« Il apparaît que les villes ont été pensées avec une vision assez étroite où la société plurielle et son caractère sexué ne semblaient pas faire problème. » Cette réflexion de Monique Minaca, architecte et urbaniste, est-elle toujours actuelle ? Et comment se réfère-t-elle au concept du développement durable ? Peut-on parler d’une qualité spatiale, d’une architecture, d’une organisation de la cité différente si elle comprenait une perspective de genre ? C’est à dire si les expertises et objectifs portés par les femmes étaient pris en compte ?
Expertise des femmes et développement durable
Les femmes possèdent souvent une forme « d’expertise » plus directe et plus constante face au maldéveloppement. La sécurité, la qualité de l’eau et de la nourriture relèvent de leurs préoccupations quotidiennes ; il en est de même de la qualité de l’air et des conséquences des dégradations des éléments vitaux sur la santé, car ce sont en premier lieu les femmes qui s’occupent des enfants et des personnes âgées plus fragiles aux agressions toxiques. Leurs fonctions d’éducatrices au sein de leur famille en font des actrices privilégiées des transformations nécessaires.
Les femmes, les enfants et les hommes utilisent les villes de façon différente et rencontrent donc des problèmes différents. Les femmes s’occupent tout particulièrement des questions de sécurité personnelle, de la présence d’infrastructures et de détails dans la conception des bâtiments et des espaces, notamment dans les quartiers résidentiels, pour les édifices publics, dans les zones commerciales et au centre ville.
Les femmes empruntent aussi plus souvent les transports publics ; des statistiques indiquent qu’elles préfèrent le train aux transports routiers. Il est probable qu’elles adopteraient plus facilement des alternatives à la voiture individuelle si elles prenaient plus part aux décisions en matière de transport.
Des femmes en Europe transforment les villes - quelques exemples récents
En ALLEMAGNE, le « réseau des femmes pour la protection de l’environnement » (FrauenEmweltNetz), a organisé, en mars 96, une rencontre avec l’objectif de faire connaître l’Agenda 21 et de développer des stratégies pour intégrer plus de femmes. Il fut constaté que souvent les femmes participaient en grand nombre aux groupes de travail et aux forums sur le développement durable mais que leurs intérêts spécifiques n’étaient thématisés nulle part. Depuis, il y a eu un certain nombre d’initiatives intéressantes qui permettent de mieux intégrer la perspective du genre dans les décisions politiques.
A HEIDELBERG, le maire a lancé au niveau local une série d’ateliers sur l’urbanisme destinés spécifiquement aux femmes, qui leur offrent la possibilité d’analyser leur vie quotidienne et de définir les conditions de leur bien-être. Ils proposent une structure d’accueil pour les enfants et leurs horaires correspondent aux exigences des femmes qui ont des enfants à charge. Cette forme de participation a permis de mieux cerner les intérêts et les demandes des femmes. Les réflexions ont abouti à la tenue de deux nouveaux marchés hebdomadaires, à la promotion de produits régionaux, à la transformation de zones de circulation et de places de stationnement en terrains de jeux pour les enfants, à des mesures permettant de faciliter la circulation des bicyclettes, ainsi qu’au renforcement de la sécurité au niveau local et dans les quartiers. « En intégrant le projet dans le concept global de la planification locale de chaque quartier de Heidelberg, ce sont tous les aspects du développement des quartiers qui tiennent compte des intérêts des femmes. Il s’agit là d’une évolution importante permettant de nous assurer qu’à l’avenir les demandes des femmes seront systématiquement prises en compte », écrit Beate Weber, maire de Heidelberg.
A BAMBERG (également en Allemagne), le « forum des femmes » réunit les déléguées des différents partis politiques et des associations ainsi que des femmes non membres d’une organisation. Il a réfléchi, en coopération avec l’instance chargée de la non-discrimination, pendant plus d’un an et demi sur le thème : la ville - cadre de vie pour les femmes. Les résultats de nombreuses enquêtes, de réunions dans les quartiers et d’entretiens, les propositions concrètes qui en résultent, ont été publiés dans une brochure adressée à la Ville. Les médias locaux ont très attentivement accompagné ce travail qui a contribué de façon décisive au lancement d’un Agenda 21 local. Le forum des femmes accompagne les démarches qui y sont liées et veille à y intégrer de façon continuelle les intérêts spécifiques des femmes.
Aux PAYS BAS, le travail du groupe « Les femmes testent leur cadre de vie », créé en 1994 en tant que commission du ministère du logement, de l’aménagement du territoire et de l’environnement, a abouti à la création de 30 sections dans quatre régions néerlandaises. Les réussites à mettre à l’actif de ces groupes sont nombreuses. Par exemple : ils sont à l’origine des « Meldpunten », des bureaux régionaux où les habitants peuvent témoigner des malaises liées à la pollution atmosphérique, aux bruits etc ; les informations recueillies y sont aussitôt analysées et transmises aux autorités compétentes.
En SUEDE, le projet « Femmes - Compétences - Transports publics » a eu comme objectif d’améliorer les moyens de transport pour tous les usagers. Il a été lancé en 1995, parce que des recherches montraient clairement que la plupart des responsables chargés de prendre les décisions concernant la structure et l’infrastructure globale des transports étaient des hommes, tandis que la majorité des clients étaient des femmes. Ce projet qui fut appuyé par la Fédération des conseils nationaux suédois, l’Association suédoise des autorités locales et l’Association suédoise des transports publics a permis de recueillir des observations intéressantes sur les différences entre la façon de voyager des femmes et des hommes, la longueur et le but de leurs déplacements. Il a abouti à la formulation d’une politique des transports publics complètement renouvelée.
Au ROYAUME UNI l’association « Gender 21 », fondée après le sommet des femmes à Pékin en 1996, a lancé de nombreuses initiatives pour sensibiliser les femmes britanniques à l’Agenda 21 : organisation d’une table ronde rassemblant plus de 300 groupes de femmes afin de préparer des actions de lobbying pour le développemet durable, enquêtes nationales, organsiation de conférences… Gender 21 veut oeuvrer « pour une forme holistique, harmonieuse et humaine de développement durable. »
desenvolvimento sustentável, planejamento urbano, mulher, democracia participativa
, Europa
Villes et développement durable : des expériences à échanger
Expériences de démocratie participative
Association Groupe Cadre de Vie, Monique Minaca, 60 Av. Jean Jaurès, 92190 Meudon, Tél +33 1 45 34 27 17, fax +33 1 46 23 18 68, email minaca@wanadoo.fr ; pour les expériences en Allemagne : FrauenUmweltNetz, tel + 49 69 74 07 57, email : umweltnetz@fem-f.rhein-main.de ; pour les expériences aux Pays Bas : Jacqueline Kuhn, Institut pour le public et la politique, tel 31 20 521 76 00, fax : 31 20 638 31 18; pour la Suède : Lise Warsen, Institut de Recherches sur les Transports, tel + 46 8 652 41 30, fax : + 46 8 652 54 98 ; pour le Royaume Uni : Angela Mawle, Gender 21, tel + 44 117 922 44 88, fax : + 930 43 80
Artigos e dossiês
MINACA, Monique, BOOTH, Christine, Commission européenne, DG X in. Les cahiers de femmes d’Europe, (Belgique), 4-22, Frauenblicke auf die Lokale Agenda 21, mars 1996, ed. Life e.V. FrauenUmweltNetz, Urbanisme n°302, sept/oct 1998
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