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Une histoire triste : la fin de CAPMA à Alger

Quand l’économie planifiée fait obstacle aux initiatives privées

Pierre JUDET

11 / 1996

La Compagnie algérienne de Production de Machines agricoles était, dans les années 1960, une des anciennes entreprises appartenant à des Français et qui étaient devenues des entreprises dites autogérées, sous la tutelle du Ministère de l’Industrie et de l’Energie algérien.

La CAPMA, située à Hussein-Dey, dans une banlieue d’Alger avec son équipement ancien avait gardé une main d’oeuvre souvent illettrée mais expérimentée. Elle continuait à fabriquer des équipements agricoles destinés pour l’essentiel à la vinification (pompes)et au calibrage des fruits et légumes.

Son directeur, compétent et dynamique avait recruté un dessinateur astucieux. Afin d’élargir la gamme de ses fabrications, la CAPMA avait décidé de se lancer dans la fabrication de nouvelles machines simples, très demandées sur le marché : machines à fabriquer des parpaings en ciment et machines à fabriquer des carreaux en ciment. Le dessinateur avait réussi à adapter la fabrication de ces machines aux types de matériaux et composants disponibles chez les fournisseurs algériens. La fabrication de ces machines venait de commencer et avait rencontré, dès le départ, un grand succès. C’est précisément ce moment là que le Ministère algérien de l’Industrie choisit pour supprimer CAPMA purement et simplement. Depuis longtemps en effet, le Ministère affichait sa préférence absolue pour les grands ensembles (clé en main)construits avec des techniques nouvelles, ce qui allait de pair avec un grand désintérêt sinon mépris pour toute entreprise petite et ancienne. Le Ministère décida de "rationaliser" et d’intégrer CAPMA dans la grande entreprise nationale chargée de la construction de tous les matériels agricoles : en l’occurrence, à l’époque SONACOME, Société Nationale de Constructions Mécaniques.

Du jour au lendemain, CAPMA disparut. Les ouvriers furent recasés, les machines envoyées à la ferraille et les bâtiments récupérés pour servir de magasin de pièces détachées pour automobiles. Tous les plans de l’atelier de dessin furent simplement jetés à la poubelle : quelques jours après, on pouvait ramasser quelques parcelles de ce savoir-faire accumulé, traînant dans les caniveaux.

Triste fin d’une entreprise prometteuse, privant l’Algérie industrielle d’un dynamisme qui lui fait cruellement défaut.

Palavras-chave

Estado e sociedade civil, intervenção do Estado, industrialização, fracasso, pequena e média empresa, economia planificada, planificação econômica, papel do Estado, empresa pública


, Argélia, Alger

Comentários

Quelques années plus tard, j’ai eu l’occasion de visiter un atelier coréen de construction mécanique qui faisait penser à CAPMA par son caractère artisanal ; on y fabriquait des motoculteurs et autres équipements pour l’agriculture. Dix années après, l’entreprise DAEDONG s’est développée et modernisée. Elle est devenue le premier producteur coréen de motoculteurs ; c’est également un producteur de machines outils y compris à commande numérique. Alors qu’en Algérie on a détruit une base industrielle dynamique, en Corée on a su accepter les lenteurs des premiers commencements : la seule façon pour accélérer ensuite l’allure.

Fonte

Texto original

JUDET, Pierre (France)

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