De jeunes ouvriers refusent de verser des dessous de table pour gagner des marchés publics
02 / 2001
Bargny est une commune de la région de Dakar qui compte 50.000 mille habitants. L’activité dominante y est la pêche. Comme dans toutes les communes du Sénégal, le chômage des jeunes et l’existence d’une jeunesse déscolarisée (un taux d’échec scolaire supérieur à 70 pour cent)sont une véritable épine pour les pouvoirs publics et les familles. Pour assurer l’avenir de leurs enfants, certaines familles les envoient apprendre des métiers comme la mécanique, la maçonnerie ou la menuiserie. Mais l’obtention d’une qualification pour ces jeunes n’est pas synonyme d’accès au marché du travail car dans ce secteur, la concurrence est rude face aux grands entrepreneurs qui gagnent systématiquement tous les marchés de la commune. Souvent l’octroi de ces marchés se fait dans des conditions peu claires et pour espérer les gagner il faut disposer de solides appuis dans la municipalité et être capable d’offrir des commissions à des agents de l’administration. Face à ces difficultés, de jeunes ouvriers créent en 1994 l’Amicale des Jeunes Ouvriers de Bargny (AMJOB). Ce sigle résulte d’un jeu de mot qui signifie ’ avoir du travail ’ : ’am’ (’avoir’ en langue nationale wolof)et ’job’ (’travail’ en anglais). Cette association se fixe pour objectifs de lutter contre le chômage des jeunes, d’aider les jeunes ouvriers à se perfectionner, de former d’autres jeunes ouvriers et d’influer sur les décisions municipales pour ce qui concerne les chantiers ouverts dans la commune.
AMJOB, qui dispose d’un siège fonctionnel, a réussi à perfectionner plus de 150 chefs d’ateliers- entrepreneurs, dans les domaines de la confection de plans, de la comptabilité, de la menuiserie etc. De plus elle a mis en place une mutuelle de santé pour les ouvriers.
Parallèlement elle a créé un consortium AMJOB composé de tous les corps capable de répondre aux appels d’offre municipaux et de réaliser les ouvrages, notamment l’entretien du patrimoine bâti. Mais, conscients qu’une telle démarche serait difficile, les créateurs d’ AMJOB ont signé une convention avec la commune qui permet à celle-ci de disposer à coûts réduits de l’expertise des membres du consortium, notamment dans la rénovation des salles de classe, la confection de tables-bancs, l’aménagement de terrains de sport etc. Là où les grandes entreprises réclament des sommes importantes, AMJOB se suffit d’un minimum qui est réparti entre les ouvriers ayant réalisé le chantier. De plus, AMJOB, exhorte ses membres qui sont de petits entrepreneurs à s’acquitter des taxes municipales.
Cette démarche a rapproché AMJOB de la mairie qui est très heureuse d’avoir des entreprises aussi performantes à faible coût. Ainsi AMJOB est consultée par le maire et a ses entrées dans la municipalité, ce qui a permis de mieux cerner les rouages de l’administration municipale et de comprendre les pratiques en cours dans l’adjudication des marchés publics. De plus, elle a gagné l’estime des populations à qui elle a démontré pratiquement qu’il est possible de réaliser de grands chantiers à des coûts réduits. Néanmoins, les gros marchés sont toujours confiés à des entreprises étrangères capables de verser des dessous de table et AMJOB refuse de s’insérer dans ces pratiques. AMJOB inscrit son action dans le long terme, car ses créateurs sont conscients que le combat pour la transparence et contre la corruption est long.
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, Senegal, Bargny
Fiche réalisée dans le cadre du Séminaire de formation DPH du Collège des Jeunes du chantier Dialogues sur la gouvernance en Afrique de l’Ouest, les 04 et 05 Novembre 2000 à Rufisque.
Contact : CISSE MBACKE, Falilou, animateur national pour le Sénégal, BP 321 Rufisque. Tel (221)836 00 78 - falilou@poinnet.sn ; AMJOB, siège social: Maison des ouvriers, immeuble Ndioufène, Tel: (221)836 47 57
Relato de experiencias ; Texto original