutes les précautions avaient été prises pour que ce soit bien géré. L’aide peut être tout à fait retournée, les gens s’organisent autrement ou le chef ou le responsable a le droit de faire ce qu’il veut. On se retrouve peut-être dans l’influence de la chefferie alors qu’il y a une organisation de groupement de type européen, où il faut avoir un président, etc... toujours selon le même modèle. Ils font cela pour recevoir l’aide mais souvent les personnes qui ont été élues comme président ou autre sont des personnes influentes, des personnes contre lesquelles les autres ne peuvent pas vraiment réagir. Les responsables paysans, il y en a qui font ce qu’ils veulent, qui n’en font qu’à leur tête, qui gèrent mal ou qui décident sans la base. Et "leur base" ne réagit pas. C’est cela qui nous désoriente le plus. Souvent, on sait que tel président a "bouffé", comme on dit, on sait qu’untel a profité de ceci ou a fait cela, mais il reste respecté ou il reste à son poste. Les gens ne vont pas tellement le critiquer, en tous cas ouvertement ou en assemblée. Il y a peu de réactions ; cependant, cela commence. Mais dans un tas de groupements ce n’est pas le cas. Surtout ce qui manque, c’est qu’il n’y a pas de contrôle interne : celui qui gère, souvent, est tout seul à gérer ou bien c’est le président et le trésorier qui décident à deux des dépenses etc... et c’est difficile d’avoir un contrôle de cette gestion-là. Cela forme vite un petit groupe qui, pour finir, a tous les pouvoirs. Certains cependant vont réagir, par exemple en n’acceptant pas de rembourser à la place des autres par exemple ; il y a des façons détournées de faire savoir son opinion."
Zambo DJERALAR, Responsable du Service de Production à l’ASSAILD :
"Les gens, quand ils se mettent en groupe, réalisent un certain nombre d’activités. Par exemple, la construction de puits, de magasins, de bâtiments scolaires ou bien de centres de santé. Cela a un sens parce qu’après tout ce sont les femmes et les enfants de ces producteurs, qui bénéficient de ces structures et c’est important. Par contre, pour les thèmes relatifs à la production par exemple, on ne peut pas mettre tout le monde ensemble et les amener à changer leur niveau de production. Les agents de l’ASSAILD faisaient du crédit et le crédit n’a pas donné les résultats escomptés. Ils donnaient des fonds aux groupements croyant que ceux-ci allaient investir dans les équipements et que cela permettrait d’augmenter la production. Or, faire des crédits de 200.000 CFA à des groupes de 10 à 20 membres, on se retrouve avec 10.000 CFA (100 FF) par personne et cela ne sert pratiquement pas à grand chose.
desenvolvimento local, organização camponesa, ONG do Sul, crédito, avaliação, corrupção
, Chade, Moundou
Ces quatre éclairages sur les défauts de la stratégie d’appui aux groupements par de petits crédits sont d’une rare précision. Cette lucidité a permis à cette ONG de réorienter sa démarche.
Quatre sources d’analyse valent mieux qu’une ! Et pour compléter ce panel, on dispose aussi des fiches établies à partir des interviews de deux des utilisateurs des services de l’ONG considérée : Barmbaye GUELMIAN (fiches GRAD n° 157 à 160) et Vincent GUELMIAN (fiches GRAD n° 121 à 124, et 127 à 130).
Entretien avec MOUGNAN, Marc ; DJETODJIDE KANAYO, Fidèle ; PILLET
Entrevista
LECOMTE, Benoît ; BENOIT, Séverine
GRAD (Groupe de Réalisations et d’Animations pour le Développement) - 228 rue du Manet, 74130 Bonneville, FRANCE - Tel 33(0)4 50 97 08 85 - Fax 33(0) 450 25 69 81 - Franca - www.grad-france.org - grad.fr (@) grad-france.org