04 / 1996
"Je médiate, tu médiates, nous médiatons...". La médiation est une technique de résolution des conflits qui semble avoir un avenir prometteur. Comment se déroule t-elle ? Quelles sont ses limites et ses avantages ?
La médiation est un concept largement utilisé maintenant, qui recouvre un grand champ d’intervention, la médiation familiale, la médiation d’entreprise, pénale... Définie comme une technique pour établir ou rétablir la communication entre les parties en conflit et les aider à clarifier et résoudre le conflit, elle n’est pas sans rapport avec la non-violence. Face au conflit, plusieurs attitudes sont possibles : la fuite, le contournement ou l’affrontement qui se traduit soit par la violence, soit par la négociation. Dans un conflit s’affrontent souvent des valeurs, des intérêts. Plusieurs types d’attitudes sont possibles.
Tout d’abord la compétition. La relation à l’autre n’y a pas d’importance, par contre les buts à atteindre sont primordiaux, il faut gagner. Autre attitude : le repli. La relation à l’autre n’a pas d’importance et les buts non plus, je me moque de perdre et que l’autre perde aussi. Dans la collaboration la relation à l’autre est importante et les buts aussi, par exemple décider des vacances en famille. Autre attitude : faire en sorte que les deux gagnent. Il faut souvent beaucoup de temps, de calme, de sérénité pour arriver à ce mode de gestion des conflits. L’accommodement : la relation y est très importante et les buts minimes. Je veux bien perdre si l’autre, en gagnant me laisse sa considération, continue de m’aimer. Exemple d’un mari qui veut faire plaisir à son épouse en acceptant d’aller avec elle au spectacle qu’elle a choisi. Le compromis implique que les différentes parties en présence gagnent certaines fois, perdent d’autres fois. Lorsqu’on est coincé dans un conflit, il est intéressant de se positionner personnellement afin d’être conscient de ce qu’on privilégie : la relation à l’autre ou le but. Le sujet du conflit peut alors paraître dérisoire (obliger un enfant à terminer son yaourt par exemple...).
L’écoute des faits, des sentiments, et leur reformulation, (esprit de synthèse)sont les techniques essentielles dans la médiation. Deux principes sous-tendent ces pratiques : le respect de la véracité des faits et le respect de la personne. Les médiateurs doivent jongler en permanence entre la reformulation et la synthèse. La confidentialité et la neutralité du médiateur sont également essentielles. Le recours à la médiation doit être volontaire. En général une des parties prend contact. Lors de cette prise de contact, ne pas trop demander de renseignements, n’avoir les échos que d’un seul point de vue nuit ensuite au traitement du conflit. Il faut s’assurer toutefois que le problème relève bien de la médiation. Un processus de médiation comporte quatre phases : l’accueil, l’exposé des faits, la résolution du conflit, l’accord.
L’accueil : une médiation dure au maximum dix séances de deux heures. Le médiateur présente le cadre, lieu, temps, prix de la médiation. Il cherche dès le début à créer un sentiment de confiance. Il peut par exemple féliciter les deux parties d’avoir pris la décision de venir en médiation, car ce n’est pas facile de venir parler d’un conflit. Le médiateur redéfinit les règles de prise de parole, chacun doit écouter l’autre. Il donne la possibilité à chacun d’écrire pendant que l’autre parle. La médiation est un lieu où chacun peut s’expliquer, il est important de laisser sortir la colère. Le médiateur doit commencer la séance avec calme, sympathie et détermination afin de créer une ambiance favorable à la résolution du conflit, et ceci pendant la durée total que prendra la résolution du conflit.
L’exposé des faits : cette séance est longue, elle peut durer six séances. Chacun présente les faits de son point de vue. Voir toutes les données d’un conflit est indispensable. Quand il s’agit de conflits liés à l’environnement immédiat, la prise de conscience par chacune des parties de ce que l’autre vit fait souvent tomber l’agressivité. L’autre n’est plus réduit seulement au conflit, il prend consistance, il a une famille, un travail... Lorsque la tension est tombée il est important de demander à chacun ce qu’il attend de la médiation. Il faut du temps pour que la communication entre les deux parties se rétablisse. Le plus souvent les deux parties s’adressent uniquement au médiateur, ne regardent pas l’autre. C’est seulement après plusieurs séances que les parties peuvent se parler sans le passage par le tiers. Les deux personnes n’avancent pas dans le processus au même rythme, il y a souvent un déséquilibre. Le médiateur doit y être vigilant, ne pas prendre partie : le conflit appartient aux deux parties, c’est à elles de trouver des solutions. La résolution du conflit : cette séance ne doit pas venir trop tôt. Son objectif est de rechercher des solutions. Il faut chercher, trier, innover. Chaque partie doit avoir quelque chose à faire, période de dialogue, de coopération, chacun doit accepter de négocier, de céder du terrain. On arrive souvent à une entente car le conflit est fatiguant, prend beaucoup d’énergie et est menaçant. La résolution apporte de la tranquillité, de la sécurité, de la quiétude.
L’accord : les parties arrivent à un accord sur les problèmes essentiels du conflit. L’accord est précisé par écrit et signé par les deux parties. Elles s’engagent à respecter les termes de l’accord. Il ne faut jamais accepter que l’accord dépende d’autres personnes non présentes.
Etre médiateur n’est pas facile. La tension d’un conflit est difficile à supporter. Le médiateur doit éviter de prendre partie pour l’un ou l’autre des protagonistes.Un autre danger danger est de vouloir proposer ses propres solutions.
Ce qui parait intéressant dans la médiation c’est sa capacité à recréer de la communication, à retisser du lien social entre les gens.
regulação social, mediação
, Franca
La médiation à ses limites. Il parait difficile, par exemple, de résoudre par la médiation un conflit qui porte fondamentalement sur les valeurs. La médiation est un moyen intéressant de résoudre d’une façon non-violente les conflits inter personnels mais ne peut, à elle seule, être la réponse universelle. Avec intelligence et discernement, il faut savoir mettre en oeuvre des moyens, des techniques les mieux adaptées aux situations et la médiation est une piste à explorer.
Yvette BAILLY est membre du groupe de Lyon du Mouvement pour une Alternative Non violente, 39 rue Courteline, 69100 Villeurbanne.
Artigos e dossiês
BAILLY, Yvette in. Perspectives Non Violentes (France)
Non Violence Actualité - BP 241, 45202 Montargis Cedex, FRANCE - Tel 02 38 93 67 22 - Fax 02 38 93 74 72 - Franca - www.nonviolence-actualite.org - nonviolence.actualite (@) wanadoo.fr