A propos des investissements inutiles dans les infrastructures portuaires
02 / 1996
Jo Le Hiarric a participé en tant que coopérant et expert de la pêche à plusieurs projets de développement en Afrique. Il dialogue avec Alexis Fossi, technicien des pêches demeurant à Montpellier (Sud la France)et fait un parallèle entre les infrastructures financées par les projets de développement en Afrique et le port de Houat (Bretagne), l’île qu’il habite, où se déroule l’interview.
- Jo : "Ici, à Houat, on a d’abord construit la digue pour faire un abri. Ensuite, on a installé l’électricité. Quand les capitaines des bateaux de pêche ont vu que l’abri était sûr, ils sont venus. La coopérative des pêcheurs était une barraque en bois sur la colline, on a donc construit un terre-plein et ensuite, les pêcheurs eux-mêmes ont construit ce bâtiment auquel on a ajouté une chambre froide. On n’a pas fait les choses à l’envers, on n’a pas commencé par construire le bâtiment avant le quai. Pourtant, ici, il n’y a pas eu d’experts, seulement des pêcheurs.
En Afrique, j’ai vu des installations où il n’y avait aucune pirogue. En Guinée par exemple, j’ai vu de superbes places de commercialisation, de débarquement de poissons inutiles (superbes équipements sans pirogues car construits dans un endroit trop exposé au vent et sans assez de fond pour accoster en toutes marées). J’ai vu la même chose au Gabon près de Mayumba.
Le premier service que l’on rend au pêcheur, c’est l’abri, le fait de pouvoir protéger son bateau et de pouvoir partir en mer quelque soit la marée, à toute heure du jour et de la nuit. Après, selon les besoins, selon le dynamisme, on construit les équipements mais on ne fait pas l’inverse. Alors, pourquoi fait-on des erreurs en Afrique que l’on ne fait pas ici? On ferait bien de se pencher sur cette question parce que l’Afrique a besoin d’infrastructures.
- Alexis : "Parce qu’il y a des secteurs économiques qui sont parfois en compétition quand par exemple, on veut déplacer des ports entiers pour créer des zones touristiques. En France aussi, on trouve ce genre de problème : Au port de Frontignan (sur la côte Méditerranéenne), les autorités ont construit une chambre froide, des installations sophistiquées mais elles n’ont rien demandé aux pêcheurs de Sète qui étaient sensés s’y installer parce qu’elles avaient décidé de transformer Sète en port de plaisance. Elles se sont adressées à une société très pointue dans le domaine des installations portuaires à terre. Ces dernières sont très belles mais personne n’a demandé aux pêcheurs s’ils avaient besoin d’un terre-plein. Ils ne sont jamais venus. Ils travaillent avec des chalutiers ou des senneurs et ont besoin de place pour étaler leurs filets mais les quais sont trop étroits. Pour rentrer chez eux, ils devaient prendre une navette ou une voiture alors qu’à Sète ils étaient au coeur de la ville. Maintenant, il y a à Frontignan une énorme chambre froide construite soit disant pour résoudre le problème du poisson bleu. Le problème du poisson bleu est toujours là et la chambre froide ne tourne pas."
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Tant d’argent, tant d’expertise gâchée faute de savoir écouter!
Entretien réalisé par Sophie Nick à l’île de Houat dans le cadre de la capitalisation d’expérience du CEASM.
Entretien avec LE HIARRIC, Jo; FOSSI, Alexis
Entrevista
CEASM (Association pour le Développement des Activités Maritimes) - Le CEASM a arrêté ses activités en 2001. - Franca