Abdul Aziz SECK, Alphonse Samba TINE
08 / 1999
Abdul Aziz SECK, conseiller élu de la Communauté Rurale de Notto (Sénégal): "La concertation a un bel avenir ici chez nous. Qu’on le veuille ou non, elle va se faire car c’est dans les habitudes africaines, la palabre. Maintenant que l’Etat a fait la décentralisation, la Communauté Rurale de Notto est une "Collectivité locale" ; donc nous sommes liés par le sort, qu’on le veuille ou non. Beaucoup d’actions de développement nous incombent maintenant. Nous ne pouvons plus dire : "l’Etat, l’Etat...".
1. Les jeunes
Il y a donc cette obligation de concertation avec l’Etat mais aussi la prise en compte de la jeunesse (la pyramide démographique a une base très large et un sommet très rétréci). Les jeunes veulent accéder au développement. Ils sont les plus nombreux au niveau de la population. Donc, de façon inéluctable, la concertation se fera. Seuls quelques individus avec des intérêts plus ou moins égoïstes essayent de retarder cette concertation mais tôt ou tard elle aura lieu parce que les jeunes veulent s’en sortir.
La concertation appartient à tout le monde. D’abord la loi aujourd’hui nous impose cette concertation. Les différentes lois qui sont à la base de la décentralisation, les différents "domaines" de compétence qui ont été transférés aux Collectivités locales imposent une concertation entre tous.
2. Les ONG
ONG c’est Organisation Non Gouvernementale ; leur but est humanitaire ; donc si quelqu’un crée une ONG et part à l’extérieur demander un financement, je crois qu’en son âme et conscience c’est pour aider au développement, c’est pour aider les pauvres à s’en sortir. Si les ONG sont de bonne foi, elles devraient aussi accepter cette concertation. Et la loi leur imposera cela parce que certains articles de la Loi sur la décentralisation donnent pouvoir à la collectivité locale d’imposer la concertation à l’ONG. Sinon la collectivité locale peut sanctionner l’ONG.
3. L’Etat
L’Etat sénégalais, de par sa souveraineté nationale, de par son suffrage universel, a obligation aussi d’imposer la concertation. Même si, pour des intérêts individuels plus ou moins inavoués, certains essayeront d’empêcher la concertation parce que la concertation amène la transparence. La transparence peut-être n’arrange pas certains intérêts.
Au niveau du Conseil rural qui administre la Communauté rurale, là aussi c’est un peu compliqué à cause de la politique. Le Parti au pouvoir aujourd’hui (en août 1999 le Parti Socialiste), ses représentants, c’est pratiquement l’ancienne oligarchie. Ils sont là, ils ont intégré certaines organisations populaires qu’ils contrôlent, ils sont majoritaires dans le Conseil Rural. N’empêche qu’il y a aujourd’hui une dizaine de conseillers de l’opposition qui regardent et qui surveillent. Ce qui pourrait arranger les choses, c’est aussi que l’administration représentée par le Sous-Préfet joue le jeu. Mais, jusqu’à présent, nous n’en sommes pas encore là. Nous espérons que, petit à petit, la "nouvelle vague" ira aux responsabilités et, si on a confiance en elle, beaucoup de choses seront rétablies".
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, Sénégal, Notto
Ce court texte indique combien la "concertation" entre les acteurs privés et publics, locaux et étrangers du développement local est en 1999 à la mode au Sénégal ; un pays "sur-administré du haut" durant les 40 années précédentes, il faut le reconnaître.
Cette fiche est extraite d’une interview enregistrée à la fin d’une réunion portant sur le thème : la décentralisation au Sénégal et le rôle des ONG d’appui. Il est représentatif de l’état d’esprit d’un élu local clairvoyant, avant le vote qui a entraîné l’alternance politique en 1999.
Entretien avec SECK, Abdul Aziz, réalisé à Thiès en août 1999.
Entretien
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