Georges THILL, Jean-Paul LEONIS
09 / 2001
Dans le cadre du programme STRIDE (Direction générale Sciences, recherche et développement de la Commission européenne), le réseau européen DYNMED (Dynamiques Méditerranéennes), en lien avec le réseau des Associations rurales européennes (APURE), a fait apparaître à quel point une approche territoriale pour le développement durable peut, grâce à une série de recherches intégrant la participation des savoir-faire des populations habitantes et faisant appel à toutes les potentialités locales, contribuer à un développement soutenable dans des zones rurales périphériques et des îles de l’Union européenne.
Le territoire doit être considéré comme une structure complexe dont la recherche doit permettre de comprendre les spécificites des dynamiques de développement ; elle doit permettre en même temps d’identifier les catégories d’acteurs et les situations qui favorisent leurs démarches innovantes ou qui, à l’inverse, les freinent; enfin, il s’agit de comprendre où et quand apparaissent des facteurs de blocage et pourquoi et comment ceux-ci constituent des noeuds d’étranglement qui ne permettent point un développement soutenable et peuvent même aller jusqu’à générer des comportement de résistance ou de rejet à sa mise en oeuvre. L’approche territoriale d’une recherche-action pour le développement durable, comme cela a été mis en avant par le réseau DYNMED, ne peut simplement s’appuyer sur des théories et des modèles de développement classique, selon lesquels le territoire n’est qu’un simple support d’activités à utiliser ou à exploiter et éventuellement à quitter au gré des impératifs de rentabilité économique et financière. L’approche doit souligner la nécessité de réintroduire le territoire concret comme élément constitutif majeur des mécanismes économiques et de l’organisation de chaque entité spatiale.
A cet égard, l’importance des acteurs, leur place dans les fonctionnements sociaux et surtout dans les réseaux de proximité, leur mode d’implication dans des actions et de processus innovants, sont essentiels, ainsi que leur formation ou, ce que l’on oublie souvent, leur demande de formation. Des organismes d’intermédiation ou d’interface, notamment les structures d’enseignement supérieur ou de recherche scientifique, les centres de recherche et de diffusion des connaissances jouent ici un rôle déterminant, à condition que ces structures-relais soient vraiment en phase avec la demande locale, comme le montre la réalité corse avec le CRIT de Corté et le FORTH en Crète.
Des réseaux associatifs peuvent se constituer autour de groupements d’entrepreneurs, de partenariats publics et/ou privés et d’acteurs porteurs d’initiatives endogènes, mais ouverts à l’intégration de facteurs et de technologies exogènes pour que le développement, s’il se veut autosoutenable, puisse être, comme l’a souligné Joseph Ki-Zerbo au premier forum PRELUDE de Dakar en 1987, un passage de soi à soi vers un niveau supérieur en assimilant tout ce qui peut contribuer organiquement et socio-historiquement à ce passage.
Il est utile de mesurer à quel point le patrimoine naturel et culturel, qu’il s’agit de penser comme indissociable, constitue un levier pour le développement local durable, à condition, une nouvelle fois, de favoriser une véritable démocratie participative pour un développement intégré du territoire qui suppose comme essentielle la prise en considération des dimensions culturelles au côté de l’économique et du social. La recherche-action menée à Mahdia, en Tunisie, et portant notamment sur la question du logement et du rôle des femmes - dont il faut remarquer qu’il est essentiel à tous les stades du développement et, de surcroît, se révèle être une entrée très pertinente en matière de recherche-action pour l’analyse des territoires - est éclairante sous cet angle. Il apparaît ainsi que, en matière de politique du logement social en Tunisie, la maison recouvre des réalités et des rêves bien différents selon les catégories sociales et qu’en particulier l’aménagement du logement est un facteur-clé de la réussite de cette politique pour les populations les plus défavorisées lorsqu’elles accèdent au développement. Les dimensions culturelles, dans une politique de logement social, à condition d’être menées en partenariat associant en réseau, dans et hors le territoire, les forces vives de ce territoire (élus, responsables associatifs, collectivités locales, commerçants, artisans, agriculteurs, universitaires et chercheurs travaillant avec les populations locales...) sont un vecteur essentiel de transformation et d’évolution des mentalités au sein des familles pour dépasser à la fois la résistance de la tradition et le mythe de la modernité. Ici, le fait d’être en réseau associatif a été perçu à Mahdia comme une médiation optimale pour réussir un habitat viable et vivable.
habitat rural, milieu rural, réhabilitation de l’habitat, développement intégré, développement local, réseau de citoyens, recherche participative, recherche interdisciplinaire, partenariat, acculturation, valorisation du savoir faire, échange de savoirs
, Pays méditerranéens, Crète, Corse
Le territoire constitue un facteur-clé dans le cadre du développement durable, souvent trop négligé, mais il doit être perçu comme un territoire pour l’homme, à aménager de façon telle qu’il respecte la culture des populations en s’y enracinant vraiment. Il faut qu’il ne s’en tienne pas à de simples aspects traditionnels car il s’agit de dépasser, pour la viabilité du développement, les clivages classiques moderne/traditionnel, économie/culture, social/technique, sciences/culture, endogène/exogène. L’intermédiation, pour la communication, des réseaux associatifs se manifeste comme essentielle dans une approche territoriale de l’innovation et du développement soutenable dans des régions fragiles.
Compte rendu de colloque, conférence, séminaire,…
Josy Richez-Battesti, PRELUDE, Pour une approche territoriale de l'innovation et du développement soutenable dans les îles et régions rurales périphériques de l'UE, Georges Thill, 2000 (Belgique), numéro spécial hors série, p.677-684, Séminaire international Tunis-Hammamet, mai 2000
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