Comment animer une rencontre sur un thème complexe avec une personnalité connue
12 / 1998
Le colloque interlatin sur la " pensée complexe ", regroupant des participants de l’Amérique du Sud (surtout le Brésil et l’Argentine)et de pays méditerranéens (surtout l’Italie, l’Espagne et la France)de langues latines, s’est tenu durant quatre jours à Rio-de-Janeiro, en septembre 1998. Ce colloque était soutenu par l’Unesco et la Fondation FPH.
La référence au concept de " pensée complexe ", développé par Edgar Morin (et qui consiste à ne pas découper les champs de la connaissance et de la réflexion, mais à tenter de relier des éléments qui se retrouvent à travers divers champs)était au centre des orientations de ces journées. Il se trouve que les questions de la pensée complexe intéressent tout particulièrement les pays de l’Amérique du Sud, pour la raison suivante : ils sortent souvent d’un système politique dictatorial pour passer à un système plus ou moins démocratique et sont donc intéressés par tout type de confrontation entre des modalités diverses de fonctionnement. D’autre part, ces pays, ayant au-dessus de leur tête le poids de l’hégémonie économique (voire culturelle)des Etats-Unis d’Amérique, sont mûrs pour acquérir une autre forme de pensée. Bref, la pensée complexe.
Organisée par l’Association de la Pensée Complexe (Paris)et l’université Candido-Mendez (Rio), la manifestation avait comme objectifs de rassembler des gens qui, dans leur discipline, ont déjà réfléchi au concept de complexité. Le public était constitué d’une cinquantaine de personnes, intervenants de diverses origines et étudiants de Rio.
Les journées se déroulaient selon deux modalités :
- les plénières (en espagnol, portugais-brésilien et français)avec des conférences de philosophes et de sociologues pour la plupart ;
- les ateliers, qui ont été trop limités dans le temps, se déroulaient uniquement en espagnol.
Cette manifestation était très fortement centrée sur la pensée " complexe " d’Edgar Morin et s’est déroulée d’une manière assez universitaire. L’un de ses aspects les plus positifs était sans doute l’impulsion que pouvait donner à de jeunes chercheurs une connaissance plus approfondie du thème des journées.
Pour Yves de Bretagne, qui représentait la Fondation à cette rencontre, les journées de Rio peuvent servir avant tout de déclic : la modification de la pensée n’interviendra que si elle est passée en premier lieu dans le domaine éducatif. D’où l’idée d’ouvrir dans l’Alliance un chantier " éducation ". Un nouveau rythme pourrait ainsi être impulsé à ce qui est en cours de réflexion à propos de l’éducation.
Les incidences d’un thème central : Même s’il est riche et bien développé, un thème central (ici, un concept, la pensée complexe)ne peut réellement alimenter la force d’une rencontre que s’il se trouve en prise avec des forces d’action, soit que celles-ci soient présentes et exprimées par les intervenants ou les participants, soient qu’elles soient clairement dégagées des propositions académiques ou généralistes.
Les incidences d’une " vedette " : S’il est intéressant qu’une personnalité intellectuelle, sociale ou politique soit au cour d’une rencontre, le danger de la starification est toujours là. Des garde-fous sont donc à trouver pour que la " vedette " en question soit avant tout à l’écoute de son public. Pourquoi ne pas commencer par des questions du public, puisque beaucoup de participants connaissent déjà la " pensée du maître " ?
L’équilibre intervenants/public : En amont, il est important que la structuration des journées soit équilibrée, en particulier dans la relation entre les conférences et les ateliers, mais à condition que le choix des organisateurs soit respecté sur place par des modérateurs exigeants sur le respect de ces équilibres. Le tenant d’un titre, quel qu’il soit, ne doit pas se permettre de dépasser un temps imparti par les organisateurs.
Réflexion et action : Lorsque le thème de rencontres est conceptuel, le risque est naturellement grand que les interventions et les fruits de la rencontre demeurent théoriques. Une solution pourrait être une préparation d’un tel colloque par les organisateurs en suscitant des propositions d’informations vécues et proches du sujet, des interrogations autour du thème, s’appuyant sur des expériences. Celles-ci seraient soumises aux intervenants quelque temps avant le colloque, voire le jour-même (on pose bien des questions dans la salle, en direct...).
Avant tout colloque ou rencontre de ce type, un forum on line pourrait être ouvert (ou tout autre type de boîte aux lettres), où se confronteraient déjà exposés d’actions et d’expériences d’une part et réflexions théoriques sur le sujet d’autre part. Cela peut devenir un bon exemple de complexité : celle de l’action et de la réflexion.
Cette fiche a été réalisée à partir d’un entretien avec Yves de Bretagne.
Entretien avec DE BRETAGNE, Yves
Entrevista
(France)
FPH (Fondation Charles Léopold Mayer pour le Progrès de l’Homme) - 38 rue Saint-Sabin, 75011 Paris, FRANCE - Tél. 33 (0)1 43 14 75 75 - Fax 33 (0)1 43 14 75 99 - Franca - www.fph.ch - paris (@) fph.fr