español   français   english   português

dph participa da coredem
www.coredem.info

diálogos, propuestas, historias para uma cidadania mundial

Le Forum Territorial des périphéries contre la ville fragmentée

En 2004, l’association GIROS commence une analyse systématique des stratégies de développement urbain de la municipalité. Les travaux montrent que l’exclusion urbaine tend à s’imposer comme modèle de développement.

David Bodinier

2010

Rosario est une ville d’Argentine qui compte un million d’habitants. Le développement urbain de cette ville a été fortement impacté par l’industrie autour de la zone portuaire. Plus récemment, la crise argentine à la fin des années 90 a frappé de plein fouet les habitants de Rosario : plus de cent mille personnes vivent dans des habitats précaires. En 2004, un nouveau plan stratégique de développement urbain intitulé « Nuevo plano urbano » a été rédigé remplaçant l’ancien plan datant de 1967. C’est à cette époque que l’association GIROS commence une analyse systématique des stratégies de développement urbain de la municipalité. Les travaux montrent que l’exclusion urbaine tend à s’imposer comme modèle de développement. Ils mettent en lumière une trame urbaine où la concentration économique provoque une fragmentation physique de la ville : un seul groupe économique est propriétaire de 9% de la ville (13% de la superficie urbanisée), soit 1.444 hectares situés dans des zones stratégiques. Cette dénonciation de la stratégie de développement urbain s’accompagne d’un mouvement de mobilisation populaire qui a formulé un projet urbain alternatif. Le mouvement s’étend désormais à d’autres quartiers de l’agglomération à travers le Forum Territorial des Périphéries.

Sur la base d’une analyse du développement urbain de la ville de Rosario, l’association Giros a dénoncé publiquement l’émergence d’une ville fragmentée source d’exclusion. L’une des premiers actions de l’association a été la dénonciation du scandale lié à la spéculation des terres situées en zone inondable où se situaient des quartiers d’habitats populaires. Après de tragiques inondations, des groupes privés avaient acheté des grandes zones de terre malgré leur caractère non-urbanisable. Le recueil de témoignages a permis de montrer que ces terres ont été parfois extorquées aux habitants vivant dans des habitats précaires malgré leur présence depuis plusieurs dizaines d’années. Giros a montré que ce mouvement spéculatif a coïncidé avec des investissements publics. Dans ce cas, les principaux bénéficiaires ont été les spéculateurs… Récemment un important projet urbain privé a été rendu publique pour le quartier de Nuevo Alberdi. Ce quartier est divisé en deux par le canal Ibarlucea. D’une part, il y existe une zone rurale où vivent 300 familles dans un extrême pauvreté où il manque les services urbains de base tels que l’eau et l’électricité, et d’autre part, une zone urbaine à plus forte densité où vivent un millier de familles. Le projet urbain privé concerne une zone de 500 hectares, où il est projeté de construire trois quartiers privés, des lycées privés, une zone universitaire, des clubs, des terrains de tennis et un terrain de golf. Ces éléments conduisent l’association Giros à dénoncer la subordination des intérêts publics aux intérêts privés, ainsi que le mépris des habitants actuels de Nuevo Alberdi..

Parallèlement à ce travail d’expertise citoyenne, Giros a mené une mobilisation populaire sous la forme d’une assemblée populaire de Nuevo Alberdi qui regroupe les habitants et une multitude d’organisations sociales. L’assemblée est un lieu de ressources où les habitants sont les principaux protagonistes notamment au sein de commissions. Après 5 ans de lutte, le mouvement a non seulement permis de construire de nouvelles formes politiques mais également de dépasser l’approche revendicative en proposant un projet de développement urbain alternatif.. Le projet « El nuevo alberdi » propose un accord public-public face au projet de partenariat public/privé. Le projet alternatif prévoit la construction de 3000 logements subventionnés à destination du secteur populaire mais également des espaces publics, d’important centres productifs, éducatifs et culturels.

Peu à peu la mobilisation initiée dans le quartier de Nuevo Alberdi s’est répandue à d’autres quartiers de l’agglomération. Un Forum territorial de la périphérie a été organisé permettant la diffusion de l’expérience de l’assemblée de Nuevo Alberdi. Selon Giros : « L’objectif de ce forum est de favoriser un espace de rencontre, de débat et de réflexion sur la périphérie de Rosario, avec pour protagonistes principaux ceux qui vivent et travaillent dans les périphéries, ceux qui la connaissent et parfois en souffrent, ceux qui la défendent, s’identifient à elle et surtout, essaient de la transformer en un lieu pour tous, plus juste et solidaire ». Deux éditions se sont déroulées en novembre 2008 et novembre 2009, avec la présence d’organisations d’habitants de plusieurs quartiers de la périphérie de la ville, qui se sont rencontrés et ont échangé autour de leurs expériences de luttes et d’organisation.

La première édition du 1er Forum en novembre 2008 a réuni une quinzaine d’organisations. Les problématiques de la périphérie ont été dressées et il a notamment été souligné les importants problèmes d’habitat et de logement. Le deuxième Forum avait pour objectif de voir comment résoudre les problèmes relevés lors de première édition. Il en est ressorti que nous devons commencer à agir nous-même pour faire face aux désillusions provoquées par les réponses qui viennent d’en haut. C’est à partir de là que sont sortis plusieurs piliers qui sont l’organisation, la construction d’organisation de base et d’outils autonome. Le résultat est très intéressant. Selon l’association Girons à « la périphérie émerge comme un acteur social, un acteur politique qui peut avoir une voix que l’on écoute et qui commence à résonner dans la ville. Ce que nous n’avions pas jusqu’alors. Dans les médias, on parle des quartiers seulement lorsqu’il y a un vol ou lorsque que quelqu’un meurt. Les habitants souhaitent que les médias parlent de ce qui se vit dans les quartiers : la périphérie a sa propre vie culturelle, économique donc nous devons commencer à la rendre publique ». 

menções legais