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Le parallèle entre agriculture biologique et commerce équitable

Une reconnaissance par la réglementation

Laure DE CENIVAL

04 / 1998

Apparue en Allemagne dans les années 1920, l’agriculture biologique a une histoire longue et mouvementée, influencée par divers courants philosophiques et sociologiques. Depuis l’époque des pionniers, qui refusaient l’évolution matérialiste de l’agriculture, ce mode de production a connu un essor important, marqué toutefois par des dissensions internes fortes, tant sur le plan technique que politique. En France, à partir de la reconnaissance officielle du mouvement en 1980, la réglementation a évolué rapidement. Depuis 1991, elle est même harmonisée au niveau européen pour les produits végétaux. Par ailleurs, dans le cadre de la nouvelle politique agricole commune, des aides sont octroyées aux agriculteurs, sous forme de subventions à la conversion et au maintien.

Longtemps ignorée ou dénigrée par les tenants de la modernité, l’agriculture biologique suscite un intérêt croissant des consommateurs, soucieux de leur santé, souhaitant retrouver le goût authentique des aliments, et même pour certains, voulant marquer un engagement éthique (protection de l’environnement et de la qualité de la vie). Ce mode de production agricole attire également de plus en plus d’acteurs conventionnels du monde agricole, cherchant à rompre avec des systèmes de production intensifs, qui ont clairement montré leurs limites, tant au plan de l’environnement que du développement socio-économique local.

Si, comme l’agriculture biologique, le commerce équitable pouvait se prévaloir de plus de 70 ans d’expérience, quel serait son niveau de développement et l’état de sa réglementation ? Imaginons que nous sommes à la fin des années 2030... A la toute fin du XXe siècle, l’officialisation et la réglementation du commerce équitable ont été les facteurs structurant du mouvement en Europe.

Des alliances internes à la reconnaissance officielle

C’est l’IFAT (International Federation for Alternative Trade), créée en 1989, qui a permis de rassembler les différents acteurs du commerce équitable, au Nord et au Sud, au-delà des luttes idéologiques et des diverses options commerciales (circuits alternatifs des Magasins du Monde ou circuits conventionnels des labels). En Europe, des plates-formes nationales opérationnelles se sont constituées progressivement, permettant l’adoption, au niveau de chaque Etat-membre de l’UE, de chartes contenant les règles communes acceptées par les importateurs, les transformateurs et les distributeurs, et appliquées dans les relations avec les groupes de producteurs au Sud. Ces premières chartes précisaient les normes de qualité, établissaient un classement des produits équitables avec l’attribution d’étoiles, et prévoyaient les modalités de contrôle tout au long de la filière.

Ayant dépassé ses querelles intestines, le mouvement équitable finit par obtenir une reconnaissance au niveau national, puis au niveau communautaire. L’appellation commerce équitable fut désormais protégée dans des textes officiels, qui en définissaient le contenu. L’UE, considérant que le commerce équitable correspondait aux objectif de sa politique de coopération, décida en outre d’en favoriser le développement grâce à une ligne budgétaire spécifique. Enfin, elle garantit des conditions de concurrence loyale entre les protagonistes et une information adéquate des consommateurs.

La réglementation

Dans un premier temps, des commissions nationales furent chargées d’homologuer les cahiers des charges du commerce équitable, appliqués par les organismes privés gestionnaires de labels, dans chaque Etat membre.

Puis un règlement, basé sur des pratiques existant depuis longtemps et reconnues au plan international par l’ensemble du mouvement, fut adopté au niveau de l’UE. Les méthodes d’étiquetage et le contrôle des produits équitables furent désormais harmonisés ; l’ensemble de la filière fut soumise aux mêmes règles dans tous les pays de l’Union. Cette clarification du marché permit de donner une plus grande crédibilité et un nouveau dynamisme au mouvement, en renforçant les garanties données aux consommateurs et en permettant une valorisation des efforts des acteurs économiques engagés dans cette voie.

Le contrôle de la commercialisation des produits équitables

Pour être commercialisé, tout produit dit "issu du commerce équitable" doit désormais subir le contrôle et obtenir la certification d’un organisme officiellement agréé, choisi par l’opérateur (importateur ou transformateur), et qui intervient aussi au niveau des producteurs, soit directement, soit via un correspondant local. Ces organismes sont supervisés dans chaque État-membre par les pouvoirs publics, qui transmettent leur liste à la Commission européenne. Pour recevoir l’agrément au niveau national, ils doivent répondre aux critères d’indépendance, d’impartialité, d’efficacité et de compétence, tels que définis par le règlement communautaire, et les dispositions de la norme européenne EN 45011 relative aux organismes chargés de délivrer la certification de produits.

L’identification du produit équitable passe par l’étiquetage et la publicité, qui sont soumis à des règles précises, permettant de garantir leur origine aux consommateurs. Le nom de l’organisme certificateur est obligatoire sur tous les produits.

De plus, un logo Commerce équitable permet de reconnaître facilement le produit. Il garantit le respect de la réglementation européenne et/ou des cahiers des charges nationaux. Il garantit qu’un produit agricole ou artisanal a été acheté aux producteurs du Sud suivant les principes d’équité (achat direct, prix juste, préfinancement, relation durable). Il garantit qu’un produit alimentaire transformé est composé à plus de 95 % d’ingrédients issus du commerce équitable (entre 70 % et 95 %, le produit final peut seulement bénéficier d’un étiquetage séparé où figure sa composition précise en ingrédients équitables, sans toutefois arborer le logo).

Le caractère exemplaire du commerce équitable

Même si les règles du commerce international doivent encore évoluer vers plus d’équilibre et de justice entre le Nord et le Sud, à la fin de la décennie 2030 on peut considérer que le caractère exemplaire du commerce équitable fait désormais l’objet d’un large consensus. En particulier, les décideurs publics chargés des relations avec les pays en développement reconnaissent qu’il constitue un moyen de faire évoluer les mentalités et les pratiques dans le commerce international. C’est ainsi qu’émergent chez les firmes commerciales une attitude plus responsable au plan social, tendant à mieux intégrer l’impératif de solidarité. C’est ainsi également qu’est influencé le comportement des particuliers plus conscients des situations d’interdépendances économiques Nord/Sud.

SOLAGRAL (Solidarité agricole et alimentaire) - n’existe plus

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