Comment réintroduire des espèces indigènes préserver la biodiversité et faire face aux stratégies des multinationales
01 / 2000
Elkana est à l’origine de la création d’une association, Dika, dont l’objectif est la protection de l’agrobiodiversité. Elle s’appelle du nom d’une espèce de blé traditionnel, réintroduit par ses efforts. Dika s’efforce :
de préserver les espèces traditionnelles,
de susciter l’intérêt des agriculteurs pour ces espèces,
de cultiver ces espèces, également à des fins commerciales.
La réintroduction d’espèces disparues dans la période du régime soviétique exige beaucoup d’efforts et beaucoup de patience. Souvent, il est nécessaire d’entreprendre des recherches dans des banques de gènes étrangères (à Saint Petersbourg, à Quedlinbourg/Allemagne, etc.). En même temps, il faut trouver des agriculteurs prêts à tenter l’expérience : les semences sont alors cultivées pendant plusieurs années sur de petites parcelles ; parfois, elles ne se développent pas bien parce que les plantes sont peut-être dégénérées suite à une culture sous un climat inhabituel, dans un sol peu propice. Pour bien évaluer les expériences, les cultures doivent être suivies par des spécialistes.
Grâce aux efforts de Dika, notamment aussi grâce au soutien constant d’un conseiller allemand, Berhold Schrimpf, un grand nombre d’espèces indigènes abandonnées à l’époque soviétique, est aujourd’hui recultivé. Plus de 20 membres d’Elkana cultivent plus de 100 variétés de graines : des légumineuses, du blé, de l’orge... Elles sont déjà appréciées par beaucoup de géorgiens ; à la longue, elles pourront être intéressantes pour une exploitation commerciale.
Un exemple : les Géorgiens redécouvrent leur pain traditionnel qui ne réussit vraiment bien qu’avec une espèce de graine abandonnée à l’époque où tout le blé avait été importé. Et ils redécouvrent en même temps une herbe ("Macha")qui, mêlée aux graines de blé, donne un arôme spécifique au pain et permet une conservation plus longue. Avant l’époque soviétique, cette herbe était ajoutée à presque tous les pains.
Le financement du travail de Dika vient d’être assuré, pour trois ans, par Renovabis, une organisation basée à Stuttgart, en Allemagne.
Face aux stratégies des multinationales
En 1996, la multinationale Monsanto a introduit, en Géorgie, des pommes de terre génétiquement manipulées, avec l’intention de faire de la Géorgie un terrain d’expérimentation et de vendre ensuite ces pommes de terre dans les autres pays de l’Europe de l’Est. Alors le mouvement des Verts, inquiet des conséquences imprévisibles, se mobilisa contre ces projets et Elkana participa à une campagne contre l’introduction massive de ces pommes de terre, fournissant des informations sur les études en cours et sur le débat international concernant ces pratiques. Le ministère de l’Agriculture, peu informé et ravi d’attirer des investissements étrangers, tenta d’étouffer le débat. Mais Elkana réussit à trouver le soutien d’un petit nombre de délégués pour organiser un séminaire à Tbilisi, dans le bâtiment même du parlement. Il y associa le Comité pour l’environnement et de nombreux scientifiques géorgiens et obligea finalement les responsables politiques à tenir compte des problèmes non résolus concernant l’introduction peu contrôlée des plantes génétiquement modifiées. Le projet de Monsanto a échoué...
Elkana a également contribué à ce que soit limitée la culture du maïs hybride. Des groupes industriels américains avaient séduit un grand nombre d’agriculteurs avec la perspective de récoltes abondantes. Ce n’est qu’en se rendant compte qu’ils ne disposaient plus de semences que ces paysans prirent conscience des risques d’une dépendance vis-à-vis des industriels. Elkana a alors appuyé une campagne d’information sur les risques de cette dépendance, avec beaucoup de succès.
Avec ces actions, l’association ne s’est pas fait d’amis au ministère de l’Agriculture, toujours désireux d’attirer des investissements étrangers. En effet, Elkana ne peut y espérer aucun soutien. Par ailleurs, le ministère n’est pas compétent dans le domaine de l’agriculture biologique, pensant qu’il s’agit là seulement de renoncer aux produits chimiques.
Ajoutons que l’ONG a participé à l’élaboration d’une loi qui devra contrôler l’introduction d’OGM.(organismes génétiquement modifiés). Cette loi sera prochainement discutée par le Parlement géorgien.
Un patient travail d’information et de communication
Elkana développe son travail de formation et d’information en entretenant beaucoup de contacts aux niveaux national et international. A côté de l’organisation de séminaires pour agriculteurs, fonctionnaires, hommes politiques... l’association prépare des émissions à la radio et à la télévision et publie des articles dans différents journaux.
Le financement d’Elkana provient, en majeure partie, de trois organisations allemandes : Diakonisches Werk, Misereror, EZE, mais aussi de TACIS, de CORDAID et du FoE ("Know-how-Fund", Royaume-Uni)
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, Geórgia, Tbilisi
Ces actions montrent ce que peut faire une petite association avec peu de moyens face à des géants industriels. Sa force réside dans la motivation des membres, dans un certain soutien de la population (mais qui n’est pas constant et qui doit être gagné par des efforts continus)et dans le soutien d’un réseau d’amis d’autres pays.
Contact : Elkana, Biological Farming Association, Delissi III, nakveti N16, 380077 Tbilisi, Georgia - Tél. : (995 32)53 64 84 - Fax : (995 32)53 64 84 - elkana@access.sanet.ge
Entretien avec JORJADZE, Mariam; DUNDUA, Tamaz; DIASAMIDZE, Astma
Entrevista
Dépliants distribués par Elkana.
CEDIDELP (Centre de Documentation Internationale pour le Développement les Libertés et la Paix) - 21 ter rue Voltaire, 75011 Paris, FRANCE - Tel 33 (0) 1 40 09 15 81 - Franca - www.ritimo.org/cedidelp - cedidelp (@) ritimo.org