De quoi les partenaires peuvent-ils décider ensemble? A quelles conditions et jusqu’où? Quelle maîtrise des processus de décision? Quels palliatifs aux remises en cause des engagements pris?. Sinon des réponses, des pistes de réflexion sont issues de l’expérience :
- Le concept de partenariat conçu comme une cogestion, s’il trouve sa concrétisation dans des situations de terrain, ne peut être formalisé à l’excès. Ce type de pratique, mis en oeuvre à un moment particulier de la gestion d’un patrimoine, la réhabilitation, paraît malaisé à assumer tout au long d’une gestion quotidienne. Les divergences d’opinion susceptibles de s’affirmer au-delà d’un consensus ponctuel le mettraient en difficulté. Les nouveaux usages adoptés lors d’une opération de réhabilitation doivent cependant favoriser, une fois cette période achevée, une permanence de la concertation.
- L’effort doit porter sur la clarification des règles du jeu de la négociation. L’affichage par le propriétaire bailleur des points de passage obligés de son action, qu’il s’agisse de politique patrimoniale, des contraintes financières ou des marges de manoeuvre possibles (qu’elles dépendent ou non d’agents extérieurs)en est la clé.
- Plus que des limites de la décision, c’est la non-décision qui fait problème: comment faire en sorte que les initiatives soient prises à un moment donné, selon des délais déterminés, par des responsables mandatés d’après une réelle déconcentration des pouvoirs?
- La remise en cause de projets où les résidents se sont fortement et longtemps investis fait peser des risques de démobilisation. Les associations sont relativement démunies face à cette situation. Il convient d’assurer les conditions d’une inscription effective dans le temps des actions menées en commun; pour que leur pérennisation s’impose aux successeurs.
Représentation/représentativité: une problématique malaisée pour les institutions comme pour les groupes de résidents.
-Pour les premières, en effet: avec qui engager le dialogue? Faut-il aider les habitants à se structurer en associations et faut-il aider celles-ci à renforcer leur représentativité? Faut-il faire de cette représentativité un préalable au processus d’échange? Comment gérer les divergences d’intérêt qui peuvent exister au sein de la population? etc.
- Pour les seconds: comment mobiliser les habitants? Comment asseoir la qualité de porte-parole? Comment s’autoriser à parler et au nom d’un ensemble? Comment gérer la relation avec les groupes d’habitants? etc.
- Comment s’exerce la représentation de l’ensemble du partenariat: logeurs, acteurs sociaux, élus, etc.?
Ce sont là autant d’interrogations qui, sur le terrain, ne trouvent pas aisément de réponses.
- L’expérience semble mettre ceci en lumière: l’inversion d’une situation de blocage s’amorce dès lors que se modifie le jugement que l’on porte sur la potentialité des habitants à se constituer en « partenaires ».
Or, deux hypothèses sont ici à lever: celle qui vise à n’entretenir le dialogue avec les associations que si elles sont représentatives en nombre d’adhérents; celle qui constitue à ne parler qu’aux associations de locataires et non aux groupes de résidents. Pour la réussite d’une réhabilitation, c’est justement avec ceux-là mêmes (peu ou mal organisés)qu’on estime peu aptes au débat qu’il convient d’enclencher une dynamique d’échange.
- La question représentation/représentativité perd de son acuité lorsque le logeur est poussé par la nécessité en cas de situation bloquée. Il se verra contraint d’aller vers ceux « qui sont là » ou devra provoquer l’émergence d’un groupe avec qui dialoguer.
- La représentativité en nombre d’adhérents n’est qu’un critère relativement pertinent. Il en va différemment lorsqu’on envisage sous l’angle de la capacité à prendre en compte une population dans sa diversité, ou encore celle à globaliser les problèmes et à appréhender la multiplicité des intérêts et non pas défendre les intérêts exclusifs. Les associations qui ont pris la mesure de cet enjeu doivent ajuster leur fonctionnement (abandon des préjugés vis-à-vis de certaines catégories, constance de l’écoute, renouvellement des membres, démarche collective, etc.).
En contrepoint des négociations collectives, la responsabilité du maître d’ouvrage est aussi engagée dans une écoute des paroles plus particulières.
- Le mode de fonctionnement des différentes institutions appelées à agir en partenariat se voit mis en question: on trouve là aussi des divergences d’intérêt, des compétences au dialogue très variables. L’exercice du partenariat peut être occasion d’une remise en cause pour une évolution, tandis qu’on interroge aussi le principe de décentralisation des pouvoirs de décision.
Lorsque les partenaires se sont « reconnus » comme interlocuteurs, le travail en commun peut débuter. Il comporte une dimension stratégique de taille: faire en sorte qu’aucune des parties en présence ne soit perdante dans l’échange qui s’établit.
Se voient posées ici les questions de la compétence de l’usager et de son exercice. Qu’en est-il de leur articulation concrète avec le savoir technique?
Deux éléments fondamentaux sont à rappeler, propres à alimenter la réflexion:
-la première compétence de l’usager tient dans le pouvoir de dire non, soit de façon radicale et violente, soit en opposant la passivité, jusqu’à ce que ce silence devienne insupportable aux institutions. La volonté de non-savoir d’habitants non reconnus constitue en soi un droit, mais elle est aussi l’expression d’un dysfonctionnement;
-la compétence de l’usager n’est pas de l’ordre de la production du service, mais de l’ordre de sa consommation.
Pour permettre aux usagers d’exercer leur compétence, des moyens sont à mettre à leur disposition afin d’assurer l’équilibre et la complémentarité de la négociation de l’acte de partenariat: des moyens financiers affectés aux associations pour le fonctionnement, la formation , le recours à des conseils extérieurs. Une telle formule, pour certains, n’est pas sans risques, dont celui de voir les associations s’institutionnaliser et rompre ainsi leurs liens avec les habitants.
Au besoin d’une certaine technicité de la part des représentants des résidents est associé le problème du langage à adopter entre partenaires. Le langage des techniciens doit pouvoir être retransmis aux habitants « non représentants » qui se trouvent démunis devant des choix à faire. Cela suppose, en contrepartie, l’adaptation des techniciens au public auquel ils s’adressent.
Le repérage des compétences parmi les habitants, qui se caractérisent par de multiples savoir-faire non utilisés, revêt également une grande importance. La capacité à repérer et faire émerger ces potentialités mérite d’être développée.
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, Franca, Provence-Alpes-Côte-d’Azur
On pourrait ajouter que, quand on en est à s’interroger sur les limites de la décision, c’est que déjà l’acceptation est faite de la partager, que l’acceptation d’abandon de pouvoir dans une certaine mesure est amorcée. Si ce chemin est déjà parcouru…L’on sent bien qu’au delà de l’affichage nécessaire des processus de décision (la transparence)c’est bien leur maîtrise qui fait problème. Force est de constater que bien des questions restent en suspens, dont l’exemple d’une seule suffit à montrer la complexité : les habitants peuvent-ils, et jusqu’où, participer à la décision en matière de politique de peuplement des quartiers ?
Cette fiche a été réalisée dans le cadre de l’évaluation de la politique de réhabilitation du logement social, animée par la Direction de l’Habitat et de la Construction du Ministère de l’Equipement, du Logement et des Transports, Arche de la Défense, Paroi Sud, 92055 Paris-La Défense Cedex 04
Literatura cinzenta
COUDRY, Béatrice, DIRECTION REGIONALE DE L’EQUIPEMENT PROVENCE ALPES COTE D’AZUR (DRE PACA), ATELIER REGIONAL RENCONTRE REHABILITATION PACA
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