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Tourisme, trafic et toxicomanie au Sénégal

11 / 1993

Le Sénégal est une des plaques tournantes du trafic de toutes les drogues (en particulier des drogues dures, cocaïne et héroïne)en Afrique de l’Ouest. Cette place prise dans le trafic international, depuis la seconde moitié des années quatre-vingt, tient d’une part au fait que la situation géographique de ce pays en fait un carrefour commercial. Il constitue en outre une terre d’accueil pour les ressortissants de nombreux pays de la région, en particulier pour les Guinéens et les Maliens. Il entretient afin des liens très étroits avec la France où vit une importante colonie sénégalaise. Le trafic des drogues dures a des retombées locales qui s’ajoutent aux consommations plus anciennes de solvants, de marihuana et de médicaments psychotropes. En effet, l’exode rural et l’éclatement des structures familiales, la crise économique qui s’approfondit, l’impact négatif sur l’emploi des politiques d’ajustement structurel, la perte d’autorité de l’Etat provoqué par une corruption endémique, sont autant de facteurs aggravants du point de vue de la consommation des drogues. Le Sénégal attire enfin de nombreux touristes européens parmi lesquels se trouvent des usagers de drogues qui contribuent à en banaliser la consommation parmi la jeunesse sénégalaise.

Le Sénégal est en effet le seul pays de mer et de soleil garantis pour les capitales européennes, sans changement de fuseau horaire. Il renferme des zones très attractives - stations balnéaires de la Petite Côte, parcs naturels du Saloum et de Casamance, etc. - et un parc hôtelier permettant un accueil de bonne qualité. Le tourisme, avant de connaître un coup d’arrêt du fait de la rébellion de la Casmance en l991, représentait, en moyenne, près de 200 millions de dollars de recettes annuelles, c’est à dire l’équivalent de 25% du montant des exportations.

Parmi les zones les plus recherchées figure la Petite Côte, zone balnéaire qui s’étend sur une quarantaine de kilomètres au sud de Dakar. Sa capitale, MBour (près de 100 000 habitants), offre des milliers de lits dans les hôtels, les villages de vacances ou chez l’habitant. Parmi les touristes, dont les plus nombreux sont les Allemands, suivis des italiens et des Français, on trouve des résidents semi-permanents, parfois mariés à des autochtones.Ils sont attirés par un coût de la vie relativement bas, le soleil et la mer, la prostitution féminine et masculine et de la drogue, particulièrement de la marijuana, bon marché. Elle provient de régions relativement prôches, la Gambie et la Casamance.

A MBour, les grossistes sont souvent des hôteliers et des commerçants. Ils utilisent comme lieu de stockage de la marijuana un village de lépreux, dans lequel la police hésite à s’aventurer, qui n’est situé qu’à quelques kilomètres de MBour. Les petits dealers se recrutent en particulier parmi les "antiquaires" - revendeurs d’objets artisanaux fabriqués sur place - car ils sont en contact permanent avec les touristes. La revente se fait aussi à travers les "boys", personnes à tout faire au service de ces derniers.

Mais certains de ces touristes importent également de la cocaïne et de l’héroïne d’Europe pour leur consommation personnelle. Le passage de la drogue est rendu facile par le fait que pratiquement aucun contrôle n’est exercé sur les groupes arrivant à l’aéroport de Dakar. Certains d’entre eux passent même directement de l’avion dans le minibus qui les conduit dans les hôtels, sans avoir à franchir la douane. Ces touristes, consommateurs de drogues dures, en font bénéficier leurs amis sénégalais. Il est probable que les usagers tendront à s’appromvisionner de plus en plus fréquemment sur le marché dakarois où l’héroïne est meilleur marché qu’en Europe. Le gouvernement sénégalais, qui est à court de devises, ne prend aucune mesure de contrôle des mouvements de ces étrangers qui pourrait les décourager de rester dans le pays ou dissuader leurs compatriotes de s’y rendre.

Mots-clés

drogue, tourisme, secteur informel, délinquance, héroïne, cocaïne, cannabis, consommation de drogue, toxicomanie, trafiquant


, Sénégal, Petite Côte

Commentaire

L’impact du tourisme sur la toxicomanie en Afrique est signalé dans plusieurs pays, en particulier au Togo, en Gambie et en Guinée Bissau. C’est un phénomène que l’Union Européenne, qui se propose d’aider à la lutte contre la drogue sur ce continent, se devrait de prendre en compte.

Notes

Nature = Enquête

Source

Autre

DIAGNE, Thierno, OGD=OBSERVATOIRE GEOPOLITIQUE DES DROGUES

OGD (Observatoire Géopolitique des Drogues) - France

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