Le cas des enfants rwandais après le génocide de 1994
02 / 1996
La guerre (mais aussi le refuge et le génocide)est une situation extrême qui nuit au développement physique et psychique harmonieux des enfants. Xavier GUIGUE (1993)explique merveilleusement bien que la guerre ne détruit pas uniquement des vies, elle détruit aussi "l’idée de vie, l’idée de l’homme, c’est le le sacrifice du langage, du symbolique". Il nous montre que la guerre, en détruisant des structures telles que celles des systèmes éducatif ou médico-sanitaire, en remettant en cause les références et l’organisation familiale et sociale, empêche l’enfant de vivre sa condition d’enfant et le prive des éléments qui devaient participer à son développement.
1- " Généralités, concept de PTSD et ses limites ". Les personnes réfugiées et celles qui vivent ou ont vécu dans un environnement violent (guerre, génocide et répression politique en particulier)souffren t souvent de ce qu’on appelle un stress post-traumatique. En anglais le concept le plus répandu est le syndrome de Post Traumatic Stress Disorder (PTSD). Il s’agit d’une anxiété qui se manifeste schématiquement par une tendance de l’individu à revivre en permanence son expérience traumatique (hallucinations, cauchemards...)et à éviter systématiquement tous les stimuli qui rappellent cette expérience.
Les effets psychologiques d’une expérience traumatique peuvent retentir sur toute la famille de la personne concernée et même atteindre les futures générations. Mais tous les individus qui ont vécu une expérience traumatique ne développement pas systématiquement un PTSD de même que toute personne souffrant d’un stress ne peut pas forcément identifier l’expérience vécue qui en est la cause.
Si toute la population est susceptible de souffrir de stress après une expérience traumatique, les enfants sont à la fois les plus fragiles et ceux possédant la plus grande capacité à guérir (résilience). Il n’existe pas encore de théorie générale sur les effets psychologiques de la guerre et du refuge sur l’enfant, mais de nombreux professionnels travaillent sur ce thème, des colloques en ont fait leur thème principal et les stratégies adoptées sont issues de la pratique.
2- " Manifestations du traumatisme psychologique chez l’enfant ".
- altération du sommeil, terreurs nocturnes, cauchemars, hallucinations sont les signes de réminiscence de la souffrance sous forme obsessionnelle et nuisent au travail de deuil;
- désordres alimentaires : refus des aliments, baisse de poids, dénutrition d’origine psychologique, anorexie (plus les lésions cérébrales dues à la malnutrition sévère);
- désordres gastro-intestinaux d’origine psychosomatique, coliques, vomissements, diarrhées mais aussi migraines, maux d’estomac, chute des cheveux et allergies d’origine psychosomatique;
- altérations du langage jusqu’à l’adolescence : bégaiements;
- désordres du développement : régression à des étapes antérieures, oubli du langage parlé, de la lecture et de l’écriture, énurésie (perte de contrôle du sphincter urinaire), encoprésie (problème du contrôle du sphincter anal), difficultés d’apprentissage, désorientation spatio-temporelle, difficultés à poser une frontière entre l’imaginaire et la réalité;
- altération et désordres de type affectif : inhibition, indifférence, tristesse, besoin pathologique d’affection, dépendance, irritabilité, agressivité, inquiétude, peurs intenses liées à des stimulations du milieu ambiant (exemple : sirènes, bruits de véhicules...), fermeture à la communication, manque de concentration, attitudes psychotiques, cas de schizophrénie et attitudes autistiformes;
- troubles du comportement des adolescents directement liés au traumatisme : vols, bagarres, alcoolisme, prostitution, suicides.
Tous les enfants ne réagissent pas de la même façon. Notamment, les réactions diffèrent selon l’âge, la situation familiale, la présence ou non de la famille au moment des événements, réactions de la famille, cohésion de la famille. Les réactions différent aussi en fonction de la nature de l’événement traumatisant, avec ou sans violence humaine, avec ou sans violence directe subie par l’enfant. La manière dont la communauté (structures, cohésion...)a été affectée et les conditions matérielles de la famille aussi sont à prendre en compte.
3- " Le cas des enfants rwandais suite au génocide de 1994 ". En août 1994 l’UNICEF a réalisé une enquête auprès d’un échantillon représentatif de 207 enfants rwandais de 9 à 15 ans vivant dans des centres d’accueil. Les résultats sont alarmants tant du point de vue de l’exposition des enfants aux scènes de guerre que de celui des réactions de ces enfants aux événements.
Exposition des enfants rwandais aux scènes de guerre : 91% ont fait l’expérience de la mort d’un membre de leur famille à cause de la guerre; - 56% ont vu tuer un membre de leur famille
- 56% ont été témoins visuels de l’agression ou de la mort de quelqu’un; - 42% ont vu des enfants tuer d’autres enfants; - 48% ont été menacés de mort; - 90% se sont cachés pour se protéger (dont la moitié seuls)...
Réactions des enfants aux événements ; - 92% y pensent sans le vouloir; - 53% ont des problèmes de concentration; - 60% d’entre eux pensent souvent ou quelquefois que c’est une perte de temps de faire des plans pour le futur parce qu’ils ne pensent pas vivre longtemps; - 30% se sentent souvent ou quelquefois coupables de ne pas avoir pu protéger les membres de leur famille - Plus de la moitié d’entre eux rêvent d es événements passés et ont du mal à s’endormir; - 75% tentent souvent ou quelquefois de s’occuper pour ne pas avoir à y penser...
Les rédacteurs de ce rapport mettent l’accent sur l’attention spéciale que requièrent les enfants qui ont vu d’autres enfants participer activement aux massacres, argumentant que ce phénomène dépasse celui, couramment rencontré, des enfants soldats.
conflito étnico, traumatismo psíquico, criança, vítima de guerra
, Ruanda
Contact personnel Florence DA SILVA : 89-91 rue Pelleport 75020 Paris, France.
Outro
Ce texte a été rédigé à partir de :; - fonds documentaire Enfants Réfugiés du Monde;; - "<Children's exposure to war scenes in Rwanda, a preliminary report>", Dr <DYREGROV, Atle>, Dr <RAUNDALEN, Magne>, Dr <GJESTAD, Rolf>, <Unicef>, septembre 1994.
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