Trois expériences dans le Nordeste au Brésil
03 / 1996
Cette communication porte sur la participation des organisations de producteurs aux processus municipaux de décision à partir de l’étude de trois cas typiques de l’agriculture familiale nordestine : Juazeiro et Pintadas dans l’Etat de Bahía et Tauá dans l’Etat du Ceará.
La planification du développement à l’échelle municipale pose quelques problèmes. Le plus important est certainement la dimension trop vaste du " municipe ", dont la taille peut atteindre celle d’un département français. Pourtant, les politiques récentes mettent l’accent sur la municipalisation des services, invoquant que le " municipe " est un espace d’exercice de la démocratie, que c’est l’unité politico-administrative de base, que c’est un espace d’expression et de participation des populations rurales aux décisions et que cet espace constitue l’unité appropriée pour la mise en place d’opérations de développement. Un autre problème est lié à l’organisation des producteurs.
Par ailleurs, la question de la planification doit être envisagée dans sa définition, son rayon d’action et ses limitations. La planification consiste dans " l’organisation et la distribution des ressources disponibles afin d’assurer la réalisation d’un objectif précis ". Elle suppose donc des choix prioritaires en matière d’affectation de ces ressources. L’échelle d’action devra concerner le territoire municipal ou bien un secteur d’intérêt général (infrastructures, zone de cultures pluviales); elle devra compter sur des acteurs ayant une représentation au niveau municipal et recevoir la collaboration de services asministratifs de cette instance. Les conditions des interventions dans le secteur du développement rural se heurtent à la spécificité de l’agriculture, dépendante du milieu naturel, à l’absence, dans le Nordeste, de tradition participative dans l’administration municipale et aussi de structures socio-professionnelles à cette échelle, à des organisations fictives créées pour capter des financements attribués à des collectivités et, d’une manière plus générale, à la difficulté du transfert de fonctions de l’Etat fédéral aux " municipes ", sachant que leur budget reste limité et que les organismes publics d’assistance technique sont inadaptés. Parmi les limitations, il faut compter aussi que la planification devrait rompre avec les pratiques traditionnelles telles que le clientélisme, le paternalisme ou l’assistancialisme.
Cette étude comparative considérait les conditions d’implication des familles productrices et des travailleurs ruraux dans la planification municipale et les stratégies des principales catégories d’acteurs (producteurs, organisations de producteurs, responsables politiques, services techniques, institutions de développement, Eglise). Les sociétés rurales ne sont pas homogènes ; elles sont constituées de divers groupes socio-professionnels qui défendent des intérêts spécifiques.
Les critères déterminants pour l’analyse comparée sont :
- qui prend l’initiative et quelles formes de socialisation et d’appropriation du projet ;
- quelle participation de chaque catégorie d’acteurs (intérêts et stratégie);
- quel impact de l’expérience.
L’organisation des producteurs fammiliaux est une réalité incontournable dans cette région, même si la représentativité et l’autonomie de ces organisations sont variables. Le moyen le plus employé pour renforcer leur autonomie et se dégager de la tutelle, idéologique ou corporatiste, des autres acteurs (clientélisme des autorités politiques, pouvoir de l’Eglise, contrôle et assistance technique des organismes d’appui publics et privés)est de diversifier les appuis et de participer à des groupes de pression plus larges.
La qualité des alliances et des collaborations ne pourra être obtenue qu’avec la reconnaissance de l’identité propre de chacun des acteurs, qui guide ses propres stratégies, tout en partageant des préoccupations communes (les populations rurales peuvent s’intéresser aussi aux aménagements urbains). Le discours actuel sur la nécessité d’un partenariat entre les organisations de producteurs et les autres acteurs dans la planification et la gestion des projets n’entretient-il pas un mythe ? L’état actuel des rapports entre les populations rurales nordestines et les instances politico-administratives, imprégnés de clientélisme, d’assistancialisme, voire d’asservissement, ne permettent pas d’envisager une participation populaire effective à la planification du développement.
Dans les trois cas, l’action de recherche-développement a permis de produire des références, d’introduire des innovations techniques, sociales ou institutionnelles et d’élaborer des méthodes et outils d’analyse de la situation. Les dynamiques agraires évoluent très vite : il est donc essentiel de travailler en temps réel. Chacune des expériences étudiées a abordé le processus de planification d’une manière particulière. Le suivi des activités mises en place peut aider à leur évolution, en même temps qu’à la conception de nouveaux programmes. Dans tous les cas, le préalable de l’organisation des producteurs est fondamental, de même que la socialisation des informations.
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, Brasil
: Le développement municipal dans le Nordeste du Brésil soulève bien des problèmes. La taille du " municipe " n’est pas le moindre, mais il ne faut pas négliger la capacité des organisations rurales de se constituer en groupe de pression, même si elles sont loin de pouvoir s’imposer comme de véritables partenaires de la planification du développement.
: Colloque " Agriculture paysanne et question alimentaire ". Chantilly, 20-23 février 1996.
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