02 / 1998
Les membres du Réseau de l’Economie Alternative et Solidaire (REAS), individus, associations et entreprises, partagent des valeurs communes fondées sur le res pect d’autrui : solidarité, autonomie, égalité, partage. Ils s’engagent dans une démarche économique qui n’a pas pour souci premier la rentabilité mais vise d’abord à recréer les conditions d’une cohérence sociale. Dans un contexte où les limites ou les impasses des réponses traditionnelles se font durement sentir, le REAS présente des réponses novatrices en vue d’une économie de développement durable : ses actions interpellent la notion de progrès et introduisent les facteurs de responsabilité vis-à-vis des intérêts de la vie sur terre, les droits des exlus et des générations futures. L’ambition est "d’aller aussi loin que faire se peut avec les potentiels de changement et de transformation présents dans la population, de les catalyser en dynamiques et de les faire admettre comme amorces de propositions globales." (Aline Archimbault, présidente du Conseil de Surveillance du REAS)
En 1992, le REAS s’est constitué en Société Anonyme à statut coopératif. Il se compose de 70 structures locales et thématiques, d’une centaine de correspondants et relais locaux et d’environ 80 clubs d’investisseurs essaimés sur l’ensemble du territoire français. Il n’y pas de centre diffusant une orthodoxie théorique, ni d’appareil coûteux. Les membres qui souscrivent à la Charte du REAS paient une somme modique de cotisation par an et participent aux diverses activités bénévoles et d’échange.
Les promoteurs de l’économie solidaire se connaissent de près ou de loin, ce qui permet un travail très efficace. "Au début des années 80, nous étions à la phase du prototype. A la fin des années 80, nous sommes passés au stade de mouvement. Il faut maintenant que nous devenions un véritable secteur économique", affirma Jacques Archimbaud, président du REAS, lors du dernier colloque du réseau, en automne 1997. Les projets ne manquent pas. Le REAS traite environ 5.000 dossiers par an.
Quelques exemples actuels :
- un couple de jeunes chômeurs, enfants d’agriculteurs, rêvent de retourner à la campagne pour réaliser un projet d’élevage traditionnel. Ils s’adressent au Pôle Local d’Economie Solidaire (PLIE)du Val de Lorraine. Celui-ci les aide à préparer leur projet et les met en relation avec un organisme qui les accompagnera dans leurs démarches. Grâce au réseau des contacts du REAS, ils trouvent un agriculteur acceptant de leur louer une ferme. Reste à trouver le "coup de pouce financier" qui va leur permettre de démarrer leur activité dans de bonnes conditions. Un groupe local d’épargne de proximité se mobilise. Depuis juin 1997, 18 adhérents ont versé collectivement 9500 F pour un montant de prêt d’honneur (donc sans intérêts)prévu à la hauteur de 20.000 F. Le couple a pu démarrer. Le REAS lance un appel aux adhérents d’épargner 50 à 300 F pour soutenir le projet...
- à Dunkerque, l’association des ex-dockers, créée en 1996, décide de sortir de l’assistanat et se tourne vers un Pôle Local d’Economie Solidaire spéc ialisé dans le développement des services de proximité. Quatre activités sont retenues : des travaux d’entretien et de rénovation, la démolition douce avec récupération de matériaux revendus ou recyclés, la livraison de bois de chauffage aux particuliersl’ entretien et l’aménagement des espaces naturels et des friches industrielles. L’activité liée aux bâtiments s’exerce, depuis juillet 97, au travers d’une "coopérative ouvrière" (SCOP)et a déjà permis de créer 4 emplois. Celle liée au bois et à l’environnement dépend de l’association. Actuellement, une douzaine de bénévoles, anciens dockers, travaillent dans un grand hangar mis à leur disposition par le port autonome, espérant préparer leur futur emploi. Sensible à la démarche, la région Nord-Pas deCalais a accordé à l’association une subvention de 200.000 F pour deux ans.
- A Paris, un ingénieur lance "services D", une plateforme multiservice dans les tours de la Défense (grands immeubles de bureaux), dont l’objectif est d’insérer durablement des jeunes sans emploi ni qualification : ils tiendront des kiosques qui devraient être installés dans plusieurs tours et proposeront toutes sortes de services aux 120.000 salariés : entretien de vêtements, de véhicules, courses diverses, démarches administratives etc.
D’autres dossiers actuels concernent par exemple l’établissement de bistros, de restaurants et de petits commerces en milieu rural ou urbain, souvent liés à différents services d’animation. Beaucoup d’initiatives apportent des solutions microéconomiques là où les grands principes macroéconomiques sont mis en échec. Souvent pionniers, elles défrichent des secteurs porteurs d’emplois.
Pour vivre, le REAS organise des rencontres et des colloques (dernièrement en commun avec des réseaux d’Education populaire en vue d’un renforcement mutuel); il édite aussi un mensuel ("A Faire"- Lettre du REAS)avec des articles de réflexion et des exemples d’initiatives concrètes.
Après cinq ans d’actions sur le terrain, on peut dire que le REAS est reconnu en France comme un des principaux laboratoires d’innovation économique et sociale. Il vient d’ailleurs de préparer, à la demande du Ministère de l’Environnement, une enquête sur la contribution de son réseau à la création d’emplois. Bernard Perret, rapporteur général du conseil scientifique de l’évaluation des politiques publiques constate : "L’économie solidaire peut apporter une réponse pertinente à la crise du lien social en créant de nouveaux services et en dynamisant les espaces publics de proximité". Mais le problème des activités du REAS est qu’elles rentrent mal dans les dispositifs institutionnels existants. Elles visent à créer des emplois permanents ce qui ne coïncide pas avec les dispositifs d’insertion qui sont par définition provisoires. L’économie solidaire prône l’initiative et refuse la logique de l’assistanat, mais elle a besoin des pouvoirs publics pour compléter les ressources financières. Souvent, les initiatives butent sur des obstacles juridiques, pratiques ou financiers : par exemple, l’impossibilité de cumuler un revenu de transfert (RMI ou Allocation spécifique de solidarité)et un revenu d’activité. A quoi bon de tenter de créer une entreprise ou d’accepter un emploi à mi-temps si c’est pour perdre le RMI ? Elles se heurtent aussi à l’absence de statut d’entreprise à but non lucratif - il n’existe donc pas pour ces initiatives de fiscalité ni de comptabilité adaptée.
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, Franca
Villes et développement durable : des expériences à échanger
Développement économique local
Contact : REAS, 61 rue Victor Hugo, 93500 Pantin,Tél + 1 49150403, Fax + 1 49150414. Cigale (Club d’Investisseurs pour une Gestion Alternative et Locale de l’Epargne): groupe de particuliers qui mettent en commun leur épargne et gèrent collectivement son utilisation.
Entretien avec PHILIPSON, Adrien
Entrevista
* article dans Le Monde du 03/02/1998; * dossier économie du périodique "A faire"- Lettre du REAS N° 47, décembre/janvier 1998
CEDIDELP (Centre de Documentation Internationale pour le Développement les Libertés et la Paix) - 21 ter rue Voltaire, 75011 Paris, FRANCE - Tel 33 (0) 1 40 09 15 81 - Franca - www.ritimo.org/cedidelp - cedidelp (@) ritimo.org