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Etats pluri-ethniques et/ou pluri-linguistiques

Quelques exemples de traitement des droits politiques

Claudio CRATCHLEY

04 / 1998

Selon le critère de la territorialité, sont soumis à la loi les hommes qui se trouvent dans les limites d’un territoire. Selon le principe de la personnalité, en revanche, la loi s’applique aux hommes ayant une certaine qualité attachée à leur personne, où qu’ils se trouvent. Si en Suisse l’ordre confédéral est généralement dominé par le principe de la territorialité, aussi bien en matière électorale qu’en matière linguistique, d’autres formes d’organisation interne d’un État pluri-ethnique ou pluri-linguistique ont été non seulement imaginées, mais aussi tentées dans d’autres lieux : c’est le cas, notamment, de l’Empire austro-hongrois avec le compromis morave de 1906, et celui de Chypre, avec la Constitution de 1960.

En 1867, un système assez complexe de décentralisation (relative)du pouvoir et de représentation politique des nationalités voit le jour avec l’instauration de la monarchie constitutionnelle en Autriche, qui consacre en même temps le dualisme austro-hongrois. Non seulement l’emploi des langues, y compris en matière scolaire, est réglé généralement selon le principe de la personnalité, mais celui-ci s’applique également dans le système électoral de quelques provinces de l’Empire, avec la création de corps électoraux distincts selon l’appartenance nationale ou confessionnelle de chacun. Instauré d’abord en Moravie (1906), ce régime sera étendu ensuite à la Bukovine (1910), avec la formation de quatre classes d’électeurs selon la nationalité (allemands, ruthènes, roumains et polonais), et à la Bosnie-Herzégovine (1911), avec, dans ce dernier cas, des subdivisions englobant les électeurs catholiques, orthodoxes ou musulmans.

La Constitution cypriote de 1960 est empreinte du dualisme gréco-turc qui caractérise la population du pays au moment de l’indépendance, avec un régime que l’on a pu qualifier de "fédéralisme personnel". L’article 2 en énumère les critères d’appartenance aux communautés grecque et turque, et plus de cinquante articles règlent les droits de chaque communauté, de ses membres, ou définissent les pouvoirs de ses représentants. Les Grecs seuls élisent le président de la République ; le vice-président est choisi par les Turcs. Grecs et Turcs élisent séparément leurs députés à la Chambre, qui, séparément à leur tour, en désignent le président (grec)et le vice-président (turc). Ce clivage se reflète jusque dans les plus hauts organes de l’État.

La question des droits politiques des étrangers en droit international et droit interne est abordé à travers les exemples de l’Argentine, de l’URSS et, en particulier de la Suisse, avec l’étude des droits politiques des Suisses de l’étranger en matière fédérale et cantonale, ainsi que les droits politiques des ressortissants d’un canton domiciliés dans un autre canton.

Si le principe de la territorialité est nécessaire à l’équilibre interne de la Confédération, l’auteur se demande néanmoins s’il ne conviendrait pas de faire une exception dans certains cas particuliers de scrutin d’autodétermination, en évoquant non seulement le cas de la Suisse, mais aussi certains exemples étrangers : la Prusse orientale, la Haute-Silésie et la Sarre après la Première Guerre mondiale.

Palavras-chave

descentralização, multilinguismo, eleição, autodeterminação dos povos, dereito de voto, Estado federal, minoria ética


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Comentários

Étude des rapports entre État, territoire et droits politiques, cette thèse de licence et de doctorat de droit donne une place importante à l’analyse des systèmes d’organisation territoriale et de représentation politique des citoyens dans des États pluri-ethniques, pluri-linguistiques ou pluri-nationaux. L’exemple de la Suisse, comme confédération d’États souverains, est bien sûr central dans la démonstration de l’auteur. Mais l’aspect le plus intéressant de l’ouvrage est peut-être l’analyse des exemples d’autonomie personnelle dans l’Empire austro-hongrois et de fédéralisme personnel à Chypre.

Le système d’autonomie personnelle instauré en 1906 en Moravie a fonctionné de manière assez satisfaisante, amenant un apaisement certain entre Tchèques et Allemands. La Grande guerre ayant éclaté quelques années plus tard, l’expérience aura été malheureusement trop courte pour permettre de dégager des enseignements d’une portée plus générale. Le système cypriote de fédéralisme personnel, en revanche, n’a jamais véritablement fonctionné, et la Constitution de 1960 s’est révélée totalement inapplicable. On connaît la fin tragique de l’expérience en 1974.

L’auteur a sans doute raison lorsqu’il considère que la structure interne de l’État, et l’auteur omet, hélas, d’apporter la démonstration théorique de cette différentiation entre ethnie et nation, à partir de laquelle il déduit des droits politiques très inégaux entre l’une et l’autre. Beaucoup de mouvements de libération nationale ont une base ethnique ; ils conçoivent leur ethnie comme étant un peuple et une nation, laquelle, par ailleurs, est souvent "autochtone" par rapport à la population ou l’État dominant. Poussée jusqu’au bout, cette logique impliquerait que les Kanaks, du fait d’être, de point de vue culturel, une "ethnie", "autochtone" de surcroît, devraient se contenter de l’autonomie ; autrement dit, ils n’auraient pas le droit de devenir, du point de vue politique, une nation.

Notas

C.Cratchley est un sociologue chilien, spécialiste des questions touchant les minorités ethniques.

Fonte

Artigos e dossiês

CAVIN, Jean François, Territorialité, nationalité et droits politiques, Centro de Estudios y Documentación Mapuche Liwen in. Liwen (Chili), 4

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