La fondation Charles Léopold Mayer peut-elle peser sur la très vaste question de la réforme de l’action publique ?
10 / 1999
L’idée de processus publics de débat sur la décentralisation et l’intégration régionale commence à se diffuser en Afrique. La fondation Charles Léopold Mayer a contribué à faire émerger ce thème et contribue à définir les modalités de sa mise en débat. C’est un exemple d’action à long terme qui à participé à l’évolution d’une réflexion d’ensemble dans un continent. C’est aussi le fruit d’une longue histoire dans laquelle s’opère un va et vient entre le Nord et le Sud, entre la réflexion et l’action, entre les concepts et les réseaux humains. A l’origine, l’action du programme ETA de la fondation était centrée sur le renouvellement des relations entre l’Etat et la Société. Mais, les fonctions de l’Etat ne sont pas les mêmes d’un pays à l’autre. Beaucoup des fonctions qui relèvent en France de l’Etat relèvent dans d’autres pays des collectivités locales. Nous avons donc progressivement pris conscience de la nécessité de poser plus globalement les problèmes de gouvernance et d’élargir la définition de la gouvernance, par rapport à l’usage du mot anglais "governance" qui renvoie de façon limitée à l’administration publique. Pour nous, la gouvernance recouvre l’ensemble des mécanismes de régulation dont se dotent les sociétés. Une telle définition large est fondamentale pour y inclure les rapports qui se nouent entre les pouvoirs publics. Nous avons également progressivement pris conscience, en nous appuyant notamment André Talmant et moi sur notre pratique de fonctionnaire, du fait que c’est l’articulation des échelles de gouvernance qui était aujourd’hui essentielle. En même temps, à travers la réflexion préparatoire à la plate-forme pour un Monde Responsable et Solidaire, nous avions compris qu’une gestion démocratique du monde de demain passait par la construction progressive d’espaces économiques et politiques supranationaux pour constituer des régions du monde.
En parallèle, à partir de 1990, nous avons soutenu un ensemble d’actions et de réflexions visant à définir de nouvelles références pour l’action publique dans les quartiers d’habitat populaire des villes. Ce cheminement, marqué par une série de rencontres internationales dont les conclusions ont été concrétisées par des déclarations (Caracas, Salvador, Récife, Istambul), nous a amené à appuyer la constitution de réseaux internationaux d’habitants et à proposer d’autres formes de relation entre habitants, élus locaux et professionnels des villes. C’est ce qui nous a permis d’obtenir des cofinancements de l’Union Européenne et de la Coopération Française pour une rencontre interafricaine de Dakar en 1998, centrée sur ces questions. Elle a mis en évidence le fait que la décentralisation, réduite au transfert de pouvoir de l’Etat aux collectivités locales, ne présentait d’intérêt réel que si elle s’accompagnait de nouvelles formes de relation entre les pouvoirs publics et la société. C’est le croisement d’une question urgente pour l’Afrique, la décentralisation, qui était à l’ordre du jour dans la plupart des pays, et de références amenées de l’extérieur qui est alors source de crédibilité et d’innovation.
Conscients de cette double nécessité d’approfondir décentralisation et intégration régionale, la FPH a proposé à ses partenaires africains, en 1997, deux processus de réflexion, l’un sur la décentralisation et l’autre sur l’intégration régionale. Nous voyions bien en effet que les acteurs sociaux n’avaient guère les moyens d’échanger à l’échelle internationale sur ces questions décisives pour leur avenir. Ce sont ces partenaires eux-mêmes qui nous ont fait observer que les deux questions étaient liées et qu’il fallait un processus de débat public associant décentralisation et intégration régionale. C’est ce processus qui va démarrer.
gouvernance, Etat et société civile, décentralisation, intégration régionale, subsidiarité active, pouvoirs publics
, Afrique
L’idée d’un débat public associant décentralisation et intégration régionale fait actuellement son chemin et beaucoup des éléments conceptuels (par exemple le principe de subsidiarité active)et méthodologiques (la construction du débat sur une base collégiale, chaque milieu ayant à apporter son point de vue)viennent de nos propositions. Celles-ci ne sont pas le produit d’un travail intellectuel. Ce sont de nombreux allers et retours au niveau international qui permettent progressivement à de nouvelles représentations de prendre forme. De même, l’idée d’une démarche collégiale suppose que différents réseaux interafricains soient constitués ou en cours de constitution : collectivités locales, habitants des quartiers d’habitats populaires, jeunes, organisations paysannes, etc. Une dynamique interafricaine va actuellement dans ce sens et nous y avons contribué activement. Le processus tel qu’il est conçu est le produit de ces multiples interactions. Peu importe d’où viennent les idées, ce qui compte c’est qu’elles soient jugées utiles et soient donc appropriées. En sens inverse, si ce processus de débat se développe en Afrique, il pourra servir de référence pour d’autres continents y compris l’Europe.
De nombreux documents balisent ce cheminement : les déclarations de Caracas, de Salvador, de Récife, d’Istambul et de Dakar, le livre "l’Etat au Coeur", les notes successives de problématiques faites par la fondation et ses partenaires africains.
Texte original
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