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Aide alimentaire exagérée au Guatemala suite au séisme de 1976

Tom ROBERTS

01 / 1994

Le séisme qui dévasta le Guatemala en 1976 fit 23 000 morts, 75 OOO blessés et plus d’un million de sans-abri.

Ce séisme eut lieu alors que les récoltes atteignaient au Guatemala des sommets jamais égalés. Le tremblement de terre n’eut aucun effet destructeur sur cette production inhabituelle. Dans les semaines qui suivirent le drame, seuls vinrent à manquer des biens de consommation courante : sel, sucre, savon, etc. Il y avait là un besoin urgent à satisfaire jusqu’au rétablissement des liaisons commerciales normales.

La "machine" alimentaire" ne pouvait se contenter d’une aussi faible demande. Les Etats Unis expédièrent plus de 25 000 t de céréales, tandis que 5 000 t de produits alimentaires d’origine américaine déjà entreposées sur place étaient débloquées.

Sur le terrain, les représentants d’organisations humanitaires envoyèrent rapidement à New York des rapports interrogatifs : "Pourquoi envoyer de la nourriture, alors que les paysans réclament du matériel de construction ?" Un directeur de CARE (Cooperative for American Relief Everywhere)vint se rendre compte sur place. Voici un extrait de son rapport : "je souhaitais me rendre compte moi-même de l’éventuelle nécessité d’importer de la nourriture ou des semences. Mais je n’ai eu aucune information, aucune indication en ce sens. Les sols ne sont pas endommagés et la récolte a été bonne. J’ai demandé aux gens s’ils pouvaient utiliser la nourriture entreposée dans leurs bâtiments et actuellement sous les décombres. Leur réponse fut affirmative."

Deux semaines après le désastre, la Croix Rouge Internationale demande à ses organisations nationales de cesser les envois de nourriture à destination du Guatemala. Un peu plus tard, le directeur de l’USAID (organisme gouvernemental américain d’aide au tiers-monde)pour l’Amérique Latine témoigne devant la chambre des représentants : "Monsieur le Président, je voudrais préciser que le gouvernement guatémaltèque a officiellement demandé l’arrêt de toute aide alimentaire et médicale au profit de matériel de construction."

Il y eut trois conséquences graves pour l’avenir de ce petit pays d’Amérique Centrale.

L’importation de céréales étrangères, pour une valeur de 8 millions de dollars, distribuées gratuitement, provoqua l’effondrement du cours des céréales locales. Certains remarqueront que l’excellente récolte de cette année là aurait inévitablement souffert d’une baisse des prix par l’augmentation de l’offre. Aurait-elle été comparable à la concurrence déloyale et injustifiée de 25 000 t de céréales américaines ?

Dans les semaines qui suivirent le tremblement de terre, les responsables d’organismes humanitaires se rendirent sur le terrain pour reprendre contact avec les responsables des villages. Ils constatèrent une étrange substitution.

"Dans les villages, on voyait parler haut et fort des individus réputés pour leur malhonnêteté, leurs agissements louches. Ils démarchaient toutes les administrations, les organismes d’aide, pour attirer vers leur village l’aide alimentaire. Ils disaient être parmi les villages les plus pauvres. Bientôt, les villageois leur firent plus confiance qu’aux responsables habituels. L’afflux de nourriture gratuite a ainsi créé parmi des villages autrefois unis dans le travail des disputes sur la répartition de cette manne."

Enfin on a constaté que les Guatémaltèques mettaient beaucoup plus d’énergie à faire la queue dans les centres de distribution qu’à reconstruire le pays dévasté. Qui les en blâmerait ?"

Palavras-chave

fracasso, ajuda alimentar


, Guatemala

Comentários

Lorsque, exceptionnellement, la nourriture manque dans une région sinistrée par une catastrophe soudaine de type tremblement de terre ou cyclone et qu’au niveau national ou dans les pays voisins il est impossible de s’en procurer, une aide alimentaire "Nord-Sud" peut se justifier. Pourtant les grands pays exportateurs de produits agricoles ont tendance à abuser de ce type d’aide au-delà du strict nécessaire. L’aide alimentaire est en effet un moyen efficace d’écouler des excédents dont le coût de stockage est élevé. C’est aussi une façon d’introduire de nouvelles habitudes alimentaires parmi les populations "bénéficiaires" et, ainsi, à terme, de conquérir de nouveaux marchés commerciaux... Pour le destinataire, cette pratique n’est pas sans dangers comme en témoigne l’exemple guatémaltèque.

Fonte

Literatura cinzenta

AUI=Action d'Urgence Internationale, 1992/06

AUI (Action d’Urgence Internationale) - Terrasses Montcalm, 1401 rue Fontcouverte, 34070 Montpelllier, FRANCE - Tél 33 (0) 4 67 27 06 09 - fax 33 (0)4 67 27 03 59 - Franca - www.aui-ong.org - info (@) aui-ong.org

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