L’intervention civile est une façon non-violente de contribuer à la résolution des conflits armés. Pour être efficace, l’expérience montre qu’elle doit répondre à certains principes (voir fiche : Principes de l’intervention civile). Dans la pratique, elle prend plusieurs formes :
Les missions d’observation et de médiation
L’envoi d’observateurs civils a pour objectif de comprendre la genèse d’un conflit et d’établir les responsabilités respectives des belligérants, puis d’en informer les instances politiques et diplomatiques qui mandatent ces observateurs afin de définir un projet politique global de retour à la paix et de préciser les autres formes de l’intervention civile.
La présence d’observateurs internationaux fait baisser le niveau de violence, car les parties en présence hésitent à prendre l’initiative d’actions violentes de peur d’être discréditées. C’est à l’abri des regards que les pires violences se déchaînent. Mais cette présence ne suffit pas toujours à les faire cesser. Souvent, il faut envisager la mise en place d’une structure remplissant des fonctions de police et de justice. L’ONU pourrait remplir ce rôle si elle disposait d’un code pénal international applicable par un personnel sous son statut. Amnesty international rempli de fait un rôle d’observateur et fait pression sur les autorités publiques pour que les droits de l’homme soient respectés.
La mission de médiation va plus loin : elle vise à permettre la communication entre les adversaires et les invite à régler pacifiquement leurs différends. Ecumenical Peacemakers Programme, créé en Afrique du Sud, remplit par exemple ce rôle. De telles missions, pour être efficaces, doivent intervenir avant le début des affrontements et disposer d’un personnel nombreux et bien formé. Pour prévoir les conflits, l’ONU pourrait se doter d’un centre de prévention des crises, à l’instar de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).
Des missions d’observation et de médiation peuvent également faciliter le retour à la paix après les conflits. Dans ce cadre, d’autres missions sont également nécessaires pour garantir le retour des réfugiés, réinsérer les anciens combattants, remettre sur pied les institutions, etc.
L’ingérence informationnelle
Permettre l’expression de ceux qui s’opposent aux propagandes bellicistes, combattre les idéologies fondées sur l’exclusion et la discrimination, éviter que l’information ne devienne une arme de guerre : voilà qui justifie l’ingérence informationnelle. L’ONU ou l’OSCE légitiment ans leurs résolutions ce droit qui est également inscrit dans la déclaration des droits de l’Homme. Il y a en effet des médias qui ont joué un rôle décisif dans la montée des tensions, par exemple au Rwanda ou dans les Balkans. à l’instar de miliciens ou de militaires, certains journalistes pourraient être inculpés de crimes de guerre.
L’interposition non-violente
Les Brigades de paix internationales sont intervenues dans plusieurs conflits en Amérique latine et en Haïti. Elles assurent une présence dissuasive aux côtés de ceux qui luttent pour la justice et la démocratie, car leurs adversaires politiques, s’ils sont soucieux de leur respectabilité sur le plan international, évitent de rendre trop visible leur violence.
D’autres organisations du même type existent, souvent mises en place à l’initiative des Églises. Une interposition massive de citoyens se fondant dans une population menacée par des groupes armés est également possible. Mais ces volontaires prennent de grands risques pour leur sécurité, comme d’ailleurs les militaires lors d’une intervention armée (lors de la Guerre du Golfe, des Occidentaux ont été utilisés comme "boucliers humains", c’est-à-dire placés à proximité de sites stratégiques pour dissuader d’éventuelles attaques aériennes).
La reconstruction de la paix
La reconstruction des institutions est une étape décisive du retour à la paix. Par exemple, installer des écoles a un impact psychologique très important, car cela montre un retour à la normalité et permet de soustraire les enfants à l’influence guerrière des adultes. Dans le domaine judiciaire, la lutte contre l’impunité est également décisive. Il faut également reconstruire la vie économique et sociale.
Les intervenants étrangers, outre leur rôle en matière de coopération technique, peuvent également contribuer à la résolution des conflits. Par exemple, les Volontaires des Nations Unies cherchent à favoriser la communication entre communautés locales, à former les leaders locaux aux techniques de la médiation et de la négociation, à provoquer des occasions de travaux collectifs permettant aux gens de se réunir derrière un même but.
La tâche proposée à ceux qui veulent contribuer à la paix est disproportionnée par rapport aux moyens dont ils disposent. Les États manquent de volonté à ce sujet et il appartient aux citoyens de faire pression sur eux pour infléchir la politique en ce sens. Décider d’interventions militaro-humanitaires est peut-être spectaculaire, mais n’est ni satisfaisant ni suffisant pour garantir un retour durable à la paix. La prévention et la gestion des crises exigent une politique de prévention, une diplomatie de médiation et une stratégie civile d’intervention. Il faut pour cela y consacrer des moyens. Tant que les sociétés ne se décideront pas à payer le prix pour la paix, elles devront assumer celui de la guerre.
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Livre
MULLER, Jean Marie, Principes et méthodes de l'intervention civile, Desclée de Brouwer, 1997 (France)
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