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Jusqu’où l’interdiction du coca ?

Le CSE s’adresse au gouvernement indien et aux multinationales sur les normes sanitaires et les pesticides dans les boissons non alcoolisées

2006

Le 14 août 2006, le CSE écrit :

« La balle est dans le camp du gouvernement. Ces firmes vont utiliser toutes sortes de tactiques (les gros bras, des pressions étrangères…) pour nous faire croire que leurs produits sont clean et qu’il n’y a pas besoin de normes réglementaires. Les normes définies par l’Administration indienne sont prêtes mais toujours pas publiées, à cause du lobbying exercé par les fabricants. Le gouvernement va-t-il céder aux pressions américaines, aux menaces d’un arrêt des investissements étrangers directs (IED) ? Ces investissements ont plutôt besoin d’un cadre réglementaire clair et solide. Il ne faut pas laisser libre cours aux manigances des industriels et de nos bien timorés responsables politiques et administratifs. »

Le 17 août, le directeur général de Coca-Cola India Inc. écrit au CSE :

« Sur la base de nos analyses qui font appel à des expertises externes indépendantes, aux meilleurs laboratoires indiens et étrangers, nous sommes au regret de ne pas être d’accord avec les conclusions du CSE. Mais comme nous partageons vos préoccupations relatives aux pesticides dans l’alimentation, nous pensons qu’il serait bon de se rencontrer pour discuter de ces résultats et des méthodes employées, également pour envisager ce qu’il serait possible de faire ensemble pour traiter plus globalement la question des pesticides et des produits alimentaires en Inde et pour collaborer avec le Ministère de la santé et l’Administration afin d’établir des critères en matière de résidus de pesticides et de protocoles de dépistage. Faites-nous connaître la date qui vous convient pour une rencontre, avec la participation des experts du Central Science Laboratory de Londres si vous êtes d’accord. »

Le 18 août, le CSE lui répond :

… Il faut impérativement que la discussion porte sur les normes à appliquer aux boissons gazeuses et sur la façon dont votre société pourra faire avancer ce dossier. Ci-joint un exemplaire de notre revue Down To Earth où nous affirmons qu’il y a eu blocage. Des informations complémentaires sont disponibles sur notre site. Quant à la présence des experts du Central Science Laboratory du Royaume-Uni, tout à fait d’accord, à condition qu’on nous fasse parvenir auparavant son rapport complet, tel qu’il a été adressé à Coca-Cola. Je serai disponible en début de semaine prochaine à mon bureau au CSE. Sunita Narain

Le 22 août, le CSE écrit :

Nous protestons vigoureusement contre les déclarations que le Ministre de la santé vient de faire au Parlement et qui réfutent la validité des conclusions de notre enquête. Ce ministre de la santé est de toute évidence plus préoccupé par la bonne santé des firmes industrielles que de la santé de la population. Et le rapport de son comité d’experts, qui cherche des poux avec tant de minutie à notre propre laboratoire, ne fait que reprendre les allégations faites par le laboratoire de Londres, lequel est payé par Coca-Cola. On est bien triste de constater que notre Ministre accepte de se ranger du côté de Coca-Cola et de nous resservir mot pour mot certaines phrases du laboratoire en question. N’a-t-il pas honte de se laisser ainsi influencer ?

Le 25 août 2006, le CSE écrit :

Aujourd’hui des groupements professionnels de fabricants de pesticides menacent de nous traîner en justice. C’est la deuxième fois depuis deux mois. Qu’ils le fassent ! Ce genre de démarche, assez courant dans certains pays pour qu’on lui donne une étiquette particulière – SLAPP (Strategic Lawsuits Against Public Participation) -, vise à faire taire soulèvent des problèmes d’intérêt général, qui veulent faire connaître leurs points de vue aux responsables politiques. Le droit de l’individu ou d’un organisme à faire campagne dans l’intérêt général, en matière de santé publique par exemple, ne peut être mis en cause : il faut au contraire le renforcer.

5 septembre 2006, lettre du CSE au PDG de Coca-Cola-Inde :

… Nous avons discuté en interne de votre demande de rendez-vous du 16 août dernier, que nous avions d’abord accepté de bonne foi, espérant que ce dialogue allait pouvoir faire avancer les choses en matière de normes et de réglementation. Les événements démontrent que ce n’est pas le cas. Il s’agit toujours en fait de faire trainer les choses. Et vous vous souviendrez sans doute de la lettre urgente du chef de cabinet du Ministère de la santé adressée à la réunion du 29 mars 2006 du Bureau national de normalisation, lettre dont les représentants de votre société avaient connaissance, ce qui a choqué tout le monde. Il est clair que nous n’avons pas grand chose à débattre avec votre société. Sunita Narain

Lettre au Ministre de la santé et de la famille :

Nous avons bien reçu le courrier de votre Ministère daté du 21 août 2006, relatif à la question des résidus de pesticides dans les boissons non alcoolisées et aussi le Rapport de votre Comité d’experts. Ce dernier qualifie notre propre enquête de « non probante et inconsistante » sans fournir de preuves vraiment scientifiques, et cherche délibérément, par des arguties apparemment scientifiques, à brouiller les pistes.

Nous sommes effarés de constater que ce même comité reprend presque mot pour mot les commentaires des spécialistes rémunérés par Coca-Cola alors qu’il s’agit de juger de la qualité des produits de cette société. Vos services nous ont proposé de rencontrer ces experts. A quoi bon puisque leur objectif est de nous discréditer, donnant ainsi carte blanche aux fabricants.

En 2003, la Commission parlementaire chargée d’établir la véracité de notre enquête sur les boissons alcoolisées, après avoir pendant des mois passé au crible notre laboratoire, notre personnel, nos méthodologies et nos conclusions, nous a finalement donné raison. On aurait pu espérer que le gouvernement tiendrait compte des conclusions de la plus haute instance législative du pays. Or, trois ans après, c’est encore le CSE qui subit l’Inquisition. Parce que nous avons publié une enquête qui dérange des entreprises qui sont parmi les plus puissantes du monde ? Le problème n’est plus de chercher à savoir s’il y a des traces de pesticides dans les sodas mais de fixer enfin des normes claires pour ces boissons.

22 septembre 2006

Des juges de la Haute Cour du Kérala (sud de l’Inde) annulent l’interdiction de la production et de la vente de Coca-Cola et de Pepsi- Cola prise par le gouvernement de cet Etat après la publication de l’enquête du CSE en août dernier. Ils ont estimé que, selon la législation actuelle (article 23-1a de la Loi de 1954 sur la protection des produits alimentaires), seul le gouvernement central peut agir dans ce domaine, et que l’interdiction trouvait sa source dans le rapport d’une Ong et non pas d’un service gouvernemental. Le Chief Minister du Kérala a déclaré qu’il n’était pas question de céder sur ce dossier, qu’il prendra l’avis de ses conseillers juridiques et fera appel devant la Cour Suprême. Les fabricants de coca se félicitent de ce jugement, mais les militants anti-coca-cola, notamment des groupes autochtones (Adivasi), ont décidé de reprendre leurs actions contre l’usine d’embouteillage de Plachimada.

Palavras-chave

regulamentação, alimentação, poluição da água, qualidade do água, multinacional, grupo de pressão


, Índia

dossiê

CSE - Multinationales du coca : David contre Goliath (Notre Terre n°20, décembre 2006)

Comentários

Sept États de l’Union indienne ont interdit la vente des produits Coca-Cola et Pepsi-Cola dans leurs administrations, leurs établissements scolaires et leurs hôpitaux. Les membres du Parlement ont fait de même pour leur cafétaria. Le Kerala est allé plus loin : le 9 août 2006, il décidait d’interdire totalement la production et la vente de ces sodas sur son territoire.

Notas

Traduction en français : Gildas Le Bihan (CRISLA)

Fonte

CRISLA, Notre Terre n° 20, décembre 2006. Sélection d’articles de Down To Earth, revue indienne écologiste et scientifique, publiée par CSE à New Delhi.

Site du CSE : www.cseindia.org

CRISLA (Centre d’Information de Réflexion et de Solidarité avec les Peuples d’Afrique d’Asie et d’Amérique Latine) - 1 avenue de la Marne, 56100 Lorient, FRANCE - Tel : 08 70 22 89 64 - Tel/Fax : 02 97 64 64 32 - Franca - www.crisla.org - crisla (@) ritimo.org

CSE (Centre for Science and Environment) - 41, Tughlakabad Institutional Area, New Delhi, 110062 - INDIA - Tel. : (+91) (011) 29955124 - Índia - www.cseindia.org - cse (@) cseindia.org

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