09 / 2007
Rapide historique
C’est en 1926 que Georges Claude, un des fondateurs de la compagnie l’Air Liquide, présente à l’Académie des Sciences le procédé qu’il a inventé avec Paul Boucherot pour produire de l’énergie à partir de l’eau de mer chauffée par le soleil à la surface de l’océan et de l’eau froide qui remplit les grands bassins profonds sous-jacents. Dans la zone intertropicale la température de l’eau peut atteindre 28 °C en surface et descendre à 4 °C à 1 000 mètres de profondeur.
Pour répondre à ses détracteurs qui prétendent que le fonctionnement de son procédé consommera plus d’énergie qu’il n’en produira Claude réalise une série d’expériences dont une, décisive, à Cuba en 1930, qui lui permet de démontrer que le bilan énergétique global de son procédé est positif. Il faudra attendre la première crise pétrolière de 1973 et la reprise des travaux de développement des énergies renouvelables pour que les Américains et les Japonais réitèrent cette démonstration et optimisent les performances du procédé en utilisant des technologies modernes.
État de l’art
Le principe de l’Énergie Thermique des Mers - ETM - est identique à celui des turbomachines à vapeur utilisant le cycle de Rankine. La différence essentielle entre une centrale ETM et une centrale thermique classique est le domaine des températures des sources chaudes et froides (qui détermine le rendement théorique maximum de la conversion de chaleur en travail) et le choix du fluide de travail.
On distingue deux technologies types qui dépendent du choix du fluide de travail. On parle de l’ETM «cycle ouvert» ou «cycle fermé» selon que le fluide de travail est l’eau de mer elle-même ou un autre fluide, comme l’ammoniac.
Le faible gradient de températures disponible entre sources chaude et froide du procédé ETM conduit à des rendements globaux de l’ordre de 3 à 4 % bien inférieurs à ceux des centrales thermiques classiques. Ceci se traduit par des débits importants en eaux froide et chaude : de l’ordre de plusieurs m3/s par MW électrique net, et à des conduites d’alimentation de grands diamètres dont la technologie limite encore la construction d’usines ETM à des puissances maximales de l’ordre de 100 MW. (1) Ajoutons à cette limite technologique celle des turbines à vapeur ETM «cycle ouvert» fonctionnant à des pressions de quelques kPa qui limite à quelques MW la puissance maximale d’un module de turboalternateur.
Les travaux français sur cette forme d’énergie renouvelable ont cessé depuis l’abandon en 1987 du projet de construction d’une centrale prototype de 5 MW en Polynésie Française. En l’absence d’une veille technique ou d’accord de coopération avec les pays qui sont restés actifs, il est difficile d’apprécier les progrès réalisés récemment à l’étranger sur ces technologies ETM.
Les États-Unis ont plusieurs projets pour Hawaï et pour leurs bases militaires d’outre-mer, dont une de 8 MW pour Diégo Garcia dans l’Océan Indien. La dernière réalisation connue est la centrale ETM «Sagar Shakti» de 1 MW construite en coopération indojaponaise. Elle est adaptée aux besoins de petites communautés littorales en électricité et en eau douce (2). Elle a été présentée en 2001 avant d’être remorquée pour essais sur la côte près de Tuticorin au sud-est du continent.
Coûts
La ressource ETM est du type thermique basse température et par principe son exploitation industrielle requiert des investissements importants, non pas du fait de sa complexité mais parce qu’elle requiert des infrastructures de grandes dimensions. En l’absence de réalisations prototypes de tailles significatives et de durées d’opérations suffisamment longues les estimations des coûts de l’électricité ETM restent évidemment très incertaines.
Des données publiques américaines relativement récentes (3) donnent des valeurs de : 4 500 à 6 000 /kW pour une centrale électrique ETM de 50 MW. Malgré ces coûts élevés, plusieurs facteurs donnent aux promoteurs de l’ETM des arguments favorables au financement nécessaire à son développement :
La ressource ETM est certainement l’énergie marine dont le potentiel exploitable est le plus important, elle est stable, très largement distribuée dans une vaste région de l’océan tropical où se trouvent beaucoup des pays pauvres les plus vulnérables aux effets induits par l’usage des combustibles fossiles,
L’utilisation des effluents d’eau froide sortant de l’usine électrique pour la production d’eau douce, d’air conditionné, etc, devrait accroître notablement la rentabilité des usines ETM dites «multi-produits» situées près du littoral.
Perspectives
Les promoteurs américains et japonais imaginent le développement de l’ETM en trois étapes de difficultés croissantes. L’objectif de la première étape est l’industrialisation de petites usines ETM «multi-produits» répondant aux besoins immédiats de pays du «Sud» ayant un accès direct à la ressource. Elle serait réalisée dans le cadre de l’aide au développement durable en partenariat et avec l’appui technique et financier de la communauté internationale des pays industrialisés. La centrale ETM «Sagar Shatki» déjà citée est le premier exemple d’une réalisation de cette étape. Plusieurs territoires des régions ultra périphériques de l’Union Européenne sont candidats à ce type de réalisation.
Dans la seconde étape, l’expérience acquise pendant l’exploitation des usines de première génération servira à l’extrapolation des technologies vers des unités de capacités de production répondant à la demande de pays industrialisés, d’abord pour alimenter des villes et des régions côtières (4), puis, pendant la troisième étape, pour la production et le transport de combustibles synthétiques à destination du monde entier. (5)
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