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Le problème de l’assainissement en Inde

Quelles alternatives à la chasse d’eau ?

Sunita NARAIN

02 / 2002

Il y a quelques années, mon collègue Anil Agarwal et moi-même nous participions au Symposium sur l’eau de Stockholm et nous étions invités à un dîner offert par le roi de Suède. Laissant de côté ce beau décor, guidés par notre ami Uno Winblad, architecte spécialiste de l’assainissement écologique et qui partageait avec Anil les mêmes préoccupations, nous étions ici et là dans la capitale suédoise en train de faire la visite de cabinets «alternatifs», puis dans de grands magasins proposant des cabinets économiseurs d’eau, des cabinets électriques, des toilettes sèches… Anil, qui n’aimait pas du tout faire les boutiques, était ravi.

Je commençais à comprendre qu’il y avait là matière à réflexion : la chasse d’eau et le tout-à-l’égout, symboles de l’hygiène et de la propreté, constituent en fait un problème plus qu’une véritable solution. Nous construisons d’énormes barrages pour amener à grand frais l’eau à la ville. Et à chaque visite aux toilettes, c’est 10 litres qui partent dans un réseau de canalisations qui aura aussi coûté très cher à construire. Pourtant, tout au bout, cela va encore ajouter à la pollution des cours d’eau, dont la plupart sont devenus des égouts à ciel ouvert à force de recevoir les effluents urbains.

La Yamuna est le fleuve qui passe par Delhi, et c’est aussi son principal collecteur. Il entre dans la ville à Wazirabad où se trouvent des installations de pompage. Dans le cadre notamment de vastes programmes d’assainissement des cours d’eau (Yamuna Action Plan, National Action River Plan, Ganga Action Plan), la ville prévoit de tripler les capacités de ses stations d’épuration. Si cela est fait, elles manqueront paradoxalement de matière première car les collecteurs sont envasés, plus ou moins bouchés. Les autorités admettent que les installations actuelles sont parfois sous-utilisées ou parfois débordent lorsque la charge des mauvaises conduites est déviée sur des circuits en meilleur état. En zone urbaine, l’eau potable ne constitue à vrai dire qu’une petite part de la consommation totale d’eau : c’est dans l’assainissement qu’il en passe le plus. La ponction énorme de nos villes sur la ressource génère de sérieuses tensions politiques entre milieux urbains et zones rurales.

Nos gouvernements continuent à subventionner les bénéficiaires du tout-à-l’égout au nom des pauvres, qui ne peuvent s’offrir un raccordement au réseau. Il serait plus logique de pratiquer la vérité des prix et d’appliquer une tarification différenciée. Pour les gens aisés la facture tiendrait compte du coût de l’investissement et des frais d’exploitation de toute cette infrastructure onéreuse. Les pauvres paieraient seulement le prix du moyen d’enlèvement des rejets à leur disposition, qui restera relativement économique puisqu’ils n’ont généralement pas de branchement. Mais c’est plus facile à dire qu’à faire. La teinture sociale du débat politique dans le pays fait que nos leaders se sentent obligés de maintenir en matière d’assainissement des tarifs théoriquement abordables pour une bonne part de la population urbaine.

Faire autrement

Les entreprises privées investissent dans l’adduction d’eau et laissent au service public le soin de déblayer les déchets, ce qui est bien moins rentable. Pour le traitement des déjections humaines, il faut s’orienter vers des systèmes moins coûteux que les réseaux d’égouts classiques. Ce type d’aménagement urbain lourd peut bien fonctionner dans les pays riches, pas dans les pays pauvres. L’Inde dispose de nombreux scientifiques, de spécialistes des fusées spatiales et autres choses : les cabinets ne sont pas dans leur champ de vision. Le changement ne viendra sans doute pas de nos ingénieurs, prisonniers de leurs mentalités et de leurs intérêts bien compris. Il faudra apprendre de ce qui se fait à l’étranger, en veillant à ce que les nouveaux systèmes tiennent compte des contraintes culturelles locales ; sinon on risque d’aller à l’échec.

Le plus important c’est que ces solutions dites alternatives, bien moins gourmandes en eau, soient acceptées par les riches et pas seulement les pauvres. Si l’assainissement écologique passe pour une solution bon marché destinée aux plus démunis, ça ne va pas durer. Les pauvres passeront à autre chose dès lors que leur situation s’améliorera. Pour l’heure, ne perdons pas de vue que c’est la chasse d’eau des gens aisés qui cause le plus de problèmes dans notre environnement.

Palavras-chave

saneamento de água, poluição da água


, Índia

dossiê

« Économie politique de la défécation » (Notre Terre n°23, sept. 2007)

Notas

Traduction en français : Gildas Le Bihan (CRISLA)

Fonte

CRISLA, Notre Terre n° 23, septembre 2007. Sélection d’articles de Down To Earth, revue indienne écologiste et scientifique, publiée par CSE à New Delhi.

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