Au début des années 1980, le conflit commerce/environnement éclate quand les mouvements de la société civile se manifestent contre le fait que les politiques commerciales nuisent... l’environnement. A partir de 1990, avec l’embargo des Etats-Unis sur les exportations de thon mexicain, la question devient centrale dans l’ordre du jour mondial.
L’enjeu de la mise en cohérence des politiques environnementales et commerciales est double : éviter la montée d’un protectionnisme déguisé utilisant la protection de l’environnement comme argument, et assurer la durabilité de la croissance économique par une meilleure valorisation des ressources naturelles.
Les effets commerciaux des politiques de protection de l’environnement
Pour protéger l’environnement et maintenir un certain niveau de qualité de vie, les Etats peuvent mettre en place, au niveau national, des instruments qui vont avoir des répercussions sur les flux commerciaux et économiques :
instruments réglementaires ou contraignants (normes ou limites... l’utilisation), pour influer sur le comportement des pollueurs. Par exemple, en 1990, l’Allemagne a légiféré sur l’obligation de récupération et de recyclage de tous les produits et matériaux.
mais aussi instruments de persuasion (éducation ou encouragement... la constitution de mouvements sociaux)et instruments économiques (redevances ou subventions).
Au niveau international, les dispositions commerciales des accords sur l’environnement prennent en général la forme de l’interdiction des échanges (cf. la convention sur le commerce international des espèces sauvages de faune et de flore menacées d’extinction), de l’incitation négative ou de la sanction. Dans d’autres cas, les prévisions des accords internationaux peuvent atteindre indirectement le commerce international, par exemple quand ils entraînent une réduction de la production (cf. réduction des émissions de CO2 dans l’accord sur les changements climatiques).
L’impact de la libéralisation sur l’environnement
Les politiques commerciales ont un impact sur l’environnement dans la mesure o- elles modifient le volume et la répartition des activités de production et de consommation. Elles peuvent viser... protéger la production nationale par le biais de subventions et de restrictions au marché (c’est vrai notamment pour le commerce mondial des produits alimentaires). Elles peuvent encourager la localisation ou la concentration des industries dans certains points géographiques (cf. les maquiladoras... la frontière américano-mexicaine causent des dégâts énormes sur l’eau et sur l’air). Enfin, pour protéger l’environnement national ou régional, les politiques commerciales peuvent autoriser l’exportation de produits dont l’utilisation est interdite sur le marché local : c’est le cas de certains pesticides ou des déchets toxiques et dangereux exportés par l’Union européenne vers le Tiers Monde.
Le GATT et l’OMC face... la question des normes environnementales
Depuis 1970, la problématique commerce/environnement a été traitée par le GATT. Toutefois, dans l’accord de l’Uruguay round, le thème de l’environnement n’est qu’indirectement abordé, par exemple... travers les mesures sanitaires et phytosanitaires ou les investissements.
C’est au sein de l’OMC que la problématique a pris le relais, même si a priori, l’Organisation ne favorise pas le contrôle des atteintes à l’environnement. Son préambule énonce que "l’accroissement des échanges n’est pas une fin en soi, mais un moyen pour parvenir à l’objectif du développement durable". L’OMC est dotée d’un Comité sur le commerce et l’environnement (CCE), dont le mandat couvre tous les échanges (biens, services et propriété intellectuelle). Le CCE doit analyser les relations entre dispositions commerciales et mesures environnementales, et formuler des recommandations sur des modifications des règles du commerce international. En 1997, il a travaillé sur les questions d’accès au marché, et d’interdépendance des activités multilatérales concernant l’environnement et le commerce. Sur ce dernier point, il a organisé une réunion d’information avec les secrétariats de sept accords environnementaux multilatéraux et de 2 mécanismes financiers environnementaux. En outre, un symposium s’est tenu à son initiative avec 70 ONG du Nord et du Sud, pour débattre des travaux de l’OMC sur le commerce, l’environnement et le développement durable.
Pour l’heure, l’OMC n’autorise toujours que les normes de produit et les normes de qualité, mais pas les normes sur les processus et méthodes de production. Ce sont pourtant ces dernières qui sont le plus à même de faire en sorte que les modes de production adoptés soient compatibles avec le respect de l’environnement. L’OMC privilégie la voie de l’internalisation des co-ts par les prix (taxes ou droits à polluer), qui permet de préserver la prépondérance du marché dans les mécanismes de régulation de la pollution. Cette approche suppose de mesurer la valeur économique des biens environnementaux, ce qui en pratique est extrêmement difficile.
Harmoniser les normes et les taxes écologiques
La promotion des échanges et la protection de l’environnement ne semblent compatibles que sous certaines conditions, liées notamment à la promotion de l’écodéveloppement dans les relations internationales, avec garantie d’accès pour les pays du Sud aux financements et aux transferts de technologies sur base non-commerciale. Depuis 1948 en effet, le modèle commercial en vigueur a plutôt aidé à accélérer la dégradation environnementale partout dans le monde. Les mesures commerciales utilisées pour protéger l’environnement ont surtout été jusqu’à présent de nature protectionniste, c’est-à-dire marquées par l’unilatéralisme et l’exercice extra-territorial du pouvoir en matière environnementale.
Pour bâtir les fondements d’un consensus global pour la coopération, en priorité au moyen d’incitations positives, le débat sur le commerce et l’environnement au niveau multilatéral devrait conduire à :
l’harmonisation des normes écologiques, et l’autorisation des normes sur les processus et méthodes de production;
la généralisation des écolabels ;
l’application de taxes ou autres mesures fiscales ;
la modification des régimes de droits de propriété sur les biens environnementaux.
commerce international, protection de l’environnement, politique commerciale, réglementation internationale, libre échange, commerce équitable, OMC
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Rapport ; Articles et dossiers
MILANI, Carlos, Le rapport commerce-environnement et les dangers de l'ecoprotectionisme, 1994, Le rapport commerce-environnement et les dangers de l'écoprotectionnisme par Carlos MILANI, article paru dans Cahiers d'Amérique latine, 1994. Du GATT... l'Organisation mondiale du commerce, étude publié par Solagral, 1995.
SOLAGRAL (Solidarité agricole et alimentaire) - n’existe plus