08 / 1993
Malgré ses 6 millions d’habitants, la ville de Bogota ne possède pas autant d’immeubles qu’on pourrait le penser. La ville est étendue en longueur et on trouve encore beaucoup de maisons particulières dans la région centrale. En allant vers la périphérie, on voit de nombreux panneaux qui mettent en garde les passants: "Ici on ne vend pas de terrains. Ne vous laissez pas tromper". D’après ce que l’on nous a dit, la pratique de la vente illégale de terrains est très commune.
"Las Palmeras abrite près de 60.OOO habitants et fait partie de la localité de Kennedy dont la population compte 1 million d’habitants. La périphérie de Bogota ressemble tristement à toutes les banlieues des villes d’Amérique latine. Il y manque tout: des installations sanitaires de base, l’eau, l’énergie, un réseau d’égouts, etc... Les habitations qui sont en grande partie la conséquence d’occupations illégales font partie d’un tableau qui, malheureusement nous est très familier.
Nous sommes allés voir une expérience de radio communautaire. Nous avons pris un petit autobus très coloré pour nous rendre dans le quartier de "Las Palmeras". 10 jeunes animateurs de différents quartiers, les "Voceros comunitarios de Kennedy" nous accompagnaient.
Ce groupe de jeunes produit les programmes qui sont ensuite diffusés par les radios de la localité un dimanche sur deux. Ils travaillent sur cinq thèmes: la communauté, la santé, les femmes, la culture et les problèmes sociaux. Leur objectif est l’information et la promotion de la participation communautaire. Ils font partie du réseau "Fiesta de la Palabra" qui rassemble les 10 radios communautaires diffusées dans les 18 lovalités de Bogota.
Selon Blanca Bonna, une des participantes, l’une des préoccupations méthodologiques du groupe est de "travailler en équipe et assumer chacun à son tour la direction du groupe. C’est une bonne chose, parce que cela permet à chacun de voir quelles sont les difficultés que l’on rencontre lorsqu’on dirige un groupe". Blanca nous signale que l’un des problèmes vient de la fréquentation des "Juntas de Accion Comunal" (JAC)qui n’ont pas toujours conscience de la valeur de la communication. En collaboration avec la communauté, le groupe choisit les thèmes pour les programmes et fait l’évaluation du travail. "Mais ce n’est pas facile", affirme Martha Bernal, conseillère et collaboratrice du groupe. "Pour y arriver, il nous faut 6 mois. C’est au cours de ces mois que nous organisons les interviews qui seront diffusées à la radio. Nous profitons également d’un certain temps d’adaptation pour permettre aux gens d’intégrer les "Voceros".
Alors que nous sommes en pleine conversation, un monsieur s’approche de nous et nous pose (comme on pouvait s’y attendre)mille questions sur le Brésil. Nous lui parlons du travail que nous faisons à DIALOGO en collaboration avec des groupes sociaux et des groupes communautaires. Nous évoquons rapidement la situation sociale du pays, le chômage, le manque de conditions de vie décentes, etc...
Après nous avoir "situés", il nous informe qu’il est ouvrier dans la construction civile. "Il y a 8 ans que je suis arrivé ici, au tout début de "Las Palmeras". Le quartier s’est formé comme la plupart des quartiers de Bogota, avec des paysans qui avaient fi la guerilla (obs: il fait aucune mention de l’armée)et qui cherchaient un moyen de survie. Chaque jour, un nouveau quartier surgit dans la ville", dit-il en souriant, en pensant qu’il va nous impressionner en nous divulgant l’information qui suit: "Vous voyez, Mademoiselle, cette maison-là a été la première construite ici, celle où se trouve actuellement le siège de la JAC et de la radio. Nous nous en servons aussi pour publier les faire-part de décès, pour aider les gens qui sont dans le besoin, etc... Martha Bernal ajoute "cette station de radio est écoutée par 150 familles mais il n’y en a que 50 qui la reçoivent dans de bonnes conditions. De nombreuses organisations apportent leur appui à ce travail, mais ce sont les luttes et l’organisation de la communauté-même qui sont garantes des victoires."
Martha nous eexplique que Bogota a un "Alcaide Mayor" (un maire principal)et 18 "alcaides menores" (maires d’arrondissements)qui sont élus par les JAL (Juntas de Administracion Locale), elles-mêmes élues directement par les habitants. "Et que fait le maire principal?" lui demandons -nous. Martha nous répond d’un ton incisif: "Rien. Il ne prend aucune responsabilité. Les quartiers sont dans un état de total abandon".
Intéressé par des contacts avec des "gens d’autres pays", José le trésorier nous explique que Bogota se trouve dans la province de Cundimarca et qu’elle est voisine des départements de Tolima, Boyacan et Los Llanos.
radio, réflexion collective, valorisation de l’expérience
, Colombie, Bogotá
Cette visite a fait partie de l’accord bilatéral sud Brésil-Colombie, soutenu par la Fondation pour le Progrès de l’Homme (FPH)et auquel ont participé les organisations DIALOGO (Florianopolis, Brésil), ENDA-AL et CINEP (Colombie). Le but de cet accord est d’échanger des expériences dans le champ de la communication populaire. Les résultats sont précieux: il permettent de troquer du matériel, des expériences, des visions du monde, en plus de la contribution qu’ils apportent à la valorisation et à l’auto-affirmation de ces groupes qui font un travail important dans le domaine de la communication populaire. Dans le cas de l’Amérique latine, ce travail de résistance et d’ocupation de l’espace social a été un instrument de valeur pour que les habitants prennent conscience qu’ils sont aussi des citoyens et pour leur permettre de d’exprimer, ce qu’ils n’ont pas toujours les moyens de faire.
Fiche originale en portugais: MFN 2468
Autre
TRAMONTE, Cristiana (BRESIL)
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