Le sud a t-il son mot à dire ?
06 / 2011
Les pays du Sud sont souvent le terrain privilégié pour les essais des laboratoires pharmaceutiques. Au Cameroun, le Réseau sur l’éthique, le droit et le sida (REDS) s’efforce de faire respecter les droits des patients au sein des essais cliniques. Entretien avec Calice Talom Yomgne, chargé de programme éthique et recherche au REDS et co-coordinateur de la Coalition Respect.
Quelle est la procédure à suivre pour mener à bien un essai thérapeutique au Cameroun ?
Calice Talom Yomgne : Le promoteur de l’essai doit systématiquement soumettre le protocole de recherche au comité national d’éthique afin de recevoir une clearance éthique (1). Le dossier qu’il dépose inclut : la demande adressée au président du comité, quatre exemplaires du protocole signé par l’investigateur, la notice d’information et le formulaire de consentement éclairé (en français et en anglais), les outils de collecte de données, le budget détaillé du projet, les sources de financement, le CV de tous les investigateurs, l’accord de la structure où sera mise en œuvre l’essai et les frais de soumission du dossier. Le protocole doit également être soumis à la division de la recherche du ministère de la Santé publique pour recevoir l’autorisation administrative de recherche.
Qui sont les personnes qui participent aux essais ?
C. T. Y. : La grande majorité des projets de recherche mis en œuvre au Cameroun porte sur le VIH-Sida. Les participants sont donc des personnes séropositives ou non. D’autres recherches portent sur des pathologies telles que la malaria ou la bilharziose, et sollicitent des patients hospitalisés.
Avez-vous relevé des problèmes dans la mise en pratique de ces essais ?
C. T. Y. : Outre la vétusté des équipements sanitaires et la démotivation du personnel soignant, les participants aux essais ne disposent pas d’une information suffisante. Leur capacité de refus de participer reste très limitée car c’est parfois le moyen d’avoir accès à un traitement et un suivi de qualité. Le Comité national d’éthique ou la division ministérielle chargée des autorisations de recherche n’effectue pas assez de vérifications sur le terrain, pour s’assurer du respect des principes éthiques et du cahier des charges. Enfin, certaines clearances éthiques s’avèrent fantaisistes. On a relevé aussi des essais clandestins et des charlatans.
Quelle serait la marche à suivre pour éliminer ces problèmes?
C. T. Y. : Il faudrait impliquer les associations ou les communautés dans le contrôle du respect des principes éthiques, de l’amont à l’aval des essais. La formation de médiateurs associatifs serait pertinente pour s’assurer que les potentiels participants reçoivent une information loyale. Il faudrait aussi instaurer un mécanisme d’évaluation de la compréhension de l’essai par les participants. Nous aurions besoin d’un cadre de concertation entre le Comité national d’éthique et la division ministérielle en charge de la délivrance des autorisations administratives de recherche. Des missions conjointes de visite sur le terrain devraient vérifier le respect du cahier des charges par les équipes de recherche. Il faudrait en outre fournir un appui financier au comité national d’éthique et œuvrer à la mise à niveau de ses membres. Enfin, nous aurions besoin d’une loi qui encadre la recherche biomédicale au Cameroun.
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, Camarões
Sciences et Démocratie : un mariage de raison ?
Propos recueillis par Stéphanie Marseille, journaliste.
Altermondes, Sciences et démocratie : un mariage de raison ?, numéro spécial Juin 2011, 50p.
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