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dialogues, propositions, histoires pour une citoyenneté mondiale

La position de l’Eglise catholique du Rwanda sur la réconciliation nationale

Cyril MUSILA

04 / 1999

Les chrétiens du Rwanda, soit plus de 75% de la population, ont encore du mal à s’engager résolument dans un processus nécessaire de dialogue et de réconciliation nationale. Ils sont pris dans les contradictions, des logiques de vengeance ou de pardon. Dans les prêches des Eglises, l’usage des termes ’réconciliation’, ’pardon’, est souvent fort mal reçu par les rescapés du génocide. Selon ces derniers, l’Eglise voudrait répéter des erreurs du passé, en professant de vite tourner la page sur la tragédie encore fraîche. Certains prédicateurs ont été brusquement interrompus en parlant de réconciliation: ’comment se réconcilier quand personne ne demande pardon? ’

Reconnaissant que les pratiques pastorales n’étaient pas suffisamment affinées pour faire face à ces nouvelles situations, les Eglises se posaient cette question: ’comment créer dans les communautés, dans les villages et villes, dans les collines un environnement favorable à la repentance et au pardon? ’ Elles étaient convaincues que le message évangélique du pardon prêché dans les églises, refrénant les tendances aux vengeances individuelles, devrait ouvrir la voie à la justice et à la recherche du pardon. Mais comment y parvenir d’autant plus que dans ces assemblées se côtoient des rescapés du génocide, des citoyens qui, impuissants et terrorisés, avaient assisté au génocide, des complices du crime à des degrés variés et même des criminels qui avaient activement participé aux massacres?

A l’occasion des fêtes de Noël et du Nouvel An 1997 et en résumant trois ans de vie d’après génocide, les Evêques Catholiques du Rwanda avaient fait une déclaration dans laquelle ils manifestaient leur inquiétude au sujet de l’insécurité régnant dans le pays, compromettant ainsi sérieusement le processus de réconciliation et de paix dans lequel le Rwanda devait s’orienter. Ils demandaient, notamment à l’autorité publique, de protéger la vie et d’abandonner la logique de guerre au profit de la tolérance et de l’acceptation mutuelle, et aux chrétiens de devenir des ferments de réconciliation et de paix.

Et du 19 au 21 aoùt 1997, une conférence réunissant des politiques et des ecclésiastiques s’était tenue à Kigali sur le rôle de l’église dans la restauration de la paix et de la justice au Rwanda.

La conférence invitait l’Eglise et l’Etat rwandais à se constituer en partenaires pour réfléchir sur la nécessité et la possibilité d’instaurer un processus de réconciliation similaire à celui amorcé en Afrique du Sud (Commission Justice et Réconciliation)afin de faire la lumière sur ce qui s’était passé. Faisant des Eglises le terrain le plus propice pour le travail de la Commission, cette initiative devrait, selon la conférence, être politiquement neutre et distancer toute récupération politique. La visite des prisonniers, l’entretien avec eux étaient une étape importante dans la recherche de la vérité et de la réconciliation. Mais ces préoccupations de L’Eglise n’ont pas toujours été bien reçues par certaines sensibilités qui ont interprété ces appels à la réconciliation, au pardon ou respect des prisonniers comme des prises de position contre les rescapés du génocide et pour les assassins.

De leur côté, les Missionnaires d’Afrique, mis en cause dans le génocide, mal à l’aise devant des thèses parfois malveillantes qu’on leur imputait et conscients des imperfections ou des fautes commises au cours de ce siècle de leur engagement missionnaire, s’étaient engagés à une remise en question afin de faire la vérité sur cette entreprise évangélique.

Mais ensemble, religieux, prêtres et laïcs semblent aujourd’hui s’être engagés dans des préoccupations orientées vers une justice transparente apte à réconcilier les Rwandais et surtout dans les efforts à améliorer les conditions des détenus dans des prisons surpeuplées, l’assistance accordée aux veuves et aux orphelins ou à trouver des moyens de fournir des avocats aux inculpés. Les politiques ont-ils le même souci?

Mots-clés

église catholique, réconciliation nationale, justice, génocide, paix, médiation pour la paix


, Rwanda

Commentaire

Le génocide avait détruit la confiance entre les Rwandais et continue d’avoir des conséquences néfastes sur la région des Grands Lacs. La justice légale, celle des codes, instrument nécessaire mais limitée par ses méthodes a besoin, à notre avis, des travaux complémentaires, dont celui des Eglises ou des politiques, pour accompagner la justice des cours et des tribunaux, assurer à chacun le droit de vivre en paix afin d’instaurer une confiance génératrice de paix. L’apport de L’Eglise est une recherche de consensus et une démarche de restauration de la confiance.

Notes

Fiche réalisée dans le cadre de l’atelier ’Religion et Paix’, La Haye, mai 1999, à partir d’un résumé des points de vue développés par plusieurs auteurs dans la Revue chrétienne Dialogue. Pour plus d’informations vous pouvez contacter l’auteur à l’adresse suivante : 66 rue des Cascades 75020 Paris Tel/Fax : (33)-01. 43. 49. 05. 82

Source

Articles et dossiers

Dialogue, 1997/12 (Belgique), 201

Centre de Recherche sur la Paix - Institut catholique de Paris - 21 rue d’Assas, 75006 Paris FRANCE- Tel 33/01 44 39 84 99. - France - www.icp.fr/fasse/crp.php

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