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Exclusion du logement et accès à la ville

Lors du quatrième Forum International sur la Pauvreté Urbaine (FIPU), qui s’est déroulé à Marrakech en Octobre 2001, des membres de l’association internationale de techniciens, experts et chercheurs (AITEC) ont préparé, animé et produit le rapport consacré à la Ville inclusive.

David Bodinier

2010

« Savez-vous quel est, pour nous, le contraire de l’exclusion ? Ce n’est pas l’inclusion mais la participation » - Martin Longoria, membre du Front continental des organisations communautaires et du Cri des exclus.

Lors du quatrième Forum International sur la Pauvreté Urbaine (FIPU), qui s’est déroulé à Marrakech en Octobre 2001, des membres de l’association internationale de techniciens, experts et chercheurs (AITEC) ont préparé, animé et produit le rapport consacré à la Ville inclusive. Ce Forum a permis de faire progresser la connaissance et la conscience des mécanismes d’exclusion, de promouvoir des politiques intégrées de réduction et de suppression de la pauvreté dans les villes, et de développer des compétences nécessaires à la mise en œuvre de telles politiques. Sur les thématiques de logement et de droit à l’accès à la ville, l’objectif du travail mené par les membres de l’AITEC est d’engager une réflexion sur les méthodes d’intégration urbaine et sociale et de caractériser un droit au logement visant à promouvoir des « villes inclusives ». Le rapport propose de s’appuyer sur les stratégies des habitants qui font face à l’exclusion urbaine pour développer de nouvelles politiques publiques d’insertion sociale, nécessitant à la fois un accompagnement des pratiques des habitants et une adaptation du cadre technique, financier, institutionnel des politiques d’intégration par le logement.

Sao Paolo

La principale cause des processus d’exclusion sociale par le logement est l’incapacité des politiques d’habitat à concevoir une offre accessible aux bas revenus. Selon les auteurs, c’est une réalité, à la fois dans les pays du Sud où les gouvernements ont laissé se développer des quartiers informels dépourvus d’équipements et de services, à la périphérie des villes, et dans les villes du Nord où l’on constate une baisse de la production de logements locatifs aidés. Le rapport identifie trois causes . Premièrement, le marché foncier ne répond pas spontanément à la demande et le fonctionnement du marché contribue à « l’exclusion urbaine ». Les auteurs sollicitent les analyses d’Alain Durand-Lasserve pour montrer que « la formation des prix du foncier est déterminée par les mécanismes de la rente et par les stratégies spéculatives (…) et les mesures correctrices classiques comme la fiscalité ne donnent des résultats que limités ». D’autre part, l’accès des ménages au système formel du crédit est réduit, notamment à cause de l’inadaptation des systèmes de financement aux caractéristiques des ménages à bas revenus. Enfin, la troisième constatation est que l’accès au logement ne suit pas la production de logement. Autrement dit, la production de logement ne permet de répondre qu’à la demande solvable ce qui traduit la crise du mode de régulation de l’offre et la demande.

Malgré l’accélération de la reconnaissance du droit fondamental à un logement convenable, notamment dans les sommets internationaux, la portée des déclarations face aux réalités de l’exclusion urbaine reste faible. Il a été déjà observé que les politiques d’intégration par le logement qui ne prennent pas en compte les pratiques des habitants échouent généralement. Le rapport prend appui sur les recherches de Françoise Navez-Bouchanine concernant la politique de résorption des bidonvilles au Maroc. Dans ce cas, « l’identification des problèmes par les administrations centrales ne prend pas en compte les pratiques des ménages qui ne sont pas associés à l’élaboration des solutions de relogement. Cette approche centraliste a un certain nombre de conséquences négatives ». D’une part, le pouvoir central, au lieu de jouer un rôle de régulation et d’animation continue à se substituer aux instances locales ; d’autres part, ce mode de gestion conforte, chez certains élus, dans des associations, et auprès d’autres partenaires publics, une conception assistancielle de l’Etat. Ce point de vue prolonge les réflexions menées lors de la première rencontre du FIPU formulées par la déclaration de Recife qui mentionnait déjà « une culture de l’assistance et de la dépendance qui se développe sur l’affaiblissement des structures de solidarité familiale et communautaire ». Dès lors, les auteurs préconisent de mettre en place de nouvelles politiques d’insertion sociale qui soient en rupture avec les politiques traditionnelles

Ainsi, les membres de l’AITEC défendent la nécessité d’élaborer des nouvelles formes de co-production et de développement urbain qui s’appuient, par exemple, sur la méthode dite de « consultation urbaine », développée par le PGU en Amérique latine et Caraïbe. «La consultation urbaine mise en œuvre par le PGU est une méthode de coproduction du développement urbain et social qui associe de façon approfondie et dans la durée, tous les acteurs directs et indirects de ce développement. Quel que soit le lieu, les projets sont menés selon une méthode similaire fondée sur la participation effective de toutes les catégories sociales en présence à des groupes de travail qui identifient les problèmes, établissent des priorités, choisissent des solutions et des moyens à mettre en œuvre ; les résultats obtenus font l’objet d’un suivi, tandis que les leçons et les perspectives sont systématiquement retirées des expériences». Yves Cabannes, coordinateur du Programme Gestion Urbaine pour l’Amérique Latine, précise : « dans chacune des 40 consultations urbaines et dans de nombreux autres projets, la représentation des pauvres des villes fait partie des accords entre partenaires. Ce type de “pacte urbain” définit les objectifs, les activités et les engagements des gouvernements locaux ainsi que ceux des organisations communautaires et des autres partenaires qui peuvent varier d’une ville à l’autre».

La mise en place de démarche de coproduction et de développement participatif nécessitent parfois un accompagnement des acteurs locaux. Pour l’AITEC, cet accompagnement se situe à trois niveaux : technique, financier et institutionnel. Le premier niveau peut permettre de mettre en place des outils adaptés pour une meilleure efficacité des pratiques populaires. Par exemple, dans un projet d’accès au logement, une assistance technique professionnalisée est utile pour assurer une continuité dans l’élaboration et le suivi du projet. Le deuxième niveau a pour objet, la nécessité de créer de nouveaux systèmes de financement pour la construction de logements à destination des populations pauvres qui articulent les systèmes formels et informels et permettent d’avancer des solutions à la question du recouvrement des coûts. Les auteurs proposent par exemple de créer des banques locales mutuelles et populaires, contrôlées par un organe technique et assurées par un fonds de garantie, et également de créer des mécanismes de financement à l’échelle internationale, comme le propose le réseau HIC, à travers l’utilisation d’une partie de l’éventuelle taxe Tobin. Concernant l’accompagnement institutionnel, les auteurs évoquent la nécessaire redéfinition au niveau local du rôle du secteur public et celle de son articulation avec l’ensemble des opérateurs qui impliquent une maîtrise d’ouvrage partagée..

Pour approfondir :

Présentation du programme FIPU

ww2.unhabitat.org/programmes/ifup

Présentation du PGU – ALC:

www.globenet.org/aitec/presentation/annuaire/pgu-alc.html

dossiê

Le débat sur l’exclusion

Fonte

AITEC, Rapport FIPU, Le logement et les politiques d’intégration, 2001

Photo : kesselring, Licence Creative Commons

Foret Catherine, gouverner les villes avec leurs habitants de Caracas à Dakar : dix ans d’expériences pour favoriser le dialogue démocratique dans la cité,ECLM, 2001, www.eclm.fr/fileadmin/administration/pdf_livre/93.pdf

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