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L’initiative habitante au coeur de l’aménagement des quartiers pauvres de Boston : Dudley Street Neighborhood Initiative

Cécile FLEUREAU

06 / 2002

Dans les années soixante-dix, le quartier de Roxbury à Boston a connu un processus de dégradation important. Celui-ci a été accéléré par un programme expérimental d’accession à la propriété en direction des ménages noirs à faibles revenus qui a fait fuir les couches moyennes blanches et par le désinvestissement des propriétaires, du secteur bancaire et de la municipalité sur le quartier. õ cette époque, 1 700 parcelles sont abandonnées dans le quartier. Des maisons sont incendiées par les propriétaires pour toucher les primes d’assurance. Cette période a laissé des marques : abandon du quartier, dépôts d’ordures, terrains vagues. Pour faire face à cette situation, les habitants se sont organisés, créant Dudley Street Neighborhood Initiative (DSNI) en 1984 : une association communautaire localisée sur les quartiers de Roxbury et de Dorchester où vivent 24 000 habitants dont 40 pour cent sont Afro-Américains, 30 pour cent Latinos, 20 pour cent Capverdiens et 10 pour cent Blancs. Aujourd’hui encore, ce quartier est l’un des plus pauvres de Boston : le taux de chômage de 16 pour cent est le double de celui de Boston et le taux de pauvreté atteint 32 pour cent de la population. DSNI intervient dans un quartier où sont implantées 3 CDC dont les actions doivent s’inscrire dans le projet global décidé par DSNI.

Aménagement

L’objectif de DSNI est de "revitaliser" le quartier à différents niveaux : urbanistique, environnemental, économique et humain. Son action a porté dans un premier temps sur l’accession au logement pour les plus pauvres. Ce projet a pu être réalisé grâce au droit de préemption délégué par le maire de Boston à DSNI qui devenait ainsi la seule association pouvant acquérir les terrains abandonnés sur son territoire. Le soutien financier de la fondation Riley et la donation de 2 000 000 $ de la fondation Ford ont permis à DSNI d’acheter des terrains vacants sur lesquels elle a fait construire des maisons qu’elle vend à des prix abordables. Les acheteurs ne paient que 60 pour cent du coût de construction qui s’élève à 200 000 $ (228 670 euros) par maison. DSNI a réalisé 140 logements sur un programme de 200 logements.

L’association veille aussi au maintien des prix des logements du quartier pour éviter un processus de gentrification (du mot gentry qui signifie embourgeoisement) qui obligerait les plus pauvres à partir. En effet, restant propriétaire des terrains, elle contrôle le prix de revente des habitations, évitant ainsi toute spéculation. Les propriétaires ne possèdent que les murs.

Vie associative

L’association emploie 12 personnes qui sont chargées du développement social et de l’aménagement du quartier. Ce sont cependant les résidents qui sont les réels décisionnaires, les experts sur leur quartier. Moins de 15 pour cent des habitants du quartier sont adhérents à DSNI. Parmi eux, 300 à 350 personnes votent tous les 2 ans pour élire le conseil d’administration qui a en charge le recrutement du personnel. Ce conseil compte 29 membres dont 16 sont des résidents répartis à égalité entre les différentes communautés ethniques et 13 sont des partenaires.

Description du conseil d’administration

- 16 résidents : 3 Afro-Américains, 3 Latinos, 3 Capverdiens, 3 Blancs, 2 jeunes entre 15 et 18 ans, 2 résidents

- 13 partenaires : 7 issus des services sociaux, 2 issus des entreprises, 2 issus des CDC, 2 issus des églises

Ni la municipalité, ni aucun financeur ne peut être administrateur, cela afin que seuls les intérêts des habitants guident les décisions. Un bureau est élu par le conseil d’administration et chaque administrateur doit participer à l’un des 11 comités thématiques (environnement, développement économique, éducation, etc.). Ces comités décident des actions menées par DSNI. Ils choisissent la réalisation des aménagements qu’ils souhaitent pour leur quartier et organisent aussi la vie sociale. DSNI a, par exemple, aménagé l’arrêt de bus pour les écoliers selon le souhait des habitants et installé ainsi une grande horloge pour les retardataires ! DSNI s’attache aussi à former des leaders afin que ceux-ci se mobilisent dans les comités.

Le comité du développement durable, par exemple, a été instauré pour les personnes et les sociétés ayant un projet de développement sur le quartier. Ces personnes doivent rencontrer le comité, répondre à un questionnaire et respecter les normes décidées par DSNI comme la taille et la qualité des logements que souhaite construire un promoteur. Le comité peut refuser, par exemple, les chaînes de magasins. Les comités ont aussi étudié la proposition de la municipalité de Boston d’implanter un complexe sportif. Pour se positionner, DSNI a examiné la nature et le nombre d’emplois créés, les impacts économiques du projet, l’accessibilité pour les habitants du quartier et a comparé les coûts et les bénéfices d’un tel équipement. DSNI a finalement donné un avis négatif sur le projet et la municipalité l’a retiré.

Mots-clés

quartier urbain, participation des habitants, aménagement urbain, logement, lutte contre l’exclusion, transformation urbaine


, Etats-Unis, Boston

dossier

Expériences de démocratie participative

Notes

Contact: Dudley Street Neighborhood Initiative, 504 Dudley Street, Roxbury, MA 02119, Etats-Unis. - Tél. : (617) 442-9670 - Fax : (617) 427-8047 - urbanvillage@dsni.org - www.dsni.org

L’histoire de DSNI est décrite dans l’ouvrage Streets of Hope, the fall and rise of an urban neighborhood de Peter Medov et Holly Sklar, South End Press, 1994.

Entretien avec Ros Everdell, directrice du développement communau

Source

Entretien

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